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"Ne laissons pas à d'autres le pouvoir de décider de notre avenir agricole"

Répondant à un mot d'ordre de la FNSEA et des JA, Jacques Chazalet président de la FRSEA Massif Central et Michel Queille président des JA Massif invitent les agriculteurs à venir manifester en masse le 16 octobre à Clermont Ferrand. Ils insistent sur l'importance de cette action qui vise à booster les pouvoirs publics qui doivent impérativement réagir face au désarroi de l'agriculture, toutes productions confondues.

La crise touche l’ensemble des secteurs économiques, l’agriculture n’est pas épargnée. Si le secteur est habitué à vivre des turbulences, force est de constater qu’aujourd’hui c’est le chaos qui affecte l’ensemble des productions agricoles. En tant que responsables professionnels, quelles sont vos propositions ?
Michel Queille : Notre responsabilité de jeunes agriculteurs nous conduit à ne pas hypothéquer l’avenir des jeunes que nous avons accompagnés vers l’installation. Si des jeunes ont choisi l’agriculture comme métier, c’est par goût la plupart du temps, et surtout pour pouvoir en vivre. Aujourd’hui, les problématiques de revenu sont énormes. Nous n’accepterons pas, que faute de mesures et de prix décents, ceux qui sont entrés dans le métier depuis peu, soient contraints par la force d’un système inéquitable, d’en sortir aussi tôt. C’est l’avenir de la profession qui se joue, il est donc impératif de se battre.
Jacques Chazalet : La dérégulation n’est pas une fatalité. Notre responsabilité est de nous bagarrer pour un autre avenir agricole que celui que l’on voudrait nous tracer. Nous devons continuer de nous battre pour la régulation des marchés,  la sécurisation de nos revenus mais aussi pour l’harmonisation des charges et des contraintes au niveau européen. Ces propositions, en faveur de nouveaux outils qui protègent nos exploitations, les organisations professionnelles du Massif central les défendent depuis 2007, dans le cadre du livre blanc de l’agriculture du Massif central.

Dignité, charges et contraintes sont les trois mots d’ordre de la manifestation du 16 octobre. Quelles revendications sont associées à ces termes ?
J.C. : A court terme, nous demandons l’obtention d’une année blanche (prise en charge des intérêts d’emprunt, exonération charges sociales et report des annuités en fin de tableau), l’exonération sur la taxe carbone, la réduction du coût du travail pour faire face aux distorsions sociales, l’obtention du remboursement de la TIPP (carburants) et de la TICGN (gaz naturel). Par ailleurs, nous réclamons un assouplissement des contrôles dans le cadre de la conditionnalité (parmi les mesures visées, figurent notamment les BCAE), nous exigeons des sanctions pour les pratiques commerciales abusives, et la tenue des engagements sur les retraites.
M.Q : Ces mesures sur le court terme sont indispensables mais ne seront pas suffisantes pour garantir un avenir à notre agriculture. C’est pourquoi, sur le long terme, il est indispensable de remettre la régulation au cœur de la PAC, de lutter contre les distorsions de concurrence sur les moyens de production, de développer des outils pour gérer les risques et de trouver une place conséquente pour l’agriculture dans le grand emprunt.

Une affiche choc interpellant directement le Chef de l’Etat est adossée à la manifestation, est-ce pour témoigner de votre détermination à obtenir, au-delà des engagements, des actes forts ?
M.Q : Concrètement, l’Etat doit définir un cadre de l’organisation des productions pour la rendre efficace et la sécuriser. Il doit faire contre poids aux monopoles de la distribution ou de l’agro-industrie. Et cela passe, entre autres, par une représentation plus équilibrée au sein de l’interprofession et dans laquelle les distributeurs ne se poseraient plus en uniques interlocuteurs.
Ce doit être un lieu où l’on discute de volumes et de prix. Et sur ce point, l’Etat a un rôle particulier à jouer : il doit revoir les outils qu’il a mis en place, y compris la fameuse loi de modernisation économique (LME)  qui déséquilibre les rapports entre producteurs, transformateurs et distributeurs. Les pouvoirs publics doivent prendre leur responsabilité, ils ne peuvent pas d’un côté appeler de leurs vœux davantage de régulation et d’équité, et de l’autre ne pas se donner les moyens de les mettre en œuvre.
J.C : Etant l’arbitre de toutes les décisions, il incombe au Chef de l’Etat, Nicolas Sarkozy de s’engager rapidement sur un train de mesures visant à alléger les charges des agriculteurs français pour les mettre à égalité dans la compétition économique européenne et mondiale. En l’interpellant aussi directement, nous souhaitons le mettre face à ses responsabilités. D’autant que le Président de la République, s’est engagé à plusieurs reprises, sur le principe de régulation, et de rémunération juste des producteurs. Force est de constater que les mois passent et que nous ne voyons rien venir. En attendant c’est la situation de la Ferme France et de ses hommes, qui se dégrade de jour en jour. Le temps nous est compté avant les débats sur la loi de modernisation, qui sera discutée avant le printemps 2010. Le Chef de l’Etat doit être porteur d’un message d’avenir pour notre agriculture.

