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L'Agriculture française à l'horizon 2050

Une conférence sur le thème "Agriculture française à l'horizon 2050 - constats et perspectives " a été organisée par la Banque Populaire, ce jeudi 13 mars au Lycée agricole George Sand à Yssingeaux en présence de nombreux élèves, agriculteurs et partenaires des Organisations Professionnelles Agricoles comme la Chambre d'agriculture.

Terre d'élevage, notre région a des raisons de rester optimiste, et ce, même si l'élevage a mauvaise presse en France et en Europe
© HLP

"Agriculture française à l'horizon 2050 - constats et perspectives ", tel était le thème d'une conférence organisée par la Banque Populaire Auvergne-Rhône-Alpes et animée par Thierry Pouch responsable du Service études économiques et prospective à Chambre d'agriculture France et Chercheur, jeudi 13 mars au Lycée agricole George Sand à Yssingeaux. Des éleveurs et producteurs du secteur yssingelais, des représentants des OPA (organisations professionnelles agricoles dont la Chambre d'agriculture, de la Direction départementale des territoires (DDT), de la Direction régionale de l'alimentation, de l'agriculture et de la forêt (DRAAF) et des élèves du Lycée ont assisté à cette intervention. Avant de laisser la parole à l'intervenant, Alain Boudet vice-président de la Chambre d'agriculture ouvrait la conférence en saluant l'initiative de la Banque Populaire : "parler de perspectives autour du métier d'agriculteurs devant des lycéens, c'est important, ça a du sens".

Crise identitaire des agriculteurs

Thierry Pouch a tout d'abord planté le décor en rappelant le contexte des dernières années : un hiver 2023/2024 marqué par un mouvement de contestation profond des agriculteurs qui met en avant "bien plus qu’une crise conjoncturelle, mais l'expression d'une crise structurelle qui couve depuis des années, dans un contexte d’érosion des effectifs d’agriculteurs, d'une profession hyper-contrôlée, réglementée…". Et d'énumérer les origines de ces tensions : l'UE avec une succession de réformes de la PAC, l'OMC, et la multiplication des accords de libres-échanges, sans oublier les attentes sociétales… Mais depuis 2-3 ans, l'après-covid, on assiste à quelques revirements avec le "concept extrêmement fort de souveraineté alimentaire" aujourd'hui affirmé, les notions de résilience, de relocalisation, tout en affichant "une crise identitaire avec des agriculteurs dont l'image s'est dégradée", qui font face à un "problème de renouvellement des actifs" et de "difficultés à se projeter", des agriculteurs qui "perdent confiance en eux".

1ère puissance agricole de l’UE

Le spécialiste insiste sur le contexte de "pagaille commerciale" dans lequel l'agriculture est enlisée, sur lequel se sont aussi "superposées des tensions géopolitiques" créant une "situation d'incertitudes radicales".

Avant d'entrer dans les détails, Thierry Pouch a rappelé que "la France est la première puissance agricole de l'UE" (17% de sa production agricole en animaux et en végétaux), ce qui pour lui représente une force. Néanmoins, en 2024, on a assité à un recul de la production en valeur ( - 7,5 % après – 1,5 % en 2023), un recul des prix, une diminution des volumes de -3,4 % (production végétale : - 13, 1 % après - 5,8 % en 2023 ; production animale : - 1,4 % après une hausse de + 4,9 % en 2023. Autres chiffres, une baisse annoncée des effectifs avec moins de 400 000 exploitations en France et donc une tendance à l'agrandissement avec une moyenne de 70ha/exploitation. On compte 14 000 installations par an contre 20 000 départs.

Un focus sur les territoires AURA, "aujourd’hui questionnés par de multiples facteurs, de nature technique, économique et sociale et plus ou moins interdépendants" montre néanmoins quelques éléments positifs. Ainsi, 22,1% des exploitants ont moins de 40 ans contre 19,9% au niveau national, et 40,8% ont plus de 55 ans (France 43,4%).

Nos régions ont de l'avenir

Terre d'élevage, notre région a des raisons de rester optimiste, et ce, même si l'élevage a mauvaise presse en France et en Europe (santé, pollutions, prix…), la baisse des effectifs d’éleveurs est régulière depuis la fin des années 1980 et on note une baisse accentuée des cheptels allaitants et en bovins lait. Selon le spécialiste, en France baisse de production et baisse des exportations peuvent se traduire par une augmentation des importations ou par une opportunité pour des régions comme la nôtre dont les produits peuvent répondre aux attentes sociétales. Une lueur d'espoir pour les jeunes, dans un océan d'incertitudes.

Sur l'échiquier international, le commerce extérieur agroalimentaire français n’a pas enregistré un seul déficit depuis 1978, et en 2024 la France accuse un déficit sur UE de - 2,4 milliards d’€, mais un excédent sur les Pays Tiers de + 7,4 milliards d’€. Dans de nombreux domaines, la France reste autosuffisante, largement ou équilibrée, mais elle a des points faibles : fruits et légumes, colza, poulet, ovins, soja, riz.

Des agriculteurs performants et des filières solides

Thierry Pouch termine en mettant en avant les points forts de l'agriculture française : des agriculteurs performants, formés et connectés, des filières solides, un tissu territorial dense, une image d'excellence de ses productions (sanitaire et goût)… Mais elle a aussi des points faibles : ses coûts de production, les effectifs d’agriculteurs, une aversion pour l’international, dispersions des moyens et des actions… Il s'interroge alors à l'horizon 2050 en listant les nombreuses variables auxquelles l'agriculture devra faire face : agricoles (climat, gestion de l'eau, accès au foncier, main d’œuvre), sanitaire (épizooties, maladies des plantes, sélection génétique), économie (concurrence, prix, débouchés, exigences des consommateurs…), politique et géopolitique (PAC, réglementations, ONG).

4 profils à horizon 2050

Et de dessiner l'exploitation agricole dans 25 ans. Avec des termes à lui, Thierry Pouch détermine 4 profils : les biomassiculteurs avec une prédominance de l'entrepreneur agricole : des entreprises agricoles productrices de biomasse pour l'approvisionnement des bio-raffineries ; les moléculteurs, entreprise agricole fortement numérisée et innovante (nouvelles molécules biosourcées comme luzerne ou chanvre) ; les énergiculteurs avec affirmation d'une agriculture non-alimentaire ; les écoloculteurs qui combinent le local et l'international.

"Un vaste processus de recomposition de l’agriculture est en cours en France comme dans le reste de l’Union européenne" conclut le chercheur. "Nous sommes à un tournant". Et dans la salle, certains s'interrogent sur l'intérêt de la France de rester dans l'Union Européenne, surtout avec l'entrée attendue de 9 autres membres d'ici 10 ans (on passerait alors de 27 à 36), dont l'Ukraine vaste territoire agricole. Thierry Pouch reconnait que la question se pose aujourd'hui mais il ouvre sur la possibilité de reconstruire une nouvelle Europe autour d'un projet rémunérateur

"L'Europe reste attractive notamment face aux États-Unis, mais il faut une Europe qui innove". Répondant à un jeune qui demande s'il peut encore croire en l'agriculture, il ajoute : "il faut continuer à produire dans nos régions, dans l'hexagone, dans l'Union Européenne et dans le Monde".

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