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Lieutadès met les gaz sur la méthanisation collective

La petite commune du Caldaguès est la première de France à se lancer dans un projet de méthanisation porté par la mairie avec des retombées multiples.

Près du bourg de Lieutadès devrait d’ici un an être implantée une unité de méthanisation collective qui permettra d’alimenter un réseau de chaleur.
Près du bourg de Lieutadès devrait d’ici un an être implantée une unité de méthanisation collective qui permettra d’alimenter un réseau de chaleur.
© PO

C’est un paisible petit bourg du Caldaguès, frontalier du voisin aveyronnais avec lequel il partage le même moteur économi- que : l’agriculture et l’élevage bovins en particulier. On est bien loin ici de tout pôle de compétitivité et a fortiori des circuits classiques de recherche-développement. Et pourtant... La commune de Lieutadès est en passe de démontrer que ruralité rime aussi avec innovation et que la matière grise n’est pas l’apanage de cols blancs franciliens ou des grandes métropoles très en vogue. Si les habitants de la commune tirent leur surnom (les Capujadous) du couteau avec lequel ils taillaient jadis le bois des chevilles fixant les lauzes sur les toits, c’est vers une autre ressource que la municipalité se tourne aujourd’hui : l’énergie issue de la méthanisation. Ainsi, d’ici fin 2014, une unité de méthanisation collective devrait être implantée tout près du bourg pour éviter toute déperdition de chaleur avec un futur réseau de chaleur communal. “C’est un projet unique en France dans le sens où il est porté par une collectivité”, souligne Damien Puech, technicien à l’espace Infos énergie biomasse (Bois énergie 15) qui a accompagné le conseil municipal dans ses démarches depuis bientôt trois ans.

Des emplois à la clé

La municipalité envisage alors un réseau de chaleur pour couvrir les besoins du bourg(1) via une chaudière fioul. Au gré des estimations et comparaisons avec d’autres pistes, celle de la méthanisation s’impose comme une option intéressante, qui pourrait parallèlement répondre à la sollicitation de Christian Lauraire, conseiller municipal de Lieutadès et éleveur de vaches allaitantes, qui, faute de disposer de suffisamment d’effluents pour un méthaniseur à la ferme, a fait part de son projet en conseil. L’adhésion des élus est d’office unanime avec un prérequis : que le projet serve l’économie agricole en valorisant les effluents d’élevage. Et une autre ambition : créer de l’emploi communal. Débute alors un long parcours : recherche d’un bureau d’études pour la réalisation de l’étude de faisabilité, visites d’unités collectives et individuelles en fonctionnement (en Lozère, Haute-Loire...). Sans surprise, l’étude de gisement du bureau d’études (Méthaneva, basé à Labège) conclut à d’importants volumes de fumier sur le secteur avec une quinzaine d’agriculteurs intéressés pour alimenter les digesteurs. Avec un bémol non négligeable : l’intermittence des apports et une basse saison estivale au cours de laquelle la commune souhaite continuer à alimenter le réseau d’eau chaude du bourg. Le portage collectif confirme de fait tout son intérêt : “Mais d’entrée, nous nous sommes refusés à recourir à des boues d’épuration ou des déchets d’abattoirs, précise le maire, Robert Boudon. Nous allons nous tourner vers des déchets verts, des fauches de route, des coupes de tontes, mais aussi des fruits et légumes issus des grandes surfaces, des silos déclassés, de l’enrubannage souillé...” La technique de la voie sèche est retenue à l’issue des différentes visites pour des questions de logistique et du fait de la taille modeste des parcelles des exploitations de la région. Parallèlement, la commune planche sur le montage financier(2) et sollicite des aides de l’Ademe et du Feader (UE), qui mettront du temps à être instruites mais acquises à ce jour, ainsi que celle de la Région Auvergne (à l’étude). Le reste sera financé par un recours à l’emprunt avec un temps de retour brut sur investissement évalué à neuf ans. Suite à l’officialisation de ces deux premiers soutiens, la municipalité a pu lancer début novembre un appel d’offres de concession-réalisation. Une formule plus sécurisante pour la collectivité, avec la désignation d’un maître d’œuvre unique pour gérer les différents chantiers de cette unité relevant du régime des installations classées mais soumise à seule déclaration.

Économies pour les usagers et les éleveurs

L’ouverture des plis est fixée au 6 janvier. Il faudra ensuite cavaler compte tenu des délais imposés par les aides européennes : fin 2014, le chantier doit être achevé... “C’est un peu le calme avant la tempête, glisse Damien Puech. Tout ça prend du temps, surtout dans les derniers mètres, ceux de la réalisation. Ce sont des dossiers compliqués, encore plus ici pour un projet aussi novateur.” Complexité et délais d’attente des subventions qui expliquent aussi que la mairie n’ait pu communiquer précisément plus en amont, au-delà des réunions avec les éleveurs et futurs abonnés du réseau chaleur. Un projet novateur dont les retombées seront collectives : une économie sur la facture de chauffage des abonnés au réseau de chaleur est estimée à 30 %, “sans compter qu’il n’y aura plus d’entretien de chaudière, ni de ballons d’eau chaude” explique Robert Boudon. Deux emplois communaux devraient aussi voir le jour pour assurer le fonctionnement de l’unité et son entretien. Côté agricole, les éleveurs apporteurs bénéficient d’une aide de compensation financière à l’épandage de 4,50 euros la tonne de fumier et pourront disposer, au prorata de leurs apports, du digestat à forte valeur fertilisante (notamment en phosphore et potasse) et sans odeur. “Et puis on participe aussi à la réduction des émissions de gaz à effet de serre”, fait valoir l’édile.

 

(1) Estimés à 564 MWh pour 29 habitants permanents, les bâtiments publics et commerciaux. (2) L’appel d’offres n’étant pas encore clos, il n’est pas possible de communiquer à ce stade sur le coût du projet.

 

 

Plus d'infos à lire cette semaine dans L'Union du Cantal.

Droits de reproduction et de diffusion réservés.

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