Distinction
Le Commandeur Pagesse
Samedi dernier, entouré de sa famille et de des amis, Pierre Pagesse recevait les insignes de Commandeur dans l’Ordre national du Mérite Agricole.

C'est Henri de Benoist, président d'honneur de l'Association générale des producteurs de blé (Agpb) et ami fidèle du président de Limagrain, qui lui a remis cette haute distinction destinée, rappelle-t-il, à « honorer les grands serviteurs de l'agriculture française ». Il a retracé le parcours de ce « fils de paysans de Pardines » qui depuis son installation en 1972, sur une petite exploitation de 13 ha, a su tracer son sillon sur les terres auvergnates. « Pierre Pagesse est une des personnalités qui comptent en Auvergne et dont l'engagement au service de la cause agricole est connu et reconnu » soulignent ceux qui le connaissent. « Son courage, sa ténacité et sa fidélité en amitié, même dans les divergences » ont raison de l'ouvrage entamé il y a plus de trente ans par Pierre Pagesse.
Son tout premier engagement restera sans doute la reprise de l'exploitation familiale avec son frère et son implication rapide dans le développement de l'agriculture. C'est d'abord au lycée agricole St Pierre du Breuil sur Couze puis au sein des modules de formation des « Groupes de recherche et d'action paysans » (Grap) initiés par Michel Debatisse, que Pierre Pagesse rencontre de jeunes collègues venus de toute la France, « devenus eux aussi des dirigeants agricoles » remarque le président de Benoist.
En 1978, le jeune Pierre entame son ascension, pas à pas. Cette même année il convainc Limagrain de lui confier quel-ques hectares de maïs semences, il devient adhérent de la coopérative. Dans la foulée, Pierre Pagesse est élu président du Centre départemental des jeunes agriculteurs (Cdja) du Puy de-Dôme. «Une belle école de la responsabilité où voir, penser et agir étaient les moteurs du développement de l'agriculture» se souvient Pierre Pagesse.
« Il fait ses classes » auprès des organisations professionnelles agricoles en devenant administrateur stagiaire au Crédit Agricole, chez Domagri, à la sucrerie Bourdon et enfin chez Limagrain où il intègre le conseil d'administration en 1984. « A partir de là, tout va très vite, raconte Henri de Benoist. Ton engagement se propage au niveau national où tu deviens tour à tour administrateur de l'Agpb, de l'Agpm et de la Cfca (ex coop de France) ». Fort de ces expériences, Pierre Pagesse réintroduit alors les semences de blé au sein de Limagrain, « il est l'artisan de l'acquisition de Nickerson ». Et à 46 ans, en 1992, il est élu président de la Coopérative auvergnate.
Depuis, Pierre Pagesse n'a jamais cessé d'œuvrer pour l'agriculture et sa reconnaissance sur la scène internationale. Il fait de la recherche et de l'innovation les outils des défis à relever. C'est dans ce sens qu'en 1997, il convainc ses collègues présidents de créer Biogemma. Il prolonge « l'essai » deux ans plus tard, en créant un consortium national de génomique végétale, Génoplante, rassemblant le secteur privé et public de la recherche. En 2000, l'association avec le semencier allemand KWS donne naissance à Agreliant aux Etats-Unis, aujourd'hui n°4 américain des semences de maïs. Enfin en 2005, Pierre Pagesse crée Momagri, un « think thank » français qui développe un modèle économique et dont les résultats ont été validés récemment par des scientifiques internationaux. «Ils prouvent qu'à l'encontre des dires de l'OCDE et de l'OMC, il faut aux marchés agricoles des règles comme celles que l'on est en passe de réintroduire dans le domaine financier » explique son « parrain ». Pierre Pagesse aime d'ailleurs à rappeler « qu'on ne bâtira pas la stabilité du monde sur le cahot des marchés agricoles. L'alimentation est une chose trop sérieuse pour être confiée uniquement aux forces du marché ».
Samedi dernier, entouré de son épouse Jeanine de sa fille Carole, de ses fils Pascal et Jean François, et de ses cinq petits enfants, Pierre Pagesse était ému par tant de reconnaissance. «C'est vrai, tu n'aimes pas les honneurs, reconnaissait Henri de Benoist, car seule la satisfaction du travail bien fait te suffit ».