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Le coût du loup : le vrai prix des mesures de protection

Les acteurs de l’Institut de l'Elevage (Idèle) ont mesuré l’impact de l'arsenal de protection pour se prémunir des attaques de loups sur la ferme ovine du lycée agricole de Carmejane dans les Alpes de Haute-Provence. Prolificité, fertilité sont en recul tandis que temps de travail et charges ont explosé.

Depuis 2015, la ferme ovine du lycée agricole de Carmejane dans les Alpes de Haute-Provence a subi les assauts du loup à plusieurs reprises. Avec une trentaine de meutes recencées, ce département est le plus impacté de France. 

Suite aux premières attaques, différents moyens ont été mis en place de manière graduelle : parcs de regroupement nocturne, gardiennage de jour, recours à huit chiens de protection, simplification de l’allotement et une surveillance et une protection renforcée en prairies avec des visites quotidiennes ou plus, et la pose de filets électrifiés en complément des clôtures et des grillages. Un arsenal de protection qui n’est pas sans conséquence sur les résultats technico-économiques de l’exploitation. Pour évaluer précisément l’impact, l’Idele a mené l’enquête en comparant les résultats techniques de la ferme entre les campagnes 2013-2014 et 2018-2020. Les résultats sont édifiants.

+ 420 heures par an de travail, -5% de fertilité et -20% de prolificité

François Demarquet, directeur de la ferme plante le décor : « La ferme compte un troupeau de 650 brebis allaitantes, 60 ha de surfaces cultivées, 500 ha de parcours boisés de proximité, deux estives collectives de 160 ha. Nous avons trois périodes d’agnelage : deux périodes principales en septembre-octobre et en février- mars, puis une période complémentaire en juin. Les parcours et les estives sont pâturés par des brebis vides ou gestantes. Les lactations et luttes se déroulent sur prairies ou en bergerie ». 

Le coût des mesures de protection sont loin d'être compensées par les mesures du plan loup, sans compter les pertes inhérentes du fait de la prédation. 

D’abord, la mise en place des cinq mesures de protection conduit à 33 779€ de charges supplémentaires pour la ferme, loin d’être compensés intégralement par les mesures du plan loup, puisque le reste à charge est de 12 170€ par an. Ensuite, la fertilité a diminué de 5%, tandis que la prolificité est en recul de 20% entre les deux périodes. Cela représente 76 agneaux de moins sur 350 brebis. Loin d’être anodin… Enfin, le temps de travail du personnel de l’exploitation (hormis celui du berger salarié pendant 5 à 6 mois par an), lié à l’utilisation des parcours et des prairies, aux soins apportés aux chiens de protection (hors temps d’éducation) et à la gestion administrative en lien avec la protection du troupeau a augmenté de 420 heures, passant à 910 heures par an.

La protection devance désormais la performance

« Techniquement, à cause du risque de prédation, les orientations stratégiques de l’exploitation ont dû être revues. Aujourd’hui, les décisions concernant la conduite du troupeau reposent en priorité sur la protection des animaux, puis, dans un second temps, sur la recherche de bon niveau de performances techniques et sur les conditions de travail de l’équipe de la ferme », témoigne François Demarquet. Peut-on extrapoler ces résultats à toutes les fermes soumises à un forte pression de prédation ? Difficile, selon Pierre Guillaume Grisot, de l’Idele qui a mené cette étude : « Cela dépendra du type de conduite retenue. À Carmejane, la baisse de fertilité s’explique en partie par la limitation du nombre de lots au pâturage et le regroupement nocturne. Ailleurs, un autre type de stratégie pourra peut-être ne pas altérer les résultats. Mais une chose est sûre, quel que soit le modèle retenu, la mise en place de mesures de protection génère des coûts supplémentaires pour les exploitations ovines. Par exemple, les éleveurs qui font le choix de garder leurs animaux en bergerie, vont forcément exploser leur coût alimentaire ! ».

Y-a-t-il moins d’attaques de loups ?

Aussi onéreux soit-il, le dispositif de protection a prouvé son efficacité. A Carmejane, tout du moins. « Aujourd’hui, les attaques ont diminué, nous sommes satisfaits des mesures prises. Sur les parcours et dans les sous-bois, le recours aux bergers et aux chiens de protection a montré sa pertinence », analyse Pierre-Guillaume Grisot.

En vidéo le témoignage de Julien, berger dans les Alpes de Haute Provence : https://www.reussir.fr/patre/les-bergers-face-la-predation

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