Les céréales donnent du grain à moudre
À l’image de 2015, les rendements céréaliers de l’année 2016 sont peu satisfaisants. Le point avec Claude Raynaud et Matthieu Trillon.
La production céréalière fait grise mine en ce début d’année 2017. Cela fait deux années que les résultats agronomiques sont peu satisfaisants. En cause, la météo capricieuse sur laquelle on ne peut pas vraiment agir… « Il faut croiser les doigts pour que dame nature nous aide à avoir des résultats agronomiques plus satisfaisants », optimise Claude Raynaud, responsable de la section grandes cultures de la FNSEA63.
Des rendements en berne
« Les résultats agronomiques sont en dessous des 6 tonnes. Pour que l’année soit bonne il faudrait au minimum 8 tonnes. Les conditions climatiques sont en cause : il y a eu trop d’eau en période cruciale de floraison puis un manque d’ensoleillement», explique Claude Raynaud. Côté prix, le bilan n’est pas plus glorieux car les marchés sont tendus. Avec un tarif moyen de 160 euros la tonne, les prix de vente sont bien en dessous des couts de production. À ce jour, les difficultés que rencontrent les céréaliers sont donc bien réelles. « On parle beaucoup des problèmes d’élevage, mais on a vu par les centres de gestion que beaucoup d’exploitations céréalières ont pioché dans leur trésorerie », s’inquiète Claude Raynaud. Il y a bien eu des plans d’urgence mis en place par le gouvernement, mais il reste difficile de rentrer dans le cadre.
Certains ont tout de même bénéficié d’une remise d’impôt de la taxe foncière sur le non bâti, mais « rapporté à l’hectare, ça ne représente pas grand-chose», souligne Matthieu Trillon, producteur de céréales à Sardon.
Des problématiques différentes de la Beauce
La production végétale a beau être au cœur du métier de céréalier, c’est un monde qui sépare les producteurs de Limagne de ceux de la Beauce. En sus d’un climat continental marqué et d’une nature des sols différente, les structures d’exploitation ne sont pas les mêmes. Si les producteurs de la Beauce ont la chance de travailler sur des dizaines d’hectares d’un seul tenant à proximité de leur domicile, ce n’est pas le cas de ceux de la Limagne qui cultivent sur des exploitations morcelées. D’où
l’idée de mettre en place un réaménagement complet du territoire et un plan d’irrigation d’ici quelques années. Mais pour Claude Raynaud, la principale différence reste le travail en filière. « Ce n’est pas sur le prix que l’on fait la différence mais plus sur la qualité des céréales avec des valeurs protéinées élevées et un produit tracé grâce au travail en filière. Notre politique impose le respect d’un cahier des charges strict pour livrer un produit sain et tracé au consommateur ».
Vers la fin des phytos
Matthieu Trillon « serait prêt à diminuer l’utilisation des phytos et à faire du 100% bio si et seulement si on pouvait utiliser les biotechnologies ». Ce procédé est à ce jour interdit sur la production dans la majeure partie de l’Europe. Au-delà de cette problématique, cette interdiction soulève une certaine contradiction. «C’est un peu comme l’électricité avec le nucléaire, on veut l’arrêter mais on n’apporte pas de solutions concrètes. Personne n’en veut mais il permet de produire de l’électricité pas chère. On produit une matière à moindre cout, mais si on enlève les phytos on aura moins de rendement et les prix vont augmenter ». Le glyphosate est également sur la sellette, mais son interdiction ne coïncide pas avec la politique de simplification et l’agriculture durable. Les producteurs sont incités à moins travailler les sols, s’il est retiré du marché, il faudra éliminer les mauvaises herbes par un travail des champs.
Malgré tout, Matthieu Trillon reste optimiste : «nous attendons beaucoup des élections et nous espérons trouver quelqu’un qui nous comprenne. Il ne faut pas écouter les sirènes qui nous disent de moins produire. L’agriculture n’est pas un loisir, il y a une notion économique et de patrimoine que l’on veut léguer à nos enfants ».