La Mohair, une laine fine et délicate
Dans sa ferme Douce Laine, Sandra Hobeniche élève une centaine de chèvres de race Angora dont elle utilise la laine Mohair pour créer pulls, écharpes, bonnets et gants.
À Sauxillanges, aux portes du Livradois-Forez, Sandra Hobeniche élève une centaine de chèvres Angoras. Une production atypique reposant pourtant sur une filière à part entière. Depuis plus de six ans, la productrice puydômoise, éleveuse laitière à l’origine, vit de la toison de ses animaux. Un fil fin et délicat, réputé pour sa douceur et sa chaleur, qui connaît un renouveau dans le sillage du tricot.
Prouesse capillaire
Avant d’en arriver au tricot, il faut recueillir cette fameuse laine, autrefois réservée aux sultans. Les chevreaux Angoras naissent au mois de mars. Leur toison est la plus fine et la plus douce de toute. Un fil blanc précieux tondu pour la première fois en août de la même année. «Nous utilisons la laine des mâles comme des femelles» précise Sandra Hobeniche. Une fois adulte, les chèvres et les boucs sont tondus deux fois par an (janvier et juillet). Un chevreau produit en moyenne, lors de sa première tonte, 600 g de laine. Un adulte quant à lui offre 4 kg de mohair durant l’année. Les poils Mohairs des chèvres poussent de plus de 1,5 cm par mois. «Au moment de la tonte, leur toison a une épaisseur comprise entre 6 et 8 cm». Une prouesse capillaire rendue possible par la sélection. «Je suis rattachée à l’organisme CapGenes. Je sélectionne mes boucs en fonction de leur toison. Je vends également quelques-unes de mes chevrettes comme reproductrices». Les mâles non destinés à la reproduction sont castrés. Contrairement aux autres productions d’élevages, ces messieurs ne voient pas leur destin coupé court. Eux-aussi produisent de la laine et peuvent vivre jusqu’à 12 ans.
De la toison au pull
Une fois les toisons recueillies, Sandra Hobeniche emmène sa précieuse cargaison jusqu’à Castres. Là-bas, un atelier est entièrement dédié au traitement de la laine Mohair produite en France. Elle est d’abord analysée et triée avant d’être lavée, cardée, filée et teintée. Sandra Hobeniche en récupère quelques mois plus tard, des pelotes et des cônes d’un kilogramme de laine. Elle vend une partie comme tel tandis que l’autre est tricotée et tissée par ses soins. Elle se plait également à teindre suivant ses envies et son inspiration une petite quantité de cette laine.
Parcours d’une passionnée
Au commencement, Sandra Hobeniche a repris l’exploitation laitière de son père. Jusqu’en 2011, elle travaille avec son frère mais les investissements financiers nécessaires à la poursuite de la production ne leur permettent pas de continuer dans cette voie. «Les sommes à engager dans la rénovation du bâti et du matériel étaient trop importantes. Le troupeau laitier a été converti en vaches allaitantes mais la viande ce n’était pas mon truc». Alors, elle part seule dans l’élaboration d’un autre projet. Après plusieurs visites dans les chèvreries françaises, elle découvre par hasard, la chèvre Angora et sa production si particulière. «J’en suis tombée amoureuse» explique-t-elle. De rencontre en rencontre, le lien se tisse entre les chèvres et l’éleveuse qui n’a d’yeux désormais que pour elles. Les chèvres Angoras sont élevées exclusivement pour leur laine. Aucune autre valorisation n’est possible. «Ce ne sont pas des animaux destinés à la boucherie. Ils meurent de leur belle mort sur la ferme». Autre particularité, l’éleveur se doit d’avoir une âme de créateur. «Une fois la laine mise en pelote, il faut la tricoter ou la tisser pour la valoriser». Élevage et création réunis en un seul et même lieu, il n’en fallait pas plus à Sandra Hobeniche.
Une réussite fulgurante
«Mon projet a été très difficile à monter. J’ai dû beaucoup insister». En effet, l’élevage d’Angoras est pour le moins singulier. À force de persévérance, l’éleveuse parvient à obtenir le feu vert pour débuter sa production. Elle achète d’abord une vingtaine de chèvres, qu’elle loge dans un bâtiment d’élevage appartenant à son beau-père. Quant aux terrains, elle en possédait déjà quelques hectares. L’année suivante, sa trésorerie lui permet l’achat d’un tunnel.
De fil en aiguille, elle augmente son troupeau. Aujourd’hui elle élève une centaine d’animaux et a même aménagé récemment un magasin et un atelier dignes de ce nom. L’intégralité de sa production et de ses créations est vendue à la ferme et sur les marchés, en particulier ceux de Noël.