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Les irrigants préfèrent la pédagogie

Souvent décriée, l’irrigation est indispensable pour assurer la souveraineté alimentaire du pays. Pour démystifier cette pratique, Irrigants de France a convié la presse en Charente le 9 juillet sur les exploitations de Guillaume Chamouleau et Christian Daniau.

Réserve d'eau en Charente.
Réserve d'eau en Charente.
© Pascale Dumont

Aujourd’hui en France seul ¼ des cultures de maïs est irrigué. Pourtant, la plante aux nombreuses utilisations, parfois méconnues (peinture, produits cosmétiques, …) est régulièrement la cible d’attaques concernant son besoin en eau. Entre contrevérités et questionnements sociétaux, Irrigants de France a choisi la démonstration par l’exemple en conviant la presse sur deux exploitations charentaises.
« L’agriculture est en première ligne du changement climatique et l'eau tient un rôle majeur, explique Éric Frétillère, président d’Irrigants de France. Quels que soient les modèles agricoles, on remarque qu'il y a désormais plus d'eau en hiver et moins en été. Si nous voulons préserver notre alimentation, il faut s'atteler à cette problématique ». En Charente, cela fait longtemps que les réflexions ont abouti. Ainsi, la réserve partagée par Guillaume Chamouleau et deux autres agriculteurs existe depuis 25 ans. D’une capacité de 207 000 m³, le projet visait alors à limiter les prélèvements sur la rivière, trop importants et à stocker 60 % de leurs besoins en eau. Et ça marche. « Nous ne prélevons plus sur le cours d’eau et durant l’été 2022, nous n'avons pas eu à souffrir de restriction, explique l'agriculteur. Nous prélevons entre la mi-octobre et la mi-avril quand il y a le plus d'eau. Cela correspond à 3 % du débit de la rivière à ce moment-là. Notre impact est totalement maîtrisé ». Sur son exploitation de 200 hectares environ, Guillaume cultive du blé tendre, du maïs Waxy, du colza, de l'orge fourragère, des pois protéagineux… Les 45 hectares irrigués assurent 40 % du chiffre d'affaires de l'exploitation. Le céréalier pratique par ailleurs l'agriculture de conservation des sols pour accentuer son rôle d’éponge, sème des couverts végétaux et ces cultures captent plus de 1 800 tonnes de CO2 par an. Bref, il agit pour l'environnement. « Quoi que l'on fasse il y a forcément un impact mais il faut aussi regarder ce qui est créé, rappelle Guillaume, dont l'exploitation nourrit plus de 3 000 personnes par an. L'eau est indispensable aux plantes. Les plantes jouent aussi un rôle de climatisation, or sans eau, pas de photosynthèse ». L'accès à l'eau est aussi un gage de transmissibilité de l'exploitation.

Des projets de plus en plus complexes

Ce que Guillaume regrette aujourd'hui c'est la complexification des dossiers de projets et leurs coûts. « On peut aussi s'interroger sur les études d'impact, renchérit Éric Frétillère. Jusqu'où faut-il aller? Aujourd'hui, on demande à un juge de devenir un expert technique alors que son rôle est de vérifier la conformité au texte de loi ». Après 25 ans, le coût de la réserve de Cellefrouin est amorti et de nouveaux projets peuvent être envisagés. Un projet d'installation d'ombrières photovoltaïques est à l'étude. « Cela pourrait être pertinent : l'eau rafraîchit les panneaux qui sont ainsi plus efficaces. Les panneaux limitent l'évaporation et le réchauffement de l'eau », conclut Guillaume. À Saint-Cyr-sur-Bonnieure, sur l'exploitation de Christian Daniau, les cultures sont aussi très diversifiées. « Nous cultivons du maïs, du colza mais nous faisons également beaucoup d'expérimentations, indique le céréalier. L'irrigation nous permet d'assurer la levée des semis. Cette année pour la seconde fois nous avons semé des cacahuètes. Nous testons différents itinéraires techniques pour voir l'impact de l'arrêt précoce de l'irrigation ».
Pour les trois producteurs le constat est clair, le stockage fait partie des solutions mais ce n'est pas le seul. Il y a d'autres enjeux comme le recyclage des eaux usées. Les récents événements politiques causent aussi de grandes incertitudes. « Le projet de loi agricole avait avancé et nous souhaitons que les travaux menés soient repris par le futur gouvernement, notamment la qualification d'enjeu d'intérêt général majeur de l'agriculture, précise le président d’Irrigants de France. Nous avons proposé également la création d'un secrétariat général de l'eau transversal sous la tutelle du Premier ministre et qui rassemblerait les ministères de l'Agriculture, de l'Industrie, de la Santé et de l'environnement ». Leur crainte, l'abandon de projets de réserves telles que celle de Sainte-Soline. « Si ces projets ne se font pas, on va directement vers ce qu'on ne veut pas : de très grandes exploitations parce que le rendement ne sera possible qu'à cette condition… » conclut Éric Frétillere appelant à l'écoute réciproque et au compromis.

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