Un petit élevage laitier bio armé et diversifié pour faire face aux crises
À Maurs dans le sud Cantal, Laurent Vaissière, qui s'est converti au bio en 2012, multiplie les initiatives pour rendre son exploitation plus résiliente face aux sécheresses et au contexte économique.
Penser et enclencher les changements plutôt que subir et panser les plaies des aléas. Oser, tenter, avec le seul risque que ça ne marche pas. C'est une philosophie volontariste mais exigeante qu'a fait sienne Laurent Vaissière, producteur de lait à Maurs. Pourtant, pendant une dizaine d'années, celles qui ont suivi son installation, l'éleveur de Latapie a mis ses pas dans les rails de l'intensification de son système castanhaïre (maïs, ray gras, trèfle), essayant de tirer le maximum de son petit troupeau (25 Prim'Holstein). « Dans un premier temps, j'ai développé, poussé les vaches jusqu'à 9 500 litres avant de me rendre compte que j'étais arrivé au bout de ce que je pouvais faire », raconte l'agriculteur aujourd'hui âgé de 48 ans. De premières inflexions agronomiques sont alors données avec davantage de trèfle implanté, de même que des mélanges prairials un peu plus complexes. Laurent Vaissière traite aussi fumier et lisier avec des apports bactériens.
Semis direct et prairies multi-espèces
Des efforts que la violente crise laitière aurait bien pu réduire à néant. Elle sera finalement salutaire pour l'agriculteur maursois : « J'ai commencé à me remettre en question après une année 2009 où j'avais finalement travaillé pour rien du tout. J'étais trop dépendant du lait blanc. » Autre coup du sort transformé en opportunité : la volonté de la société Dischamp de se séparer d'un certain nombre de producteurs dont... Laurent Vaissière, qui décide dès lors de se tourner vers une production plus valorisante : le lait bio. Un mode de production dont il va rapidement confirmer qu'il colle davantage à ses aspirations : être plus proche du vivant, qu'il soit végétal ou animal. Cette conversion - entre 2012 et 2014 - s'accompagne du développement des mélanges multi-espèces*, de l'allongement des rotations et de la diminution de la part de maïs que Laurent Vaissière va finalement entièrement supprimer en 2019 en même temps qu'il se lance dans le semis direct au sein de prairies vivantes. « Ça faisait dix ans que je m'intéressais au semis direct mais j'avais peur d'arrêter le maïs ensilage », reconnaît l'agriculteur de Latapie, qui a franchi le pas en s'équipant d'un petit semoir direct à disques, en premier lieu pour recharger ses prairies fortement dégradées par les sécheresses successives de 2018, 2019 et 2020. Sursemis de graminées à l'automne, de légumineuses au printemps. « C'était aussi un crève-coeur de casser les belles prairies d'à peine trois ans pour implanter du maïs », complète Laurent Vaissière. Ces prairies multi-espèces deviennent dès lors la base de son système fourrager. Plus de travail du sol mais des techniques culturales simplifiées et des prairies toujours en état qui permettent de maximiser le pâturage (tournant) et de réaliser des enrubannages précoces riches en protéines. Avec les bénéfices d'un sol toujours couvert.
* Ray-grass anglais, pâturin des prés, trèfles blancs et violets, dactyle et fétuque élevée.