Acides aminés : quel impact des taxes antidumping pour la nutrition animale européenne ?

Le 13 août, la Commission européenne a fixé la taxe antidumping sur la valine chinoise, avant dédouanement, entre 32,2 et 53,9 % de l’écart de coût entre le coût de production et le prix de vente sur le marché chinois selon les producteurs. L’enquête a été ouverte en décembre 2024, sur le modèle de celle réalisée l’année précédente sur la lysine chinoise et de celle ouverte le 31 octobre 2024 pour le chlorure de choline également chinois. Ces trois nutriments sont utilisés à des volumes très variables dans les formules des aliments pour animaux : le marché de l'Union européenne pour la lysine est ainsi estimé entre 450 000 t et 500 000 t, contre 30 000 t pour la valine. A titre de comparaison, l’Union européenne importe 30 Mt de soja chaque année. 

Lire aussi : Lysine : lancement d'une procédure antidumping, à la suite de la plainte de Metex

Droits provisoires sur le chlorure de choline

Les producteurs européens de chlorure de choline (Balchem Italia Srl et Taminco BV) n’ont pas déposé plainte pour la seule nutrition animale car ses applications sont nombreuses, contrairement aux acides aminés comme la lysine et la valine, principalement utilisés en alimentation animale. La production de l’usine Eurolysine d’Amiens, la seule productrice de lysine dans l’Union européenne, représente environ 15 % de part de marché en lysine et près d’un tiers en valine.

La protection des producteurs a incité, par trois fois, la Commission européenne à appliquer des droits provisoires avant la clôture de l’enquête. Ainsi, pour le chlorure de choline, le règlement d’exécution de fin juin 2025  impose des droits provisoires de 95,6 % à 120,8 %.

Une taxe définitive sur la lysine depuis le 11 juillet

Pour la lysine, la chose est déjà entendue, les Etats membres ayant voté pour une taxe antidumping définitive annoncée le 11 juillet dernier. Elle varie de 47,7 % à 58,2 % du prix avant dédouanement, selon les entreprises chinoises concernées. 

Des prix de lysine au plus bas depuis cinq ans

« Dans l’alimentation des animaux, la plus grosse part de la lysine est apportée par le soja puis, dans une moindre mesure par les céréales à paille notamment le blé. Son prix et son taux d’incorporation sont donc liés aux marchés des matières premières, particulièrement dépressifs actuellement », constate Nicolas Martin (Eurolysine). Le prix de la lysine est actuellement au plus bas depuis cinq ans (1,63 €/kg pour la lysine HCL fin août) mais les conditions de marché redonnent toute sa place à la production européenne. 

Les conditions de marché redonnent toute sa place à la production européenne de lysine.

L’ajustement des prix, en sus des investissements réalisés dans l’usine d’Amiens et son arrêt de maintenance de juillet, permet à l’unité française de tourner à plein régime et de revenir à sa capacité de 80 000 t annuelle de lysine. « Le prix a fortement chuté à l’avantage des fabricants d’aliments pour animaux, et d’anciens fournisseurs qui n’arrivaient pas à lutter contre les prix chinois sont réapparus », note Nicolas Martin. La lysine est en effet aussi produite aux Etats-Unis, au Brésil, en Corée du Sud, en Indonésie mais également en Russie et en Biélorussie, même si ces deux origines ne sont pas autorisées dans l’Union européenne actuellement. Etats-Unis et Brésil seraient d’ailleurs en cours d’enquête antidumping pour leurs propres marchés intérieurs. 

Pour la valine, la destruction de la valeur a été très importante : de plus de 5 €/kg il y a deux ans, elle est tombée à 2,70 €/kg. 

Pour l’autre gros acide aminé, la méthionine, le marché ne s’attend pas à une enquête européenne, Adisseo, l’un des gros faiseurs étant désormais à capitaux chinois.

Lire aussi : Acides aminés, un marché international en évolution