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INTERVIEW
Valorisation chevreaux : « Il nous faut promouvoir la viande de chevreau »

L'association Cabriol, réunissant les éleveurs caprins et ovins lait du département, travaille à la valorisation et promotion de la viande de chevreaux. Explications avec Noëlle Champroux, présidente de Cabriol 63.

Un éleveur accroche une boucle d'identification à l'oreille d'un chevreau sur une aire paillée.
Loin des grands bassins de production, les éleveurs puydômois parviennent difficilement à valoriser leurs chevreaux. (photo d'archive)
© Réussir

En décembre dernier, vous avez réalisé un voyage d'étude avec plusieurs membres de Cabriol 63 sur le sujet de la valorisation des chevreaux. Qu'avez-vous appris ?


Noëlle Champroux : L'objectif de notre voyage était de découvrir les circuits de valorisation des chevreaux des départements de la Drôme et de l'Ardèche (ils travaillent ensemble) et de Haute-Savoie. La viande de chevreau est aujourd'hui très mal valorisée. Les animaux sont collectés par des engraisseurs à minimum une semaine d'âge et pèsent entre 5 et 6 kg. Certains éleveurs les laissent sous la mère mais au regard de la valorisation du lait via la transformation fromagère, et du prix de la viande in fine, cela ne présente aucun intérêt économique, au contraire. Le chevreau ne bénéficie pas d'une filière structurée à l'image des agneaux des brebis laitières. De plus, la consommation de la viande de chevreau se perd en France, hormis dans les zones historiques d'élevages comme la Drôme et l'Ardèche. Dans ces départements, les gens sont habitués à manger cette viande. De plus, les syndicats de producteurs mènent depuis plus de 30 ans des campagnes de promotion, avec notamment l'édition de recette et des dégustations, pour maintenir la consommation qui a tendance à fléchir chez les jeunes. L'élevage caprin dans le Puy-de-Dôme n'a jamais permis de valoriser la viande de chevreau au-delà du cercle familial des fermes.


Quels sont les circuits de valorisation dans la Drôme, l'Ardèche et la Haute-Savoie ?


NC : La Drôme et l'Ardèche engraissent majoritairement les chevreaux. Nos questions étaient de savoir quelle est la ration, quels sont les compléments de maïs ou d'aliment complet, qui collecte, à quel âge est prévu l'abattage... Le Sud Ardèche va débuter un projet de valorisation pour les naissances 2024 avec quelques éleveurs et un abatteur et dans le cadre du plan filière chevreau de la Région AuRA avec l'ouverture d'un poste d'animation pour soutenir la structuration de la filière. Ils arriveraient à valoriser à 10€/kg équivalent carcasse, des chevreaux abattus entre 20 et 25 kg poids vif, à l'âge de trois mois. Il y a dès lors une exigence de qualité de viande qui est soumise et qui va faire l'objet d'un cahier des charges Label Rouge, en cours d'examen à l'INAO. En Haute-Savoie, ils travaillent en partenariat avec le lycée de Contamine sur Avre pour un engraissement des chevreaux et une valorisation en terrine.


Les éleveurs du Puy-de-Dôme sont-ils en mesure de mettre en place des valorisations similaires ?


NC : Les éleveurs caprins puydômois n'ont ni la capacité structurelle d'engraisser (nous n'avons pas les bâtiments adaptés) ni celle de vendre. Nous avons calculé qu'un chevreau engraissé jusqu'à trois mois consomme un sac de 25 Kg de poudre de lait. En 2023, le sac coûtait 80€ HT tandis qu'en 2022, il était à 95€ HT. L'abattage, la découpe et la mise sous-vide coûte 55€/animal. Si les chevreaux sont vendus à moins de 135€ pièce, nous sommes perdants. C'est hors de prix et celui-ci explose si le chevreau est sous la mère, parallèlement à la valorisation du litre de lait transformé.

Lire aussi : "Cabriol", par et pour les éleveurs laitiers caprins et ovins


Comment faites-vous alors ?


NC : La valorisation de nos chevreaux est très variable d'une année à l'autre. Dans mon cas, en 2022 j'ai réussi à faire partir tous mes chevreaux d'un coup, après les avoir conduits à un point de collecte à Vichy (03). En 2023, l'engraisseur a oublié de me prévenir. J'ai dû engraisser mes 56 chevreaux et les vendre moi-même. Heureusement, mon bâtiment était assez grand mais ce n'est pas le cas de tout le monde. Cette situation, de ne pas savoir si les chevreaux vont partir ou non, tous les éleveurs caprins puydômois la vivent. Le plan filière chevreau de la Région est un appel d'air. Il nous permet de nous mobiliser et de réfléchir à des solutions. Pourquoi ne pas aller voir les lycées, y compris hôteliers pour promouvoir la viande de chevreaux ? L'abattoir d'Ambert pour bâtir quelque chose ensemble ? Nous avons aussi la chance d'avoir le soutien du Conseil départemental du Puy-de-Dôme très engagé sur les sujets agricoles.


Que représente pour vous la création de l’association AuRA ? 


NC : Nous étions présent à l'assemblée générale constitutive, le 22 janvier. Son objectif est double : valoriser les chevreaux lourds (10 Kg carcasse), élevés à la ferme, selon le futur cahier des charges du label rouge et prospecter des clients nationaux. L'association démarre avec un projet très concret. L'avantage de la régionalisation de cette association est de pouvoir essaimer l'expérience ardéchoise, en bénéficiant de la force du réseau régional. Dans le Puy-de-Dôme, cela nous a déjà permis d'organiser une formation sur l'engraissement à la ferme des chevreaux, avec Valérie Beroulle du syndicat caprin de la Drôme

Lire aussi : L’association de production régionale enfin sur les rails

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