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Compte Pénibilité : les filières ont besoin de temps

Si le Premier ministre a annoncé le report partiel de la mise en œuvre du Compte personnel de prévention de la pénibilité, les quatre facteurs de risque appliquables au 1er janvier 2015 impactent particulièrement les secteurs agricole et agroalimentaire.

«Au regard de la complexité du dispositif du Compte personnel de prévention de la pénibilité (CPPP) et de la réalité économique des entreprises en France, le report de la mise en œuvre et la réouverture d'un réel dialogue constructif et pragmatique sur les modalités d'application est une nécessité », martèlent l'Ania, Coop de France et la FNSEA, dans un communiqué commun en date du vendredi 27 juin. Des doléances entendues par le Premier ministre, qui a annoncé, le mercredi 2 juillet, son intention d'étaler dans le temps la mise en place du CPPP. À partir du 1er janvier 2015, seuls quatre des dix facteurs de pénibilité retenus seront comptabilisés, à savoir le travail de nuit, répétitif, en équipes successives alternantes et en milieu hyperbare. « En 2016, on mettra progressivement en œuvre les autres facteurs », plus compliqués à appréhender tels que les manutentions manuelles de charges lourdes, postures pénibles et agents chimiques dangereux (y compris les poussières et les fumées), ou encore les vibrations mécaniques, bruits et températures extrêmes, explique Manuel Valls (sur RMC et BFM TV, le 2 juillet). Dans la perspective de la Conférence sociale des 7 et 8 juillet, le chef du gouvernement a également souhaité reprendre la concertation, sur la base d'une version remodelée des décrets d'application, dévoilés le 24 juin. Et ce, pour tenir compte des critiques du patronat, qui les jugent inapplicables, complexes et peu sécurisés sur le plan juridique (Les Échos, édition du 2 juillet).

Une “incroyable” complexité et un coût salarial “inquiétant”

À l'image de la meunerie, les secteurs de l'agriculture et de l'agroalimentaire seront fortement impactés par le CPPP.

La mise en œuvre progressive du CPPP ne satisfait pas totalement les professionnels des secteurs agricoles et agroalimentaires, qui dénonçaient son entrée en vigueur au 1er janvier 2015. « Ces dispositions liées à la pénibilité se révèlent inapplicables dans les délais, au regard de leur incroyable complexité, en particulier pour les PME et TPE, qui représentent la très grande majorité des entreprises agricole et agroalimentaire », rappelle Xavier Beulin, président de la FNSEA, dans le communiqué commun. Un avis partagé par Pierre-André Masteau, secrétaire général de l'ANMF, au vu de l'ampleur du travail que va représenter l'évaluation de l'exposition, aux dix facteurs de pénibilité retenus, de chaque poste ou situation de travail. « Dans la profession meunière, plusieurs postes sont impactés ou poly-impactés, à savoir les conducteurs de moulin, les assistants techniques et les chauffeurs-livreurs », précise-t-il. Et Emmanuel Paris, directeur des actions sociales de Coop de France, d'ajouter : « Sur l'ensemble de la coopération agricole, nous avons 45 % d'ouvriers et 65 % de nos effectifs sont sur des activités de production et de logistique, nos principaux pôles de pénibilité. »

Des mesures financées par une double cotisation des employeurs

Mesure phare de la loi du 20 janvier 2014 garantissant l'avenir et la justice du système de retraite, le Compte personnel de prévention de la pénibilité (CPPP) permet de cumuler des points en fonction de l'exposition à un ou plusieurs facteurs de pénibilité. Ces derniers peuvent être utilisés par le salarié pour suivre des formations permettant de se réorienter vers un emploi moins pénible, pour financer un maintien de rémunération lors d'un passage à temps partiel en fin de carrière, ou pour bénéficier de trimestres de retraites. Le dispositif est financé par une double cotisation des employeurs. La cotisation de base, « affectée d'un taux très bas de 0,01 % et activée à partir de 2017 seulement », doit permettre d'« assurer l'équilibre financier du compte Prévention pénibilité par la solidarité interprofessionnelle », indique le dossier de presse ministériel de juin 2014. La cotisation spécifique (0,1 % les deux premières années, puis 0,2 % à compter de 2017 – doublé en cas de poly-exposition), payable dès 2016 pour l'année 2005, n'est due que pour les salariés pour lesquels le seuil annuel d'exposition est dépassé. « Le coût probable de ces mesures, via une augmentation des cotisations sociales des employeurs, va lourdement peser sur la compétitivité de nos entreprises », dénonce Philippe Mangin, président de Coop de France, dans un communiqué co-rédigé avec l'Ania et la FNSEA.

Si la complexité du dispositif peut « à la rigueur être surmontée » par les professionnels, souligne le représentant de Coop de France, son coût est source de « grande inquiétude ». « On a des cotisations qui pourraient monter jusqu'à 0,4 % de la masse salariale des employés soumis à plusieurs facteurs de pénibilité, illustre-t-il. Sur des structures où 75 % des salariés travaillent en équipes successives avec des gestes répétitifs, on voit rapidement l'impact que peut avoir la réforme en termes stricto sensu de coût du travail. » D'autant plus, que cela concerne souvent des activités au taux de marge réduit, où « le moindre surcoût en matière de charge est très compliqué à gérer ».

Seule éclaircie au tableau, les seuils d'exposition des facteurs de pénibilité seront appréciés « après prise en compte des moyens de protection prévus par l'employeur », ce qui fait dire au gouvernement qu'« il y a là un puissant levier d'incitation aux mesures de protection des salariés », qui vient compléter les dispositifs existants de prévention des risques professionnels. « Une problématique, travaillée de longue date à Coop de France, qui compte bien accentuer ses efforts en ce sens », affirme Emmanuel Paris.

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