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Production
Changement climatique : L'Amérique sortirait gagnante contrairement à l'Europe

L’Europe et l’Eurasie seront plus durement touchées par le changement climatique que leurs concurrents américains du Nord comme du Sud, selon Isaac Hankes qui présentait une analyse des évolutions climatiques lors du Paris Grain Day, le 31 janvier.

Isaac Hankes
lsaac Hankes, expert en analyse climatique à Refinitiv, invité à s’exprimer à Paris le 31 janvier.
© Yanne Boloh

Le changement climatique impacte de façon très différente les régions productrices de grains dans le monde, selon lsaac Hankes, expert en analyse climatique à Refinitiv, invité à s’exprimer à Paris le 31 janvier. Au-delà de constat, il s’est livré à une analyse fine des tendances et événements extrêmes pour identifier les grands perdants et les grands gagnants de l’évolution climatique : l’Europe et l’Eurasie seront plutôt perdantes quand l’Amérique du Nord en tirerait bénéfice. C’est aussi le cas pour le Brésil et l’Argentine même si, à court terme, Isaac Hankes prévoit que la sécheresse affectera le Brésil pour sa seconde récolte (mars-mai 2020). De l’autre côté du globe, l’Australie et l’Inde seraient touchées positivement contrairement à la Chine, qui souffrirait plus souvent de sécheresse même si le risque de précipitations excessives se réduit. Pour l’expert, le marché international des grains devrait profiter du changement climatique puisque cinq des plus grands producteurs y gagneront et seuls trois des principaux fournisseurs y perdront. Il montre aussi que deux « émergents » gagneraient des terres arables : la Russie et le Canada qui, même s’ils souffriront d’épisodes plus graves de sécheresse (Russie) ou de froids (Canada), verront certaines de leurs régions se réchauffer, ouvrant ainsi de nouvelles zones de production.

Une Europe assez durement touchée

Dans le détail, l’Europe et l’Eurasie (zone mer Noire) sont, en tendance, de plus en plus chaudes et de plus en plus sèches depuis les années cinquante. Elles connaissent également des événements plus extrêmes qu’auparavant tant en termes de chaleur que de froid et de sécheresse, même si les fortes précipitations sont relativement moins fréquentes. Sur les trente dernières années, les hivers sont moins froids et les pluies sont plus importantes mais cela ne suffit pas face aux étés plus chauds qui s’ajoutent aux événements exceptionnels. Au total, ces deux zones seront plutôt perdantes face aux changements climatiques, leur imposant ainsi d’agir davantage pour les compenser.

Aux États-Unis, la tendance est au réchauffement global accompagné d’une amélioration des pluies. Et, même si certains événements extrêmes (froid, chaud, inondations) sont plus fréquents, les sécheresses le sont moins et favorisent l’agriculture comme les hivers en moyenne moins froids. Le Brésil connaîtrait une évolution similaire. Les soixante dernières années ont montré une tendance à un réchauffement (facteur négatif dans son amplitude) et à une plus grande humidité (favorable en moyenne). Les froids et les sécheresses extrêmes sont moins fréquents et, même si les épisodes de forte chaleur et les inondations reviennent plus souvent, l’ensemble des facteurs reste favorable à l’agriculture. L’Argentine devrait aussi en tirer profit avec des températures plus stables, une réduction des épisodes de froid ou de chaleur intenses comme des sécheresses et des inondations. Les seuls facteurs négatifs apparaissent sur les trente dernières années (refroidissement des étés et réduction des précipitations), mais ne suffisent pas à entraîner le pays dans le camp des perdants.

Une Australie gagnante à terme

L’Australie devrait également être gagnante à terme, même si les énormes incendies dont elle souffre actuellement vont durablement freiner sa production. En se basant sur les 60 dernières années, Isaac Hankes montre que les principales régions agricoles sont plus chaudes et plus humides qu’avant. Les températures extrêmes n’impactent que certaines zones, comme le Sud-Est, frappé successivement par des grands froids et de fortes chaleurs. Par contre, les inondations sont beaucoup plus fréquentes dans tout le nord et l’ouest du continent.

L’Asie est assez logiquement contrastée : le nord-est de la Chine est globalement plus chaud et plus sec, l’Inde est un peu plus chaude mais plus stable que son grand voisin. Dans tout le continent, les épisodes de grands froids régressent contrairement aux canicules, ce qui s’accompagne d’une réduction des inondations mais d’une aggravation du nombre de sécheresses. Au final, l’Inde devrait donc mieux tirer son épingle du jeu climatique que la Chine.

 

 

Attention à la méthode

Pour déterminer l’impact de l’évolution climatique sur chacune des grandes zones de production agricole, Isaac Hankes utilise les données climatiques des soixante dernières années. Il identifie ainsi les tendances clés qui affectent chacune des zones de production, ainsi que les événements extrêmes (trop chaud, trop froid, trop sec, trop humide). Il compare, par ailleurs, les évolutions des moyennes de températures et de précipitations entre les trente dernières années (1989-2018) et les trente précédentes (1959-1988). « Cela permet de valider de façon robuste les tendances. Car, si nous ne nous basons que sur les quarante dernières années, les résultats sont très différents. Dans ce cas, l’Europe et l’Eurasie gagnent aux changements climatiques comme l’Amérique du Nord alors que le Brésil et l’Argentine passent dans le camp des perdants, avec l’Australie. Et au global, le marché des grains y perdrait », conclut l’expert.

 

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