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Loup : un tir de prélèvement accordé en Lozère et Haute-Loire

Après des mois de lobbying et de pression intense de la part des acteurs agricoles, tant en Lozère que dans le Cantal ou en Haute-Loire, les agriculteurs lozériens viennent d'obtenir « un premier pas » pour « se défendre contre le loup qui attaque les troupeaux ».

© MG

Un tir de prélèvement a été accordé sur deux communes en Lozère et une en Haute-Loire, en Margeride, fortement touchée par les attaques de loups cet été. Un tout petit territoire au vu de l'ampleur des attaques qui ont touché tout le massif de la Margeride (Cantal, Haute-Loire, Lozère), mais qui soulage un peu les agriculteurs.
« Ce tir de prélèvement est le résultat d'un gros travail entre les jeunes agriculteurs, la FDSEA, la chambre d'agriculture et le préfet », ont souligné les syndicats agricoles dans un communiqué qui se félicite de ce premier pas, tout en restant prudent sur la suite des événements. Pour le préfet Philippe Castanet, « ce tir de prélèvement n'est qu'un outil dans la boîte à outil des éleveurs » pour se protéger du loup.
Et pour qu'un tir de prélèvement soit autorisé, les agriculteurs doivent montrer patte blanche en prouvant qu'ils « ont utilisés tous les moyens de protection mis à leur disposition » : clôtures, chiens de protection (majoritairement des patous), bergers, etc. Des moyens de protection financés à 80 % par l'État, dans l'objectif de « favoriser la cohabitation entre le loup et les activités pastorales ». Puis, si cela ne suffit pas et que le loup attaque les troupeaux, des autorisations de tirs à différents niveaux sont accordés par les préfectures départementales (tir de défense simple, renforcé, territorial) avant d'arriver au tir de prélèvement, en dernier recours. Considéré comme une dérogation, le tir de prélèvement a été accordé par le préfet Célet, désigné référent loup, et préfet d'Auvergne-Rhône-Alpes. Le tout encadré par le plan loup 2018-2023.
Pour en arriver là, plusieurs manifestations et un intense lobbying des chambres d'agriculture et des syndicats agricoles aura été nécessaire durant l'été 2022. Avec deux points culminants : la manifestation à Mende, le lundi 26 septembre, et le rassemblement au mont Mouchet le vendredi 30 septembre. Puis une nouvelle réunion de terrain avec le préfet Celet, préfet référent loup lundi 17 octobre, réunion qui a permis aux éleveurs d'exprimer leur ras-le-bol, sans qu'aucune décision significative ne semble être prise ce jour-là.

Une « cohabitation » impossible ?
« Effroyable », « Un carnage », « horrible », « M'installer ? Dans ce contexte ? Je sais pas si c'est possible »... Les descriptions faites par les agriculteurs décrivant l'horreur de trouver leurs bêtes éventrées au matin, contient toute leur rage et leur désespoir face à une situation qu'ils ne maîtrisent pas. En cette année funeste 2022, l'aiguille du comptage macabre s'est arrêté en octobre, à près de 70 attaques en Lozère (mais cela ne dit rien du nombre de brebis tuées ou blessées) recensées. Cependant, rien ne dit que d'autres attaques n'arriveront pas dans les prochaines semaines, puisque les troupeaux, profitant d'une chaleur inhabituelle en cette fin d'automne, sont encore dehors. Un décompte qui s'approche de l'annus horribilis 2015, où près de 100 attaques avaient été dénombrées sur l'année.
Une année qui avait marqué les esprits par l'ampleur des attaques. Et les agriculteurs ne sont pas prêts à revivre ça. Dès 2018, ils avaient haussé le ton, en organisant une manifestation inter-syndicale dans Mende. Puis chaque année depuis, ils ont averti les pouvoirs publics que la situation devient intenable.
Objet de légende et de mythe, le loup fascine autant qu'il fait peur. Présent dans de nombreux départements dans l'hexagone, le loup fait un retour remarqué sur le devant de la scène. Mais qu'en est-il vraiment de ce prédateur, objet de toutes les crispations ?
Dans le département où l'agriculture pèse pour 13 % de l'économie locale, le message est clair : le loup n'est pas le bienvenu aux yeux des agriculteurs. En tout cas, « ces loups délinquants qui s'attaquent aux troupeaux de brebis », détaille Jean-François Maurin, président de la FDSEA. Et ceux qui restent dans les forêts ?

