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Embargo russe : impact diffus sur l'export français

L'embargo russe, mis en place le 6 août par la Russie sur les produits agroalimentaires, notamment en provenance de l'UE, touche surtout les produits laitiers. Pour les autres filières hexagonales, les effets sont plus difficiles à quantifier.

Le 6 août 2014, Valdimir Poutine, président de la Russie, décrétait un embargo d'un an sur les produits agroalimentaires en provenance de l'UE, de l'Australie, du Canada, de la Norvège et des États-Unis, en réponse aux sanctions économiques qui lui ont été imposées par ces pays dans le contexte de conflit opposant la Russie et l'Ukraine. En valeur, les exportations agroalimentaires françaises vers la Russie représentaient en 2012 690 M€ et 738 M€ en 2013. Dans le détail, cette facture concernait pour 20 % des viandes et préparations à base de viandes, 11 % des produits laitiers, 10 % des céréales, 10 % des aliments pour animaux et 5 % des fruits & légumes, d'après l'APCA.

Prix des produits laitiers en chute libre

Pour l'heure, c'est principalement le secteur laitier qui souffre, même si la Russie a exempté le 20 août une liste de produits, dont le lait et les produits laitiers sans lactose. Dès l'annonce de l'embargo, le marché, déjà bien offert en volume, a marqué le pas, avec des cours en forte baisse. Entre fin juillet et début septembre, la poudre de lait à 0 % de matières grasses pour la consommation humaine est passée de 2.870 à 2.100 €/t (Atla), et dans son sillage, la qualité animale est tombée de 2.400 à 1.790 €/t. « Dans un secteur où l'offre est inférieure à la demande mondiale, un tel embargo doit pouvoir se gérer politiquement et donc économiquement. (…) L'embargo russe ne doit pas servir de mauvais prétexte à l'aval de la filière » pour peser sur le prix du lait, estime la FNPL dans un communiqué du 2 septembre.

Les exportations françaises de produits laitiers représentaient 109 M€ en 2013 et 87 M€ en 2012, selon l'APCA. La Russie est le 5e débouché en produits laitiers sur pays tiers de l'Hexagone. Dans le détail, la France est son 3e fournisseur de poudres de lait, 9e de fromages et 7e de beurre.

Impact difficilement chiffrable pour les viandes et les céréales

Si les viandes et préparations à base de viandes représentent 20 % des exportations françaises en valeur vers la Russie, les conséquences de son embargo sur le secteur demeurent difficiles à mesurer. Le secteur du porc apparaît comme le plus affecté. Or « un embargo sanitaire était déjà en place (conséquence de la peste porcine) et bloquait déjà toutes importations de porc hexagonal sur le territoire », relevait Jacques Poulet, directeur du pôle animal de Coop de France. Pour mesurer les effets, sur les secteurs bovin et avicole, la vision doit être élargie à l'Europe, la France n'étant pas particulièrement exportatrice dans cette zone. Mais, l'Allemagne et la Pologne, notamment, y expédient d'importants volumes. La question est donc de savoir ce que ce surplus de viandes européennes deviendra et comment il pèsera sur le marché européen.

Les conséquences de l'embargo sur les produits d'origine animale pourraient aussi se traduire par un recul indirect des débouchés céréaliers sur le marché français. L'impact direct sur le marché des grains sera très limité a priori. Même si les céréales représentent 10 % de la valeur de l'export agroalimentaire en Russie, les volumes restent “epsilonnesques”. « Depuis 2006, la “ ” France vend à la Russie plus de céréales que par le passé », explique Thierry Pouch, chef du service des'études économiques de l'APCA. Selon les chiffres du Cepii, la France a vendu près de 30 M€ de céréales en 2006, 60 M€ en 2007, 85 M€ en 2008, et 100 M€ en 2012. À noter également que les produits de nutrition animale représentent 10 % des exportations en valeur. Un chiffre englobant aussi bien l'aliment pour le bétail que le petfood.

La poudre de lait Alimentation animale a chuté de 610 /t en une semaine.

Un impact sur les exportations encore incertain

La Russie est le deuxième partenaire commercial de l'UE pour le secteur agroalimentaire, a rappelé le 3 septembre Dacian Ciolos, commissaire européen de l'Agriculture. En 2012, l'UE aurait exporté pour 9 Md€ vers la Russie. Avant l'embargo, 29 % des fruits et légumes, 33 % du fromage et 28 % du beurre exportés par l'UE partaient vers la Russie (AFP/Dacian Ciolos). En 2013, les exportations françaises agroalimentaires vers la Russie étaient de 619 M€, selon les douanes françaises. La France ne serait que le 8e fournisseur alimentaire de la Russie, après le Brésil, l'Allemagne, l'Ukraine, les Pays-Bas, la Chine, les États-Unis et la Turquie.

Mesures mises en place

FNSEA, Coop de France et APCA souhaitaient que d'autres fonds, que ceux de la Pac, soient alloués à la compensation et l'aide aux agriculteurs, mais Stéphane Le Foll a réitéré son refus le 3 septembre. Le lendemain, le Parlement européen insistait pour que l'UE augmente son soutien à ses agriculteurs. Et notamment, de pouvoir puiser dans la réserve de crise de 430 M€. Pour l'instant, les mesures de soutien s'élèvent à 175 M€ et devraient être financées dans le cadre du budget agricole 2015, d'après une source européenne. Les solutions mises en place pour les fruits et légumes sont le retrait de marché et l'indemnisation à 50 %. « Pour le secteur laitier, Bruxelles a décidé d'instaurer une aide au stockage privé pour le lait écrémé en poudre et le beurre, qui peut être étendue à certains types de fromages. Sa durée est comprise entre trois et sept mois », d'après l'APCA. Le 5 septembre (jour de bouclage de cette édition, NDLR), Stéphane Le Foll avait rendez-vous en conseil extraordinaire avec ses homologues européens.

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