Souveraineté alimentaire
La souveraineté alimentaire, une question de volonté politique
L’Afdi a saisi l’occasion du Sommet de l’élevage pour organiser les 2èmes rencontres Franco - Africaines sur le lien entre souveraineté alimentaire et foncier.
Les secondes rencontres Franco - Africaines ont été l'occasion d'évoquer les enjeux du développement pour l'indépendance alimentaire et l'impact du foncier sur l'évolution des agricultures locales du nord et du sud.
La souveraineté alimentaire malmenée
Tous les intervenants(1) constatent les mêmes changements dans le paysage agricole mondial: évolution des modes de consommation (consommation de lait multipliée par 2 dans les Pvd(2) depuis 1960) ; urbanisation (70 % d'urbains en 2060) ; pression sur le foncier (la Chine a 22% de la population mondiale sur son sol et seulement 8 % des terres arables) ; rareté des terres agricoles (230 ha disparaissent chaque jour en France), course féroce aux hectares (dans le monde, plus de 20 millions d'ha sont sous le contrôle de grandes entreprises agricoles et d'investisseurs extérieurs) ; accès difficile au foncier pour les petits paysans (au Mali, 600 000 hectares aménagés par des capitaux chinois et seulement 2 000 ha sont aux mains des petits producteurs maliens) ; stagnation des rendements dans les pays de l'Ocde ; volatilité des cours ; tendance à la spécialisation des régions... Tous ces indicateurs aujourd'hui mesurables placent les agriculteurs des pays du sud et du nord dans une situation de risque qui n'est pas favorable à la sécurité alimentaire. « L'élevage dans ces régions a pourtant une importance particulière car il est source d'épargne pour les petits producteurs» explique Steven Le Faou de l'Afdi. « L'élevage paysan est un contributeur de la souveraineté alimentaire des états » poursuit Hervé Petit de l'association vétérinaires sans frontières (Avsf).
Quelles solutions ?
Tout est question de volonté politique et de choix du modèle agricole et alimentaire pour demain répondent les intervenants. Pour Robert Levesque de la Fn Safer, « l'espace agricole étant limité, les perspectives pour l'alimentation d'ici 2050 supposent des changements de mode de production et des arbitrages entre production alimentaire et biocarburants ». La notion de préservation des espaces naturels est aussi partagée, « pourquoi ne pas réfléchir à la création d'une agence mondiale de gestion des espaces naturels et forestiers ? » lancent les intervenants. Jibril Berte, vétérinaire au Burkina Fasso, met en garde contre les ravages du
« copier-coller ». «C'est aux agriculteurs de se donner les moyens d'agir et de prendre en main leur destin. On peut leur apporter de l'assistance pour cela, mais pas du copier-coller ». Pour Jacques Chazalet, « la souveraineté alimentaire passe par des politiques publiques partagées par la société et discutées dans un cadre international. Il faut faire de la régulation intelligente. On ne peut plus traiter l'agriculture dans l'Omc comme une simple marchandise».
Grand témoin de ces échanges, Luc Guyau reconnaît que la Fao n'a pas la possibilité d'interdire mais celle de moraliser les relations. « La démarche que nous devons mener est politique. Il faut reprendre la question de la souveraineté alimentaire sous l'angle des droits de l'Homme. Ces terres sont exploitées par les hommes, comment les respecter ? » Enfin le président de la Fao ne veut plus entendre parler d'agriculture et de pêche sans parler d'alimentation. Parmi les missions que se fixe la Fao, le président insiste sur la nécessité de réinvestir dans la formation et la culture des consommateurs sur le système biologique. Pour que « la déconnexion entre acte de production et acte de consommation change ».
(1) Luc Guyau, président de la Fao, Michel Leblay, président Afdi Auvergne, Jacques Chazalet, président de la Chambre régionale d'agriculture, Jibril Berté, vétérinaire au Burkina Fasso, Abderrahmane Mejdoury, vice président de l'Anoc, Hervé Petit (Avsf), Steven Le Faou (Afdi), Robert Levesque (Fn Safer)
(2) Pays en voie de développement.