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La prédation et l’avenir de l’élevage ovin en question au mont Lozère

Jeudi 1er août, c’est aux sources du Tarn, sur les estives du groupement pastoral des Hautes Terres de l’Hôpital que les groupements pastoraux ont mené leur traditionnelle journée de rencontre.

La fédération des groupements pastoraux Gard et Lozère réunis au mont Lozère
La fédération des groupements pastoraux Gard et Lozère réunis au mont Lozère
© Marion Ghibaudo

Jeudi 1er août, c’est aux sources du Tarn, sur les estives du groupement pastoral des Hautes Terres de l’Hôpital que les groupements pastoraux ont mené leur traditionnelle journée de rencontre. Cet événement, qui en est à sa 12e édition, permet aux éleveurs ovins d’échanger avec les acteurs auxquels ils ont affaire régulièrement (DDT, PNC, etc.). Cette année, la sous-préfète Valérie Fuscien était conviée aux débats, ainsi que Sophie Pantel, députée de Lozère. Une journée animée et organisée par la fédération des groupements pastoraux (FDGP) Gard et Lozère et le Copage. Les discussions ont notamment tourné sur la question de la prédation, celle des budgets à boucler, celle des liens avec l’administration, parfois tendus, et enfin, a été abordé le sujet de la gestion pastorale en zone humide.

Lire aussi -> En vidéo : Une mini-série sur le pastoralisme

 

Des MAEC décriés par les groupements pastoraux

Sans pâture, les plantes poussent et tout s’enfriche »

Pour Daniel Grasset, président du groupement pastoral des Hautes Terres de l’Hôpital, la situation est très inquiétante. Se déclarant « pessimiste » sur l’avenir de la profession, l’éleveur a rappelé que le groupement monte aux sources du Tarn « depuis plus de 40 ans. En 1984, nous étions six éleveurs. En 2000, nous lançons le groupement pastoral », a-t-il retracé devant l’assemblée. Les trois Gaec aujourd’hui rassemblés dans le groupement pastoral permettent de monter près de 1 300 brebis par an sur les estives, 800 brebis qui leur appartiennent et des brebis prises en pension. Si Daniel Grasset et la plupart des éleveurs présents ce 1er août reconnaissent que le système des MAE leur permettent de toucher des aides qui donnent la possibilité d’engager d’autres frais (bergers, aides-bergers, protections contre la prédation, etc.), « les contraintes associées sont aussi très importantes ». Écobuages interdits, pas de travail du sol ni d’apports organiques, mise en défens des sphaignes : des contreparties qui passent de plus en plus mal auprès des éleveurs, qui ne comprennent pas toujours ni l’intérêt ni le besoin de ce type d’actions. 
« J’ai 60 ans et je me questionne vraiment sur l’avenir de la relève », s’est agacé Daniel Grasset. « J’ai peur que la déprise agricole ne soit voulue, a-t-il lancé à l’assemblée. En nous empêchant d’enlever les arbres, c’est la forêt qu’on laisse avancer. Les pins sont en train de tout envahir ». Pour l’éleveur, qui se rappelle un temps où les sources du Tarn étaient pleines de myrtilliers plutôt que d’arbres, les actions entreprises aujourd’hui de sauvegarde de la biodiversité sont menées en dépit du bon sens. « Et puis, rappelez-vous que les paysages d’ici, ils ont été façonnés par les hommes ». Sous-entendu : le jour où il n’y aura plus d’éleveurs sur le mont Lozère, avec une forte déprise agricole, et un embroussaillement conséquent, les paysages labélisés n’auront plus la même image. Sans parler de l’importance accrue des risques incendies.
Une partie des débats de l’après-midi s’est concentrée sur la gestion des zones humides. « Notre groupement pastoral a signé une MAE l’an dernier », a expliqué Daniel Grasset. Cette MAE couvre une zone de 25 hectares de zone humide sur laquelle le président du groupement pastoral a longuement interrogé les agents du PNC. « Vous voulez qu’on mette des barrières pour éviter que les brebis passent sur cette zone humide, mais vous croyez vraiment que les brebis, elles aiment rester les pieds dans l’eau ? Bien sûr qu’elles vont y passer pour brouter, mais elles n’y resteront pas donc elles ne vont rien détruire ». Pour Christine Gros, présidente de la fédération des groupements pastoraux Gard Lozère, le passage des brebis permet de conserver une solide biodiversité dans ces milieux humides. « Sans pâture, les plantes poussent et tout s’enfriche ».

 

Des budgets et une administration qui ne suivent pas

J’ai choisi ce métier d’éleveur, je n’ai pas été formé pour aller confronter l’administration »

Pour Christine Gros, l’une des problématiques les plus importantes pour les éleveurs reste la question des budgets. « Nous souhaitons obtenir des enveloppes dédiées au pastoralisme. Il y en a marre de devoir faire du bricolage pour boucler les budgets, payer nos bergers, etc. Chaque année, les budgets ne sont pas stabilisés. Et certains groupements sont vraiment dans le rouge. Les aides sont ponctuelles, cela n’aide pas à avoir une vision à long terme ».
Des budgets qui font grincer des dents les éleveurs, épuisés de la paperasse administrative à laquelle ils sont chaque jour confrontés, et qui prennent du temps sur le reste de leurs tâches quotidiennes. « J’ai choisi ce métier d’éleveur, je n’ai pas été formé pour aller confronter l’administration », s’est irrité Daniel Grasset. Malgré les promesses faites en début d’année suite à la crise agricole, les éleveurs présents à la réunion, regrettent de ne pas encore avoir vu le moindre petit bout de simplification administrative entrer dans leurs quotidiens.
 

 

La prédation, question épineuse

On pète tous les plombs, éleveurs et bergers ! »

Si, durant l’été 2024, deux loups ont été prélevés en Lozère, la prédation reste le principal point noir pour les éleveurs. « Le constat est simple : la situation est déjà compliquée avec le loup, mais encore plus dans le parc national des Cévennes », a détaillé Christine Gros. « On pète tous les plombs, éleveurs et bergers ! », s’est énervé un éleveur. Crainte exprimée par les groupements pastoraux : que leurs lieux d’estives et d’exploitations ainsi que le PNC deviennent « le parc à loups des Cévennes ». Une crainte que le président du PNC, Stéphan Maurin, et son directeur Rémy Chevènement ont tenté d’apaiser, mais sans résultat.
La FDGP, appuyée par Sophie Pantel, a demandé au PNC que le conseil d’administration du parc se positionne sur le sujet de la prédation plus précisément sur les tirs de défense. « Sur la question de la prédation, on a une attaque tous les deux jours sur le terrain. On ne peut pas laisser les éleveurs ainsi ! », s’est fâché Olivier Boulat, éleveur lozérien. Un long débat sur la prédation, ses conséquences sur les éleveurs et bergers et le besoin d’éliminer des loups jugés « trop nombreux » s’est engagé entre les différents acteurs, avec des échanges parfois vifs, chacun campant sur ses positions.

Lire aussi -> Un loup prélevé en Lozère : les syndicats continuent le combat
 

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