En manifestant le 16 octobre, est-ce un SOS que vous lancez aux pouvoirs publics pour leur faire prendre la mesure de l’enjeu agricole (souveraineté alimentaire, poids économique, emploi, diversité des produits, aménagements du territoire…) ?
J.C. : L’agriculture est un secteur hautement stratégique qui pèse autant dans l’économie que le secteur de l’automobile ou le secteur bancaire, il faudra bien que nos décideurs en aient conscience, une fois pour toute. Dans des régions rurales comme la nôtre, l’avenir économique passe forcément par l’agriculture. Les agriculteurs produisent de la richesse économique, contribuent à l’ouverture des paysages et portent la dynamique des territoires. Si l’objectif du gouvernement est de maintenir l’agriculture sur l’ensemble des territoires, y compris sur ceux qui, comme le Massif central, ont structurellement un handicap, il est clair que cela ne pourra pas se faire sans moyens.
M.Q : Nous devons mettre les pouvoirs politiques en face de leurs responsabilités pour que cesse le double discours. Celui qui compatit quand il est sur le terrain mais qui ne fait rien contre, ou pire, qui nous conduit vers l’ultra-libéralisation des productions agricoles. S’ils continuent dans cette direction, à l’opposé de la souveraineté alimentaire de l’Europe, qui devrait être le premier objectif, le monde paysan et l’économie rurale qu’il génère disparaîtront.
Ensemble, sachons nous mobiliser intelligemment pour que les pouvoirs publics agissent.

Appel à mobilisation :

"Sarkozy, notre agriculture a un prix"

Opération de bâchage des bâtiments publics en Eure et Loir, Vendée, Gers, Maine et Loire, blocages d’axes routiers en Saône et Loire, Sarthe, Côte d’Or, sensibilisation des élus locaux dans l’Yonne, en Bretagne, Dordogne, pétition à faire signer par les citoyens en Vendée, construction du mur de l’indifférence dans le Limousin et en Aveyron, défilés en tracteurs comme à Strasbourg ou dans la Nièvre… les idées ne manquent pas pour mettre en place des actions syndicales d’envergure dans les capitales régionales ou départementales. À l’appel de la FNSEA et des JA, la grande journée de mobilisation du 16 octobre se décline sous diverses formes, avec pour seul objectif de sensibiliser, mieux de sommer le Gouvernement de réagir enfin à la hauteur du désarroi des agriculteurs.
La région Auvergne a choisi une action sur les routes, avec des convois de tracteurs venant des 4 départements pour se rejoindre à Clermont Ferrand. La FRSEA et les JA Massif attendent une participation de masse, telle que celle du 16 septembre 2008.
La crise actuelle est la plus grave que le secteur agricole ait connu ces trentes dernières années, toutes productions confondues. Volatilité des prix, libéralisme bruxellois, contraintes environnementales, financières, etc… «Il faut arrêter de charger la barque» dit la FNSEA. Alors parce que l’agriculture a un prix, les agriculteurs vont descendre dans la rue pour demander haut et fort de pouvoir vivre de leur métier. Ils seront à Clermont et dans toutes les capitales régionales le 16 octobre prochain.

Suzanne Marion

Revendications de la FNSEA et des JA

Pour aider les agriculteurs à faire face à la crise actuelle, la FNSEA et les JA revendiquent des mesures à court terme et un projet pour l’avenir.
À court terme, ils demandent :
. une année blanche,
prise en charge des intérêts d’emprunts
éxonération des charges sociales
report des annuités en fin de tableau
remboursement TFNB (taxe foncière non bâtie)
. une exonération de la taxe carbone en agriculture,
. une réduction du coût du travail pour faire face aux distorsions sociales,
. le remboursement de la TIPP (carburant) et de la TICGN (gaz naturel),
. de faire sanctionner les comportements abusifs dans les pratiques commerciales,
. d’arrêter les contraintes franco-françaises (assouplissement des contrôles dans le cadre de la conditionnalité notamment les BCAE),
. de tenir les engagements sur les retraites.
Pour l’avenir, la FNSEA et les JA attendent un véritable projet pour l’agriculture. Pour cela, il faut :
. remettre la régulation au cœur de la PAC,
. lutter contre les distorsions de concurrence sur les moyens de production,
. au niveau national, des outils pour gérer les risques en agriculture : DPA, assurances, organisation des filières…
. trouver une place conséquente pour l’agriculture dans le grand emprunt.
«C’est de régulation, de lisibilité et d’investissements porteurs d’avenir dont nous avons besoin» insistent la FNSEA et les JA.

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