Les éleveurs de volailles se font abatteurs
L'abattoir de volailles Pouzadoux à Monteignet-sur-l'Andelot (Allier) aurait pu rejoindre la longue liste des outils aux portes définitivement closes. Une dizaine d'éleveurs de volailles de l'Allier et du Puy-de-Dôme a pourtant réussi à contrer ce funeste destin et à écrire une nouvelle page.
Dernier abattoir à façon
Réunie au sein de l'Association d'Abattage de Volailles de Fermes d'Auvergne, une poignée d'éleveurs de l'Allier et du Puy-de-Dôme ont réussi le pari fou de reprendre leur abattoir. Sauvé in-extremis d'une fermeture certaine, suite au départ à la retraite de ses gestionnaires, les frères Pouzadoux, l'outil fonctionne depuis août 2017, grâce à la seule volonté des éleveurs. Chaque semaine, ils abattent, découpent et conditionnent eux-mêmes environ 1 000 volailles issues de leurs élevages et de la basse-cour des particuliers. « C'est le dernier abattoir à façon du secteur » explique fièrement Julien Rieuf, président de l'association.
En effet, il n'est pas nécessaire d'avoir un nombre minimal d'animaux à tuer pour prétendre au service. Les éleveurs apportent les volailles qui leur conviennent et/ou dont ils ont besoin. C'est d'ailleurs cette particularité de fonctionnement, existante du temps des Frères Pouzadoux, qui a encouragé les membres de l'association à sauvegarder l'outil. « Nous sommes tous en vente directe. Reprendre l'abattoir était la solution pour ne pas avoir à investir dans des tueries individuelles. Et puis, nous avions envie que notre outil perdure. Il date peut-être des années 1990 mais les machines répondent entièrement aux normes en vigueur. Cela aurait été dommage de tout démonter ! » Depuis, les éleveurs-abatteurs louent les locaux à la famille Pouzadoux.
Trois métiers en un
Bien que cette aventure se déroule aujourd'hui sous les meilleurs auspices, parvenir à instaurer un équilibre et une organisation autour de l'abattoir n'a pas été simple. Les éleveurs ont d'abord dû construire leur association, revoir et acquérir les procédures sanitaires, administratives et de traçabilité et bien sûr, suivre plusieurs jours de formations sur l'abattage et la découpe des volailles. « La mobilisation des éleveurs a été difficile. Du temps des frères Pouzadoux, l'abattage de nos volailles demandait deux heures par semaine. Maintenant, nous sommes à une journée ! Nous prenons le temps de nous en occuper sinon nous ne pourrions pas vendre notre production ! »
Malgré ces difficultés, ils sont parvenus à reprendre l'abattoir « sans débourser un seul euro de leur poche » précise Julien Rieuf. Chaque éleveur paie une cotisation d'entrée dans l'association et le service d'abattage est facturé, comme aux particuliers, à hauteur de 3,70EUR TTC/poulet et pintade et 5,80EUR TTC/canard.
Quant au temps passé lors de la tuerie hebdomadaire du mardi, les éleveurs sont rémunérés comme tout salarié. « Nous pensons que pour faire fonctionner un tel outil, il faut instaurer un cercle vertueux et éviter les conflits d'intérêts. Chaque éleveur met la main à la pâte pour faire fonctionner l'abattoir et il est rémunéré à juste titre. Bien sûr si l'un d'entre nous à un empêchement de dernière minute (malade...) on ne lui jette pas la pierre et on complète son poste. »
Désormais, l'objectif de l'Association d'Abattage de Volailles de Fermes d'Auvergne et de ses adhérents est d'atteindre les 50 000 volailles abattues/an.
Mélodie Comte