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Plan de régulation de l'offre en saint-nectaire : « L'objectif n'est pas de créer la pénurie »

Sébastien Ramade, président de l'Interprofession du saint-nectaire évoque les projets de la filière pour envisager l'avenir, entre renouvellement des générations et changement climatique avec notamment la mise en place d'un plan de régulation de l'offre.

Sébastien Ramade, président de l'ISN.
Sébastien Ramade, président de l'ISN.
© ISN

La saison estivale débute. Durant cette période le saint-nectaire connaît un rebond dans ses ventes. Comment l'AOP saint-nectaire l'anticipe-t-elle ?

Sébastien Ramade : Les ventes sont importantes sur fin juillet et le mois d'août. On espère qu'il y aura assez de fromages. Depuis deux ans, la production est en baisse en raison d'une perte de qualité sur les fourrages. On constate aussi des ventes plus poussives du côté fermier. On avait l'impression d'un mieux depuis septembre 2024… On est un peu dans le flou. L'inflation et le contexte général négatif n'encouragent pas les achats. Depuis 2022, le commerce n'est plus comme avant et c'est général à toutes les AOP françaises.

Un projet de plan de régulation de l'offre est d’ailleurs dans les tuyaux ?

S.Ramade : L'AOP doit continuer de vivre et de regarder sur le long terme. Ce plan de régulation de l'offre a pour objectif d’adapter la production de fromages par rapport aux ventes. 

L'idée serait de produire moins l'hiver pour se concentrer davantage sur l'été où les ventes sont plus importantes.

Celles de janvier et février sont insuffisantes par rapport au nombre de fromages produits. Et au mois d'août, on produit généralement beaucoup moins par rapport aux ventes engendrant des ruptures. Pour un producteur, c'est décaler 1 à 2% de sa production de l'hiver sur l'été. Ce sera un très gros effort pour certains mais à l'échelle de l'appellation, c'est faisable.

L'intérêt est d'avoir des fromages de qualité sur les 12 mois de l'année. Quand il y a trop de stocks en cave, la qualité baisse. Cet outil a pour objectif de maintenir de la valeur au sein de l'appellation.

À lire aussi : Il y a 70 ans, comment le saint-nectaire a failli disparaître ?

Quand sera-t-il en place ?

S.Ramade : Il sera voté courant 2026, si le projet est prêt. 

On ne pourra jamais empêcher de produire mais il y aura «surcotisation» à payer pour tout le tonnage dépassé. 

L'objectif est de maintenir la valorisation du produit. C'est un projet à réfléchir collectivement et non individuellement. La surproduction de décembre, janvier et février, si elle continue d'augmenter, tous les producteurs vont en payer le prix même celui qui manque de fromages aujourd'hui. 

L'idée est de mieux répartir les ventes sur le territoire, de mieux coller la production aux ventes. Il y aura bien entendu des mesures spécifiques pour les jeunes notamment. Aujourd'hui, des promotions sont faites par des distributeurs pour vendre le saint-nectaire pendant l'hiver. Demain si nous avons un équilibre production/vente, ces promos n'auront plus lieu d'être. L'objectif n'est pas de créer une pénurie. Nous sommes à 8 500 tonnes, l'objectif est d'augmenter le volume mais au moment où il y a les ventes. Tout le monde est gagnant : on évite les problèmes de qualité, que les affineurs aient les caves pleines et on maintient la valorisation. Le Comté et le Beaufort sont en crise en raison de l'inflation mais avec le plan de régulation, jusqu'à maintenant, ils ont augmenté les volumes chaque année.

À lire aussi :-1,3% des ventes en 2023 pour le saint-nectaire

Comment la filière anticipe son adaptation au changement climatique  ? 

S.Ramade : Dans un premier temps, on veut renforcer le pâturage des vaches. Aujourd'hui, il est à 160 jours mais il faut aller plus loin tout en prenant en compte les successions des sécheresses. L'idée est de vérifier que les structures d'exploitations sont bien adaptées au pâturage. Aujourd'hui, tout le monde respecte ces 160 jours de pâturage mais demain ? Peut-être que nous ne pourrons plus pâturer en juillet et août ? Doit-on changer les dates de pâturage ? Autoriser l'affouragement ? Avant, nous n'avions pas ces situations. Ne pas pouvoir pâturer l'été, c'est nouveau; comme lâcher les vaches avec un mois d'avance. 

On travaille avec Vetagro Sup et les Chambres d'agriculture pour s'adapter. Quand on change un cahier des charges, c'est 5 à 6 années de travail. Si aujourd'hui on se met d'accord, le nouveau cahier des charges ne sera valide que d'ici 2028.

Nous avons une commission interne à l'AOP qui est en train de réfléchir à toutes ces questions. Le cahier des charges doit retranscrire ce que l'on fait et montrer que les fermes s'adaptent à leur milieu et non l'inverse.

Et sur le front du renouvellement des générations ?

S.Ramade : Si demain on veut du fromage, il faut des bras ! Même si la robotisation peut permettre de faciliter certaines choses, elle ne fera pas tout. L'Homme reste au cœur du projet.

L'ISN travaille sur cette question depuis 2017. 

Vivre de son métier est important mais si c'est pour travailler 7jr/7, il n'intéresse personne. 

Nous avons la valorisation en saint-nectaire mais avoir un peu de temps libre, c’est bien… 

La passion du métier ne suffit plus à renouveler les générations. 

Le salariat est important puisqu'il peut permettre de combler le besoin de main-d’œuvre sur les fermes et aussi, pourquoi pas, devenir chef d'exploitation.

L'AOP saint-nectaire compte 203 fermes en fromage fermier et 190 productions laitières ce qui représente à peu près 800 chefs d'exploitations.

La production fermière est stable. La production laitière est en baisse suite à des difficultés de valorisation durant plusieurs années. Les jeunes installés se sont réorientés sur le fermier, compensant les départs. C'est pourquoi, nous avons cette stabilité sur les exploitations fermières et pas sur le laitier.

Nous espérons cependant une stabilisation grâce à une valorisation plutôt correcte du lait, avec la connexion du lait spot au lait AOP.

 

 

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