Une stricte réglementation
Le loup étant une espèce protégée par la convention de Berne, il n'est pas question de le chasser à vue, ou sans un strict encadrement.
En Lozère, la présence du loup a, pour la première fois, été détectée dans les années 1990. Traversant la frontière italienne, puis l'arc alpin, il a tranquillement étendu son territoire, franchissant les massifs pour venir goûter à un nouveau terrain de jeu : le massif central. Accidenté, escarpé, et de denses forêts pour se cacher : le Massif central correspond bien à cet animal intelligent et opportuniste, qui peut parcourir de grandes distances en une journée. Selon l'OFB, la population du loup gris en France est estimée entre 821 et 1 016 individus à la sortie de l'hiver 2021-2022. Une population en augmentation depuis dix ans et qui a dépassé le seuil de viabilité estimé pour la perpétuation de la race, qui a été fixée à 500 individus.
En Lozère, selon les derniers chiffres fournis par l'OFB, on dénombre une meute installée sur le mont Lozère, et des individus épars. Et c'est là que le bât blesse : ces chiffres. Pour les agriculteurs et leurs représentants agricoles, la « protection de cet animal n'a plus lieu d'être ». Il est temps, selon la terminologie officielle, « d'éliminer » des loups. Un quota de bêtes à abattre est fixé, chaque année, par le Gouvernement (entre 17 à 19 %).
Encore faut-il pouvoir les avoir dans sa ligne de mire... Un exercice que la brigade loup, appelée en renfort cette été en Lozère, et pourtant spécialiste de la bête, n'a pas réussi à mener à bien malgré ses quatre semaines d'intervention. Habitués de l'arc alpin, ils ont décrit « un terrain morcelé, avec peu de visibilité », et qui rend plus difficile les opérations. L'an dernier, déjà, ils étaient venus en Lozère. En 2016 et 2018, aussi. Sans jamais réussir à prélever un loup. « C'est insensé, ça fait dix ans qu'on a des attaques et aucun loup n'a jamais été tué. Il est temps de le faire ! » assène Jean-François Maurin. Les syndicats agricoles, très actifs sur le sujet, ont prévenu : « les agriculteurs sont au bord du désespoir ». En 2022, la sécheresse estivale n'a pas arrangé le moral, déjà dans les chaussettes en prévision des attaques, car les récoltes ont été de mauvaises à très mauvaises. « Si on ne veut plus d'élevage dans nos territoires, mais qu'on nous le dise », s'est agacé pour sa part Hervé Boudon, président des JA. Ce qui serait une aberration, pour lui comme pour ses homologues. « S'il n'y a plus d'agriculteurs, avertit pour sa part la présidente de la chambre d'agriculture, la Lozère va s'embroussailler. Nos paysages perdre de leur valeur. Et les touristes partir ailleurs. Que veut-on vraiment ? Sauver le pastoralisme ? Où protéger le loup à tout prix ? »
La situation, d'intolérable, est passée à intenable. Et qui s'envenime autant dans le département qu'à l'échelle nationale : à la fin de semaine dernière, des journalistes de France 3 ont été pris à partie par des agriculteurs en colère dans le Doubs, alors qu'une opération de tir avait été perturbée par des militants écologistes. Ce samedi 22 octobre, le ministre de l'agriculture Marc Fesneau, en visite dans ce même département à Pontarlier, a tenu à apporter son soutien aux agriculteurs touchés par ces attaques. Et a promis une « évolution des arrêtés nationaux dès la saison 2023 pour baisser la pression de ce prédateur qui vient percuter l'activité agricole », et que des discussions aient aussi lieu au niveau européen.

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