Le Cantal cherche désespérément des médecins généralistes
Un quart des médecins a plus de 60 ans et la succession se révèle parfois impossible à assurer. Témoignage d’Alain Faron, généraliste à Mauriac, qui a peiné à trouver un successeur.

Le Cantal, département rural enclavé, se pose la question de l’avenir de la médecine généraliste dans les années à venir. Comment partir sereinement en retraite en laissant un millier de patients sans médecin traitant ? C’est la question qu’a dû se poser le docteur Alain Faron, médecin généraliste libéral installé à Mauriac depuis le 4 avril 1976. “Ce que je voulais, c’était trouver un successeur, je ne pouvais pas admettre de laisser mes patients sans médecin.” À l’aube de ses 65 ans, Alain Faron se met en quête d’un successeur. Pendant un an, il mène une recherche sans relâche, faisant des propositions à de jeunes médecins, placardant des annonces dans toute la presse médicale, allant chercher des jeunes diplômés. La proposition était alléchante. “J’aurais tout donné !” Et avec une patientèle de plus de 1 000 personnes,l’avenir était assuré. Après une année infructueuse, fin 2014, c’est un médecin roumain qui vient lui rendre visite par le biais d’une société de recrutement spécialisée dans la médecine. “Il y a beaucoup de médecins d’origine roumaine à placer mais un seul a accepté de venir s’installer à la campagne, à Mauriac”, raconte Alain Faron. Stefan Batrinu a fait le voyage depuis Bucarest, sa ville d’origine, pour venir reprendre l’activité le 3 novembre 2014.
Pour quelques euros
“J’ai laissé ma famille là-bas mais ici j’ai un bon prof qui m’a beaucoup aidé”, raconte-t-il. La complicité entre les deux hommes après trois mois de travail en binôme est visible. “Les médecins de famille en Roumanie font la même chose qu’en France mais ne sont pas rémunérés. Avec 1 000 patients, je gagnais 200 à 300 euros par mois.” Pour le méde- cin, le sacrifice en vaut la chandelle. Avec les mêmes techniques médicales, ce n’est donc pas son métier qu’il a fallu qu’il réapprenne mais les difficultés liées à un système administratif français très lourd. Pour la langue, Stefan s’en sort très honorablement. “J’ai eu la chance d’étudier le français au lycée alors que chez nous la langue russe s’est imposée comme deuxième langue.” Aujourd’hui, l’Ordre des médecins déclare que près d’un quart des nou- veaux médecins qui s’installent chaque année en France a désormais un diplôme délivré par une université étrangère. Avec l’entrée de la Roumanie dans l’Union européenne en 2007, le mouvement a connu une accélération de 60 %. Des flux qui, paradoxalement, n’apportent aucune solution aux déserts médicaux puisque ces nouveaux médecins choisissent en priorité des régions déjà prisées par les médecins français.
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