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« Le vrai danger, c’est que les producteurs continuent d’être mal payés ! »

Face à des charges d’exploitation alourdies par les aléas climatiques, Patrick Bénézit réitère l’urgence de prix rémunérateurs et d’une future PAC en faveur des zones de montagne et défavorisées.

Patrick Bénézit : « On ne va pas continuer une politique qui oblige à faire vêler quatre millions de vaches alors que la valorisation n’est pas là ! »
Patrick Bénézit : « On ne va pas continuer une politique qui oblige à faire vêler quatre millions de vaches alors que la valorisation n’est pas là ! »
© PO

Quel est l’état d’esprit des paysans cet automne après une troisième sécheresse consécutive ?
La situation climatique est de nouveau très compliquée impactant notre productivité et nos coûts de production. Dans ce contexte, il est très difficile de faire baisser les charges ; aussi, nos seuls leviers sont et restent la PAC et les prix. On a obtenu que le budget de la prochaine PAC (applicable en 2023, NDLR) soit identique à celle en cours, ce qui n’était pas gagné d’avance. Nous devons maintenant veiller à ce que la répartition de ce budget préserve les territoires difficiles de montagne et les zones défavorisées comme les nôtres. Nous avons aussi demandé à ce que ce budget de la Pac soit accompagné du Plan de relance : dans la version initiale, l’agriculture n’était pas citée. Depuis, le Gouvernement s’est engagé sur 1,2 milliard pour l’agriculture. Ce n’est pas satisfaisant et il faut revoir la copie mais ce budget est là pour accompagner la PAC dans les prochaines semaines.

Le Plan de relance à la rescousse
Sur quel type d’accompagnement, d’investissements, pourra-t-il intervenir ?
On pense surtout à la modernisation des bâtiments d’élevage mais pas que : il y a tout ce qui est adaptation au changement climatique, notamment au travers des retenues d’eau, mais également sursemis des prairies, techniques différentes... On voit bien que les prairies naturelles ne tiennent plus face au changement climatique. À plus court terme, nous avons obtenu une avance des aides PAC au 15 octobre, c’est quelque chose qui est absolument déterminant au vu de la sécheresse et de la faiblesse des prix.

Une grande partie de l’Hexagone a été, cet été, touché par la sécheresse. Le fonds des calamités pourra-t-il prendre le relais ?
Il y a effectivement plein de départements touchés et de demandes d’interventions, dont celle sollicitée dans le Cantal. Nous espérons que l’État sera au rendez-vous pour le département comme il l’a fait les années antérieures. Parallèlement, on demande l’exonération de la TFNB (taxe sur le foncier non bâti) et une enveloppe identique du Conseil régional.

Il se parle d’un fonds climatique au sein de la future PAC, quel en est l’objectif ?
Nous (FNSEA) travaillons, dans le cadre de la prochaine PAC à un fonds mutuel climatique qui pourrait moderniser le fonds calamités actuel, un fonds du type FMSE (fonds national agricole de mutualisation sanitaire et environnemental). Mais pour l’heure, on est obligé de se tourner vers le fonds calamités, qui n’est peut-être pas merveilleux, mais c’est le seul que l’on ait.

Deux ans après la mise en place des EGA (États généraux de l’alimentation), les producteurs peinent à en voir les retombées concrètes. Rien n’a changé ?
Comme nous l’avons toujours dit, on jugera de l’efficacité des EGA quand l’argent sera dans les cours de ferme. Même s’il y a eu quelques points positifs, notamment l’arrêt de la guerre des prix entre enseignes, le compte aujourd’hui n’y est pas. Les EGA, c’est aussi une mécanique qui veut que les OP (organisations de producteurs), les coopératives, aillent chercher la valeur qui a été créée dans le cadre de ces États généraux. En 2019, les consommateurs ont payé entre 1 et 2 % de plus leur alimentation, ce qui représente un milliard d’euros.

Qu’on ne nous fasse pas le coup du pouvoir d’achat !
Et sur 2020 ?
Les chiffres que nous avons montrent qu’on est sur la même tendance. Pire encore, les mesures prises au moment du confinement ont renforcé les parts de marché de la grande distribution au détriment de la restauration et des marchés de plein air qui étaient fermés. De la valeur s’est donc bel et bien créée et qu’on ne nous fasse pas le coup du pouvoir d’achat des consommateurs ! L’alimentation pèse aujourd’hui 13 % du panier des ménages. Et sur ces 13 %, 6 € sur 100 reviennent à l’agriculteur, soit moins de 1 % ! S’il y a un sujet pouvoir d’achat, il n’est pas lié à l’agriculture ! La loi Égalim, c’est aussi la prise en charge des coûts de production.

On en est où ?
Grâce aux EGA, on a arrêté la guerre des prix, il y a eu des avancées, comme sur le prix du lait ou le cours des vaches avec des signaux donnés par certains abatteurs suite à la pression de la FNB ce printemps. C’est un début, des choses évoluent mais ce n’est pas suffisant.

Votre analyse sur la situation du marché des broutards ?
On assiste à une situation complètement surréaliste : les trois principaux groupes à capitaux coopératifs – Deltagro, Bevimac, Eurofeder – se font aujourd’hui la guerre sur le marché du broutard et maltraitent les producteurs en termes de prix au lieu de les défendre et ce alors que les signaux sont au vert. Pire, ils leur mentent sur la réalité du marché ! C’est inadmissible ! Au-delà, on est en droit de se poser la question s’il n’y a pas une entente entre les opérateurs pour nous payer à des tarifs aussi bas... Si rien n’évolue, on sera dans l’obligation de changer les orientations prises sur la PAC : on ne va pas continuer une politique qui oblige à faire vêler quatre millions de vaches alors que la valorisation n’est pas là ! Il faudra réfléchir à une politique publique au service du prix.

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