« L'UE se détourne de sa priorité principale et historique : la PAC »
Une délégation de Haute-Loire participera à la mobilisation des agriculteurs européens le 18 décembre à Bruxelles. Explications de Nicolas Merle, président de la FDSEA Haute-Loire.
Une délégation de Haute-Loire participera à la mobilisation des agriculteurs européens le 18 décembre à Bruxelles. Explications de Nicolas Merle, président de la FDSEA Haute-Loire.
Le réseau FNSEA-JA appelle à une mobilisation syndicale européenne massive pour le 18 décembre à Bruxelles. La prochaine réforme de la PAC 2028-2034 se trouve au cœur de cette future action. Pouvez-vous nous en expliquer les raisons ?
Nicolas Merle : La Commission européenne a proposé un budget global de la PAC à la baisse (à hauteur de -20%). Cette diminution est énorme sachant que le budget de la PAC ne suit pas l'inflation depuis des années... Ainsi depuis le début de la précédente PAC, l'inflation a quasiment atteint plus de 10% ; nos charges d'exploitation ont suivi cette inflation et dans le même temps le budget PAC n'a pas augmenté. Au total, on peut dire que nous avons perdu 10% en lien avec l'inflation auxquels il faut ajouter ces 20% de proposition de réduction de budget de la commission. C'est pour cette raison que nous appelons les agriculteurs à se rendre à Bruxelles le 18 décembre. Il s'agit de demander a minima un budget constant pour la PAC et éventuellement de l'augmenter.
Nous serons là également pour défendre la souveraineté alimentaire européenne car si on veut encore des agriculteurs et nourrir la population à des prix convenables, nous avons besoin d'une politique européenne et cohérente dans l'ensemble des pays.
Avec 2 000 milliards d'euros, le prochain budget de l'UE (2028-2034)est pourtant le plus important jamais présenté à ce jour...
Nicolas Merle : Il faut rappeller que l'UE s'est construite autour de la PAC. Or, l'UE se détourne de sa priorité principale et historique.
La part de la PAC dans le budget de l’UE a diminué au cours des 40 dernières années, passant de 73,2 % en 1980 à environ 24,6 % en 2023 (source : https://agriculture.ec.europa.eu). Alors que l'UE travaille sur un accord de libre-échange avec les pays du Mercosur, on peut se demander si on veut réellement des agriculteurs et de la production agricole demain sur notre territoire européen !
Le Mercosur fera d'ailleurs partie des sujets qui seront abordés à Bruxelles. Nous comptions sensibiliser le président Macron sur ce point le 2 décembre à clermont-Fd, mais ce dernier a annulé son déplacement ; nous nous mobiliserons à nouveau dès que le chef de l'État reprogrammera sa visite.
Lire aussi : Mercosur : les agriculteurs manifesteront à Bruxelles le 18 décembre
Est-ce que d’autres points de cette réforme vous inquiètent ?
Nicolas Merle : La commission propose également d'oublier le modèle historique sur lequel était construite la PAC pour partir sur un montant global d'aides à attribuer aux agriculteurs en offrant aux États membres une plus grande marge de manœuvre dans la répartition des fonds ; en clair, les États auront davantage de liberté dans la gestion du cofinancement et du financement de certaines actions et aides. Or, dans un pays comme le nôtre, en difficultés financières, l'agriculture pourrait perdre des aides, ce qui signifie un revenu inférieur pour les agriculteurs et des prix moins cohérents pour le consommateur. La PAC a toujours fonctionné avec des cofinancements mais le problème c'est que cette réforme prévoit une plus grande liberté des États et nous redoutons que cela pénalise l'agriculture.
Nous serons également là pour défendre l'ICHN et surtout faire en sorte que cette indemnité compensatoire reste bien ciblée sur l'élevage et les zones de montagne.
La position de la France est-elle partagée par d'autres États en Europe ?
Nicolas Merle : On sent cette même inquiétude chez certains pays qui se rallient à notre cause et qui seront présents le 18 décembre à Bruxelles ; c'est notamment le cas de l'Italie, de la Belgique et des pays d'Europe de l'Est. L'Allemagne semble un peu moins concernée, certainement en raison de sa meilleure situation économique.
Une délégation de Haute-Loire sera-t-elle présente en Belgique le 18 décembre ?
Nicolas Merle : Pour des agriculteurs de Haute-Loire, cela reste assez difficile de rejoindre ce pays en raison de l'éloignement, mais nous nous sommes organisés pour faire le déplacement en train et ainsi prévoir un trajet sur la journée. Une dizaine d'élus et d'agriculteurs du département devraient composer cette délégation.
Pour participer à cette mobilisation, contactez la FDSEA au 04 71 02 60 44.