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Sortir de la crise apicole : c'est possible !

L'apiculture peut tirer son épingle du jeu et sortir de la crise qu'elle traverse depuis trop longtemps. Pour y parvenir, les efforts doivent se concentrer sur deux enjeux : la nutrition et la lutte contre les parasites et les pathologies.

Les abeilles peuvent de nouveau butiner à la faveur de températures plus clémentes et des premières floraisons
Les abeilles peuvent de nouveau butiner à la faveur de températures plus clémentes et des premières floraisons
© auvergne agricole

L'arrivée du printemps marque le véritable coup d'envoi de la saison apicole. Après l'hivernage, synonyme de claustration saisonnière, les abeilles peuvent de nouveau butiner à la faveur de températures plus clémentes et des premières floraisons. Bonne nouvelle pour les apiculteurs, la mortalité a été plutôt faible cet hiver. La douceur observée en janvier et février n'est pas néfaste pour les abeilles. Les colonies sont donc susceptibles d'être vigoureuses et prêtes à se développer à partir du mois d'avril. Prudence tout de même puisque le démarrage précoce de la saison de ponte donne aussi au parasitisme des abeilles, notamment le Varroa destructor, l'occasion de prospérer encore davantage.

Les agriculteurs au secours des abeilles

La situation économique des exploitations apicoles est tendue. L'an dernier, ce sont moins de 10.000 tonnes de miel qui ont été produites dans l'hexagone, contre plus de 40.000 il y a 20 ans. Cette faible production ouvre la porte aux miels de Chine et d'ailleurs, provoquant des pertes de marché pour la production française. Avec ces atteintes à l'économie apicole, c'est aussi le service de la pollinisation qui se retrouve menacé. Pour voir la production française de miel repartir à la hausse, il faut évidemment des fleurs. Les butineuses ont besoin de pollen et de nectar pour se nourrir et produire. Tous les scientifiques s'accordent à dire que des abeilles bien alimentées sont plus robustes. Éviter les carences alimentaires, voire même la famine des abeilles, est donc une priorité pour lutter contre leur mortalité.

Pour y parvenir, il faut se tourner vers le monde agricole. Loin d'être responsables de la mortalité des abeilles, les agriculteurs en sont les sauveteurs. Que ce soit par les cultures mellifères (colza, tournesol, lavande, luzerne...), les jachères apicoles ou les intercultures en fin d'été, sans oublier les haies ou les prairies naturelles, l'espace agricole contribue à l'alimentation des abeilles. « La présence de jachères apicoles sur 0,5% de la zone de butinage des abeilles permet d'assurer en moyenne plus des deux-tiers de leur alimentation » explique Philippe Lecompte apiculteur professionnel bio et Président du Réseau Biodiversité pour les Abeilles. « Nous appelons les agriculteurs à l'aide pour lutter contre ce qui devient la perpétuelle faim des abeilles. C'est la seule solution pour sortir la filière de la crise » poursuit-il. Et les agriculteurs sont eux-aussi gagnants puisque les abeilles pollinisent leurs cultures avec à la clé des hausses sensibles de leurs rendements. « C'est du gagnant-gagnant » résume Rémi Dumery, agriculteur en Beauce et trésorier du Réseau Biodiversité pour les Abeilles.

Le Varroa destructor : ennemi n°1 des abeilles

L'autre menace pour les abeilles est sanitaire. Elle fait écho à l'épidémie de Coronavirus à laquelle nous devons faire face. Il s'agit d'un parasite externe de l'abeille : le Varroa destructor, qui, comme le Covid-19, est originaire d'extrême orient. Il a franchi la barrière des espèces en colonisant les ruches de toute la planète. Semblable à l'attitude d'une tique chez l'Homme, il va se positionner sur l'abdomen de l'abeille et pomper son hémolymphe, l'équivalent du sang. Fragilisant les défenses immunitaires des abeilles, le Varroa destructor va aussi les contaminer en leur injectant des virus et faire ainsi exploser leurs populations. Redoutable, ce petit parasite est devenu l'ennemi n°1 des abeilles. Et les moyens de lutte des apiculteurs sont très limités. Les attentes formulées par les apiculteurs auprès de la recherche publique et privée sont immenses. « Mobilisées, voire obnubilées par les pesticides depuis des années, les organisations apicoles ont oublié les véritables causes de mortalité des abeilles : la malnutrition, les parasites et les pathologies » estime Philippe Lecompte. Il s'appuie sur les résultats observés dans la Marne année après année : si dans ce département agricole, on utilise bien entendu des produits phytosanitaires, c'est aussi là qu'on trouve des productions records de miel ; de nombreuses exploitations ont dépassé les 100 kg/ruche l'an dernier, quand d'autres régions voyaient leur production s'effondrer. Ailleurs, le niveau de résidus en acaricides dans les ruches et les cires traduit en réalité les problèmes causés par le Varroa destructor. Et les teneurs en acaricides vétérinaires dans les cires sont bien supérieures à celles communément retrouvées pour les résidus de produits fongicides et insecticides utilisés par les agriculteurs. Ces substances acaricides sont utilisées par les apiculteurs pour tuer le Varroa destructor. Les stratégies de lutte collective se mettent en place depuis quelques années. C'est indispensable pour être efficace au plan sanitaire. Elles font d'ailleurs baisser de moitié la mortalité des ruches. Cette situation traduit aussi la nécessité pour les apiculteurs d'être accompagnés au plan technique

Il a dit 

Philippe Lecompte, Président du Réseau Biodiversité pour les Abeilles : « Après l'année noire connue en 2019, l'apiculture française a les moyens de sortir de la crise. Elle doit se concentrer sur deux enjeux majeurs : la nutrition et la lutte contre les parasites et pathologies. Cette démarche doit être soutenue et encouragée par les pouvoirs publics au niveau français et européen. C'est en travaillant avec les agriculteurs que nous pourrons sauver notre filière. Tous les Français redécouvrent l'importance de notre agriculture en cette période de confinement ; les apiculteurs doivent désormais les imiter »

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