Face à la pénurie de fourrages les alternatives se multiplient
Elevage - Transport de paille, transfert de maïs grain en fourrage, implantation de cultures dérobées, tous les moyens sont bons.
AU 20 JUILLET, les pertes de production de fourrages atteignent encore 55 % de la production annuelle de référence, malgré une timide reprise de pousse des prairies en juillet.
Selon la note de conjoncture du ministère de l’Agriculture en date du 27 juillet, « la situation est très préoccupante ». « Les pertes de production du printemps, marqué par une sécheresse exceptionnelle, ne pourront sans doute pas être compensées par une bonne production d’été et d’automne ». « De fait, les stocks de fourrages sont très insuffisants et les éleveurs vont devoir les reconstituer en achetant à l’extérieur », indique les analystes. Cependant, l’achat de paille n’est pas la seule solution qui s’offre aux éleveurs. Le transfert de maïs grain vers l’ensilage devrait atteindre des records selon l’AGPM, sans parler d’une montée en puissance des cultures dérobées.
Non reconstitution des stocks fourragers
«La pousse des prairies reprend timidement sur toute la façade Est de la France. Les pluies de juillet permettent une reprise de la production qui devrait permettre de satisfaire les besoins des troupeaux au pâturage», indique le ministère de l’Agricuture. Cependant, un tiers des régions fourragères conserve une production exceptionnellement faible en dessous de 50 % de la production cumulée de référence. Cette situation s’observe dans principalement trois zones : le Sud-Ouest de Poitiers à Toulouse, les Pays-de-la-Loire et une partie du Centre, la Champagne-Ardenne et la Lorraine. Seules quelques rares régions fourragères ont une production normale. C’est le cas notamment du sud de l’Aquitaine et de Midi-Pyrénées, le centre de l’Auvergne et de la façade Est du pays.
Près d’1 Mt de paille contractualisée
Face à cette pénurie annoncée de foin, la FNSEA et les JA ont lancé une opération nationale, baptisée “Solidarité paille”, qui a permis de contractualiser aux alentours d’un million de tonnes de pailles entre les céréaliers et les éleveurs sinistrés. Et c’est sans compter les échanges intra-départementaux. L’acheminement est en cours dans de nombreux départements. Le “Convoi de solidarité” de 60 tracteurs partie de l’Ain, le 26 juillet, en direction de la Seine-et-Marne afin de récupérer 850 t de paille en est un exemple. Un autre convoi est prévu les 8 et 9 août entre la Marne et la Haute-Saône. De plus, 50.000 t devraient circuler par train, en utilisant six liaisons ferroviaires selon les axes Nord/Atlantique-Vendée et Nord/Massif central, indique la FNSEA. Une dizaine de trains circuleront, sur des distances supérieures à 400 km, pour un coût voisin de celui du transport routier. Pour limiter la durée de location des wagons et face au manque de camions disponibles du fait des congés des transporteurs, des zones de stockages gratuites, surveillées par l’armée, sont prévues. Les transports se poursuivront tout le restant de l’année, cet hiver compris, confirme la FNSEA.
Les transferts de maïs grain vers l’ensilage attendus à des niveaux record
Dans sa lettre économique hebdomadaire, l’AGPM note que « sur plusieurs bassins (Ouest et Sud-Ouest en particulier), la demande de maïs sur pied par les éleveurs augmente ». Ce qui confirme que « les transferts du grain vers l’ensilage devraient être très proches des records historiques ». Luc Esprit, directeur général de l’AGPM, estime qu’à l’échelle nationale, ces reconversions de grains en fourrage concerneraient entre « 50.000 et 100.000 ha », alors qu’à l’heure actuelle « les surfaces en maïs grain totalisent 1,5 Mha et les surfaces destinées à l’ensilage 1,4 Mha ». Ces transferts sont principalement localisés dans les grandes régions d’élevage. Mais s’y ajoutent « des contrats entre céréaliers et éleveurs », précise Luc Esprit.
Ces premières estimations restent à affiner étant donné les incertitudes concernant la production des prairies cet été et cet automne, qui conditionnera le taux de transfert effectif. De plus, « certains éleveurs ont effectué des semis de maïs en dérobée après les moissons d’orge en début juin », souligne le dirigeant de l’AGPM, qui ajoute : « C’est un phénomène mineur, qui concernerait au maximum 10.000 ha. » Cependant, les pluies de juillet ayant profité aux cultures, leurs productions pourraient être significatives.
Les cultures intermédiaires plébiscitées
Ce développement des cultures dérobées tend à se généraliser, au vu des initiatives départementales et régionales qui se multiplient depuis ce printemps. La dernière en date concerne les éleveurs du Puy-de-Dôme. Le Conseil régional d’Auvergne a mis en place le 27 juillet un système d’aides à l’implantation de cultures fourragères dérobées, plafonnées à 100 €/ha pour l’éleveur et 170 €/ha pour les céréaliers, venant à leur secours.