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« Il faut donner une bonne image du métier »

Les Jeunes agriculteurs de la Lozère ont accueilli la session nationale ovine à La Canourgue du 7 au 9 avril. Trois jours d’échanges pour évoquer les actualités de la filière : valorisation des agneaux, prédation, installation, etc. Qu’on se le dise, le mouton est plein d’avenir. À condition que tous les acteurs marchent dans le même sens. Bertrand Gerbet, administrateur national en charge du dossier ovin a répondu à nos questions.

© S. Hartmann

Bertrand Gerbet, présentez-vous en quelques mots, vous et votre exploitation.
Je suis agriculteur à Arcizans-Dessus dans les Hautes-Pyrénées. Je me suis installé le 1er janvier 2007 en individuel sur 40 hectares. Je fais de la viande, en ovin, j’élève des Tarasconnaises et des Blondes d’Aquitaine en bovin. J’ai intégré les Jeunes agriculteurs assez rapidement, en commençant par le département, la région et enfin le national où depuis un an, je m’occupe de l’agriculture ovine des massifs. Je suis également associé sur le dossier montagne et sur celui de l’enseignement agricole.

La session ovine se tient une fois par an, quels en sont les objectifs ?
D’abord, de se connaître, cela me paraît important. Ensuite, savoir qui je dois représenter au niveau national. C’est en session que se décident les grandes orientations qui seront validées en conseil d’administration national, lesquelles seront défendues et portées par les Jeunes agriculteurs. Nous avons le pacte ovin, auquel sont associés les JA pour promouvoir le métier et installer des agriculteurs dans ce secteur de production. Mais ce n’est pas suffisant, nous devons adopter une stratégie de filière en incluant tous les acteurs concernés, de l’amont à l’aval.
Justement, en parlant de stratégie, pendant ces trois jours il a entre autres été question de valorisation des agneaux...
La question est large. Commençons par les outils d’abattage : aujourd’hui, ils sont insuffisamment répartis sur le territoire. Pour valoriser sa production, il faut commencer par la faire connaître des consommateurs, la FNO et Interbev ont participé à nos échanges. Les nouvelles règles obligatoires d’étiquetage sont en application depuis le 1er avril. La viande d’un animal né, élevé et abattu dans un même État membre pourra être étiquetée comme originaire du pays en question. Dans les autres cas, les lieux d’élevage et d’abattage devront être mentionnés. Né, élevé et abattu en France : l’enjeu est important. Et nous serons vigilants sur ce point, quitte à réitérer des actions dans les GMS. L’action de communication « viande de nulle part » avait bien fonctionné. Pourquoi ne pas la décliner sur la viande ovine au besoin ? En France, dès qu’il est question de traçabilité, les éleveurs ploient sous les contraintes et les contrôles. Si les industriels ne mentionnent pas l’origine, c’est que ce n’est probablement pas produit en France. Ils préfèrent importer de l’étranger de la viande moins cher, mais moins contrôlée. On ne peut rien faire à part le dénoncer. Actuellement, entre 40 et 45 % des ovins sont produits en France. Le reste est importé, ce n’est pas normal. Pourtant nous avons des signes de qualités, mais la production n’est pas suffisamment homogène d’une région à l’autre ou d’une période à l’autre, ce qui a forcément un impact sur les prix payés aux producteurs. L’idée, sans parler d’une production linéaire est de pouvoir disposer d’agneaux toute l’année. La conjoncture n’est pas mauvaise, nous ne sommes pas les plus mal lotis mais il faut donner une bonne image de métier pour donner envie aux jeunes de devenir éleveur ovin.
Installation et PAC

La PAC semble être favorable à l’élevage ovin, non ?
Certes, le maintien de la majoration ovine pour l’ICHN nous apparaît être une bonne chose, tout comme la modulation du niveau d’aide en fonction du taux de chargement ou le ciblage de l’aide sur les exploitations ayant une forte part de leurs surfaces en zone défavorisée. Nous approchons des déclarations mais le travail n’est pas fini, maintenant, il s’agit de faire bouger des virgules pour ajuster lorsque cela est nécessaire, le seuil minimum du taux de chargement ou les paliers de dégressivité de l’indemnité. Mais il y a des modalités, si elles sont maintenues, pouvant se révéler désastreuse. À deux semaines des déclarations, nous ne savons toujours pas quels pâturages seront éligibles. Nous avons obtenu des avancées pour les chênaies et les châtaigneraies. Mais qu’en est-il des genêts ou plus largement des zones d’estive ? En outre, la disparition du critère d’âge est une mesure en totale opposition avec la politique d’installation portée par les différents acteurs de la production ovine. Je rappelle que nous sommes une profession vieillissante : 60 % des éleveurs de brebis allaitantes ont plus de 50 ans. Le pourcentage tombe à 40 % pour les éleveurs de brebis laitières. Il va y avoir un sacré paquet de départs dans les années à venir. Il y a de la place pour s’installer à condition de faire preuve de technicité et d’être correctement accompagné par les organisations compétentes. Pas question d’installer pour installer.

La prédation est un gros dossier qui, outre la PAC et le manque de références, cristallise les inquiétudes des éleveurs. Où est-on ?
Nous, éleveurs ovins, sommes les premiers touchés. Aux Jeunes agriculteurs, un groupe loup a été mis en place, travaillant spécifiquement sur ce dossier. Le loup plombe le moral des éleveurs car nous n’avançons pas. Sur les trois premiers mois de l’année, le nombre de victimes a augmenté de 9 % par rapport à 2014. Le plan loup n’a aucun intérêt, chaque année les compteurs sont remis à zéro et j’ai peur que ce soit la même chose cette année. En 2015, c’est un quota de 36 loups qui avait été fixé. Nous n’y arriverons jamais et ce sont les éleveurs qui en pâtissent. Pourtant, nous devons adhérer à ce plan, représentant 15 millions par an si l’on veut toucher des indemnités lorsque des animaux sont tués ; lesquelles pour 2014 n’ont pas toutes été entièrement versées. Aujourd’hui, pour prélever un loup, il faut un arrêté préfectoral. C’est une mesure pouvant être très longue à prendre. L’an passé dans mon département, une autorisation de tir avait été donnée aux chasseurs, leur permettant d’abattre l’animal lors de chasse en battue, à l’approche ou à l’affût. C’est la mesure la plus haute du plan loup. Je crois que le même dispositif avait été pris chez vous (ndlr : au mois de septembre en Lozère).

Une note positive pour terminer...
De ces trois jours, je retiens leur convivialité. C’était ma première session ovine et je suis fier de représenter une si belle grande région. Donnons-nous les moyens d’installer des jeunes et surtout n’ôtons pas toute rentabilité à l’élevage ovin et à l’agriculture en général.

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