Mercosur, ICHN, retraites... l'incertitude plane sur les dossiers agricoles
Vendredi dernier, une nouvelle session s’est déroulée sous la présidence de Patrick Escure, lors de laquelle l’actualité agricole était débattue, en présence du préfet et du DDT.
Trois motions, trois votes unanimes. La première contre les négociations en cours avec le Mercosur et en faveur des conclusions des États généraux de l’alimentation ; la deuxième sur la répartition de l’enveloppe ICHN et contre son possible écrêtement ; la troisième sur le montant minimum des retraites agricoles. Présentées par la FDSEA lors de la dernière session de la Chambre d’agriculture, vendredi 9 mars, celles-ci traduisent bien les inquiétudes du monde agricole dans un contexte politique jugé flou, en raison de ce que les élus consulaires considèrent comme un double langage de la part du gouvernement. Invitée, le préfet du Cantal a eu du mal à convaincre que rien n’était encore joué, invitant à la patience tant que rien n’était acté.
Mercosur, négociations hasardeuses
Avant que s’ouvrent les débats, Patrick Chazal, responsable du pôle développement économique, avait livré quelques éléments de conjonctures. Parmi ceux-ci, une balance commerciale proche de zéro. “Notre solde sera encore plus affaibli dans la vision libérale de libre échange qui se profile avec un volet agricole carrément en danger”, commente Joël Piganiol, président de la FDSEA du Cantal. “D’autant que les entreprises ne veulent pas aller sur les marchés extérieurs alors que, pendant ce temps-là, l’Italie avance avec nos broutards achetés au rabais”, ajoute Jean Tissandier, en se posant la question sur l’opportunité que la profession crée sa propre plate-forme d’export. Gilles Amat prend exemple, quant à lui, sur le positionnement américain : “Dans un jeu de dupes, eux, ils intensifient le protectionnisme avant de renégocier.” Il constate aussi que les USA, comme la Chine, “ont des politiques commerciales d’export et, parallèlement, freinent l’accès à leurs marchés intérieurs”, avant d’illustrer son discours par l’exemple du roquefort qui fut taxé jusqu’à 300 %. “Et pendant ce temps-là, l’Union européenne prône le libre échange et la répartition des richesses... Mais pour qui ?” À la tribune, le président du Conseil départemental (1) s’en émeut, considérant que lorsque le secteur agricole est frappé, c’est tout le monde rural qui est en danger. À l’heure de conclure sur le sujet, le préfet Sima explique que les discussions sont difficiles et que, si elles sont longues, “c’est précisément parce que vos remarques sont prises en compte”. Sans doute aussi en raison des élections présidentielles du Brésil qui se profilent...
Au milieu du gué
“L’ICHN(2) devait être consolidée. Mais après avoir suscité l’espoir en précisant que le montant de l’aide des bénéficiaires ne subira pas d’écrêtement, voilà qu’il est question d’écrêter pour financer les zones nouvellement entrées”, s’inquiète Joël Piganiol, en ouvrant un autre dossier d’actualité. Sur cette “réforme des zones défavorisées, le Cantal n’est pas impacté”, estime le préfet, qui prend acte d’une vigilance sur les conséquences financières éventuelles, “et j’insiste bien sur le terme éventuelles”, appuie-t-elle, en confiant être sûre qu’il n’y en aura pas. En revanche, Gilles Amat met le doigt sur un sujet dont les conséquences sont déjà mesurables : le soutien à l’agriculture biologique. “Là encore, les États généraux de l’alimentation promettaient une nouvelle rémunération pour ceux qui s’y sont engagés ; or, les aides au maintien sont supprimées, les négociations sur les prix toujours en cours... Il n’y a donc ni les aides, ni les prix !” Et Gilles Amat d’avouer son incompréhension : “Afficher une volonté politique et laisser les producteurs au milieu du gué”... “On veut plus de bio, mais on recule”, constate à son tour Patrick Escure. En outre, le président de la Chambre d’agriculture s’inquiète de “lois repoussées”, de discussions avec le Mercosur et “des substances interdites chez nous qui seront importées”, d’un Cantal entièrement éligible à l’ICHN (et d’une région à 70 %) qui “aurait à faire les frais des choix du gouvernement”... Faisant le lien sur l’ensemble des sujets débattus, il a une formule sur laquelle il insiste : “Sur un panier alimentaire de 100 euros, seulement 6 ou 7 euros reviennent à un agriculteur.” Quant à ceux qui ont fait valoir leurs droits à la retraite, ils doivent encore une nouvelle fois se battre pour une revalorisation de leurs pensions. La dernière session a rappelé que l’idée de passer de 70 à 85 % du Smic avait été actée par l’Assemblée nationale avant d’être suspendue par le Sénat. “Une procédure rare”, s’étonne encore le député Descœur, qui croit savoir que le sujet ne sera pas redébattu avant 2020, année d’un vaste débat sur l’ensemble des retraites... En attendant, ils risquent de travailler plus longtemps, au détriment de l’installation.
(1) Plusieurs fois invité en tant que directeur du Groupe salers évolution, Bruno Faure assistait pour la première fois à une session en qualité de président du Conseil départemental.
(2) Indemnité compensatrice de handicap naturel dont 100 % du Cantal bénéficie.