Loi Notre : “un sursis institutionnel avant le coup de grâce financier” ?
Le Conseil départemental était réuni pour son débat d’orientation budgétaire 2016, vendredi. Un climat plutôt tendu avec un avenir plus que morose selon le président Descœur.
La loi Notre, relative à la nouvelle organisation territoriale de la République, aura été sur toutes les lèvres vendredi au Conseil départemental à l’occasion du débat d’orientations budgétaires. Dans un contexte encore plus contraint que les années précédentes, Vincent Descœur, président de l’Assemblée départementale, a mis en garde : “On peut légitimement se demander si les Départements, qui ont finalement bénéficié d’un sursis institutionnel dans le cadre de la loi Notre, ne sont pas victimes du coup de grâce financier qui devrait leur être fatal d’ici 2017.” Deux éléments majeurs nourrissent cette réflexion : la “réduction sans précédent de nos ressources” et l’augmentation “du reste à charge pour le Département” pour faire face aux dépenses de solidarité(1).
Stabilité fiscale et poursuite du désendettement
Malgré cet effet ciseau plutôt néfaste, le Département, “grâce aux efforts consentis depuis plusieurs années, pourra rester auprès des territoires et de leurs habitants encore en 2016, précisait Vincent Descœur. Malgré nos efforts, nous sommes encore et toujours dans l’obligation de reconsidérer plusieurs politiques publiques sur les années 2016 et 2017”. Le Département promet toujours la stabilité fiscale et la poursuite de son désendettement, mais en réaménageant son intervention en faveur des jeunes et de leurs familles et en apportant un dernier coup de collier économique à : l’agriculture, le soutien à l’emploi industriel ; le soutien à un projet de développement de la fibre. Cependant, Vincent Descœur va plus loin dans l’analyse. “Il y a des années que nous faisons des choix. Là, il s’agit de dire oui ou non. La loi Notre est une formidable hypocrisie. C’est un abus de confiance par rapport aux élus du territoire. On ne pourra plus faire autant et on doit la vérité à nos concitoyens. La loi Notre ne va pas nous sauver, elle va nous empêcher de faire des choix là où on voudrait les faire.” Des inquiétudes qui ne sont pas le seul fait de la majorité départementale. Josiane Costes (GRD) a rappelé que “le groupe n’a jamais été fan de la loi Notre, qu’il fallait donner des moyens aux Départements. Mais avec le poids des AIS(1) qui augmentent, cela risque d’absorber toutes nos finances et de nous gêner dans l’exercice de nos compétences. Tout cela m’inquiète. Il y a un manque de lisibilité pour avoir des projets car on ne connaît pas les ressources de demain”.
L’effet ciseau dans le viseur des conseillers
Une situation financière fragile également dénoncée par Bernard Delcros et le nouveau groupe Roc. “Depuis très longtemps, on subit des mécanismes qui, à la fois diminuent les recettes, et augmentent les charges. On ne retrouvera jamais plus nos capacités de financement d’il y a 15 ans. Et ce n’est la peine de faire croire que demain nous pourrons intervenir partout. (...) Il faut prendre en compte l’environnement contraint, mais il faudrait déjà compenser les charges.” Une charge quasi en règle de la loi Notre à laquelle s’attendait le député et conseiller départemental Alain Calmette. “Nous sommes dans une situation délicate au niveau des finances publiques avec une économie demandée de 50 milliards d’euros, certains préconisant même 120 voire 150 milliards. La loi Notre, c’est un compromis et je n’en fais pas la panacée non plus. On aurait pu aller encore plus loin.” Sur la situation des Départements, Alain Calmette reconnaissait l’effet ciseau “et il faudra bien trouver des solutions et un secours d’urgence pour les Départements à la peine. Il devient ridicule de demander aux Départements de verser des aides qui ne sont pas entièrement compensées”. Et concernant le Cantal, le député socialiste a aussi donné son avis. “Compte tenu de l’impasse financière, oui il y a des choix à faire. Nous avons une capacité d’autofinancement de 25 M€, dont 15 M€ pour le seul remboursement de la dette, une dette par habitant qui est passée de 1 140 € à 940 €. Mais on paye aujourd’hui l’endettement considérable d’avant.” Il estime qu’il faudra faire “des choix encore plus drastiques”, ou encore revoir certaines priorités comme le plan Cantal 2025 “qui ne prend pas en compte la situation d’aujourd’hui”. Vincent Descœur convenait parfaitement que “devant les perspectives, il est évident que l’on devra faire des choix, que l’on devra arbitrer. Nous associerons bien sûr les commissions dans ce travail, mais la responsabilité collective est indispensable”. Ainsi, le président estime qu’il faut faire valoir demain “que dans les programmes à venir, on s’intéressera aux “périphériques” au-delà de la grande métropole. Aujourd’hui, notre salut est de convaincre la nouvelle Région de nous accompagner. Vu la trajectoire que prennent nos ressources, on ne fera pas le contournement de Saint-Flour sans la grande Région. Il faut aller chercher des concours pour nous permettre de beaux projets”. Convenant que la période était difficile, le président rappelait que d’autres Départements étaient dans une situation plus critique. Neuf d’entre eux n’ont pas été en mesure de payer les AIS en 2015. Ils seront 30 à 35 en 2016, mais pas le Cantal.
(1) Les Allocations individuelles de solidarité comprennent le Revenu de solidarité active (RSA), la Prestation de compensation du handicap (PCH) et l’Allocation personnalisée d’autonomie (Apa).
Plus d'infos à lire cette semaine dans L'Union du Cantal.
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