Blé tendre français, une option pour le Nigeria ? Pas si sûr pour le moment
Le Nigeria, qui importe presque l'intégralité de son blé des États-Unis, pourrait se tourner vers le blé tendre hexagonal, plus compétitif avec la chute de la monnaie européenne face au dollar, a indiqué mercredi à l'AFP le ministre de l'Agriculture, Akinwumi Adesina, en visite à Paris. « Si vous êtes moins chers, c'est bon pour nous : avec la baisse du cours de la monnaie nigériane vous avez l'avantage, d'autant que le Nigeria a toujours entretenu une excellente relation avec la France », a déclaré le ministre nigérian.
Fausse bonne nouvelle
Cette annonce pourrait réjouir les exportateurs français mais elle s'apparente plus à une fausse bonne nouvelle, la demande des meuniers étant quasi exclusivement tournée vers des blés à plus de 12 % de taux de protéines, plutôt rares en France. Le Nigeria est l'un des plus gros acheteurs d'Afrique subsaharienne. « C'est un marché d'au moins 4 Mt, soit près de la moitié du tonnage importé sur la zone allant de la Mauritanie à l'Angola », estime Yann Lebeau, responsable du bureau de Casablanca de France Export Céréales.
Un marché d'au moins 4 Mt essentiellement tourné vers des blés à 12 % de protéines.
La France y exporte quelques volumes, mais très peu au regard des besoins. « Nous fournissons entre 100 et 250 kt de blé suivant les années. Mais ce volume n'est destiné qu'à un seul moulin pour la fabrication d'une farine spéciale, qui ne demande pas 12 % de taux de protéines. Nous avons exporté 139 kt à ce jour sur 2014/2015 », explique Yann Lebeau.
Le Nigeria ouvre ses portes à de nouveaux exportateurs
Jusqu'à la campagne 2013/2014, les meuniers nigerians n'achetaient que du blé d'origine étatsunienne, notamment du hard red winter, pour approvionner leur outil de production. Cette année, l'importateur africain s'est tourné vers d'autres sources d'approvisionnement, amputant les volumes en provenance des États-Unis de près d'1 Mt, souligne Yann Lebeau. « La Russie a expédié entre 500 et 600 kt de blé, l'Allemagne 53 kt et la Roumanie 27 kt qui viennent s'ajouter aux 139 kt françaises ».
Une première étape vers de nouvelles relations avec les exportateurs nigérians ? Pas évident, car les moulins au Nigeria sont de très grosses unités, avec d'importantes capacités d'écrasement. Faire évoluer leur cahier des charges (blé à 12 % de protéine minimum) pour incorporer davantage de blés hexagonaux relève encore de l'exploit. « Ce sera très compliqué », confirme Yann Lebeau.