Hommage à Michèle Chezalviel, une vie de combat et de service pour l’agriculture française
Michèle Chezalviel (née Graille), grande figure de l’agriculture corrézienne et nationale, s’est éteinte ce samedi 19 juillet. Femme de caractère, visionnaire et profondément engagée, elle aura marqué durablement le monde agricole par son action, son dévouement et son humanité.
Michèle Chezalviel (née Graille), grande figure de l’agriculture corrézienne et nationale, s’est éteinte ce samedi 19 juillet. Femme de caractère, visionnaire et profondément engagée, elle aura marqué durablement le monde agricole par son action, son dévouement et son humanité.

Issue d’une lignée d’agriculteurs, Michèle Chezalviel s’installe en 1956 avec son mari Jean sur la ferme familiale, à Corrèze, où ils élèvent des vaches limousines et des porcs. Très tôt, elle s’engage dans les Jeunesses Agricoles Catholiques, puis dans les Jeunes Agriculteurs.
Ses qualités humaines et son sens des responsabilités sont rapidement remarqués : elle prend la tête du canton et devient vice-présidente départementale. Elle refusera toutefois, à ce moment-là, de s’engager au niveau national, souhaitant se consacrer à ses enfants.
Une voix forte pour les femmes dans l’agriculture
En 1967, à la demande du président de la FNSEA, elle met en place la Commission des agricultrices, donnant enfin la parole à des centaines de femmes restées jusque-là dans l’ombre.
Dès 1975, elle siège au conseil d’administration de la FNSEA et obtient, avec le soutien de Jacques Chirac, des avancées majeures pour les femmes agricultrices : reconnaissance dans la MSA, congé maternité, bail d’exploitation, co-signature bancaire, droit à la formation, ...
Sa détermination et son engagement, sur le terrain comme à Paris, la mènent à la vice-présidence nationale de la FNSEA en 1979, poste qu’elle occupera jusqu’en 1993. Michèle Chezalviel a ainsi incarné, pendant près de quinze ans, un syndicalisme fort, exigeant, mais toujours au service des autres.
Première femme présidente d’une Chambre d’agriculture en France
En 1983, Michèle Chezalviel devient la première femme élue présidente d’une chambre d’agriculture en France, celle de la Corrèze.
Durant son mandat, elle initie deux projets encore emblématiques aujourd’hui : les Marchés des Producteurs de Pays et le réseau Bienvenue à la Ferme.
Sous son impulsion sont également construits les sièges consulaires de Tulle, Brive et Ussel. Présente sur tous les fronts, elle sillonne le département, participe aux comices, réunions cantonales, festivals.
Cette proximité, rare chez une élue de son rang, lui vaut une reconnaissance unanime : « Tu es chez toi ici », lui glisse-t-on régulièrement dans les couloirs des institutions corréziennes.
Les réactions du monde agricole corrézien
Daniel Couderc, président de la Chambre d’agriculture de la Corrèze, lui rend hommage :
Michèle, c’était une femme d’une rare intensité. Elle avait cette capacité à unir, à porter haut la voix des agriculteurs, avec rigueur et humanité. C’est elle qui a posé les fondations de ce que nous sommes aujourd’hui. Elle a laissé une empreinte durable dans chaque pierre de nos bâtiments, dans chaque initiative de terrain. La Chambre d’agriculture lui doit énormément. »
Emmanuel Lissajoux, président de la FDSEA de la Corrèze, salue une pionnière :
Michèle Chezalviel, c’était la voix du courage et de l’engagement. Elle n’a jamais eu peur de prendre ses responsabilités, même dans un monde encore très masculin. Elle a redonné à la FDSEA 19 une énergie nouvelle, un cap fort. Elle nous laisse une leçon de ténacité, mais aussi de générosité. »
Anne Chambaret, ancienne présidente de la commission des agricultrices aux niveaux régional et départemental, témoigne :
Michèle a été reconnue dans un monde d’hommes. J’ai beaucoup d’admiration : c’était une femme déterminée, qui allait au bout des projets collectifs. Elle a su entraîner les femmes à prendre des responsabilités. Elle était très fédératrice. »
Une femme d’influence et d’institutions
Au-delà de son ancrage local, Michèle Chezalviel a aussi marqué les instances nationales. Elle siège au CNASEA (Centre national pour l’aménagement des structures des exploitations agricoles), au Conseil national de la montagne, au Comité de bassin Adour-Garonne, ainsi que dans plusieurs commissions liées au développement territorial. Sa voix y porte une vision à la fois réaliste, attachée au terrain, mais toujours ambitieuse pour l’agriculture française.
Une distinction à la hauteur de son parcours
En 2022, elle devient la première femme agricultrice – et première femme corrézienne – à être élevée au rang de Commandeur de la Légion d’honneur. La décoration lui est remise par le général Gérard Leroy, dans le salon de l’immeuble consulaire qu’elle avait elle-même fait construire, à Tulle. Un moment fort et émouvant, à l’image de son parcours : « C’est vraiment une combattante que nous honorons », a déclaré le général Leroy.
Commandeur du Mérite agricole (2002), Commandeur de l’ordre national du Mérite (2005), et décorée de la Légion d’honneur en trois temps (chevalier, officier, puis commandeur), Michèle Chezalviel a été reconnue par la République pour ce qu’elle était :
une femme d’exception, au service de l’agriculture et du bien commun.
« Une main d’acier dans un gant de velours » Son engagement, sa simplicité et son courage resteront à jamais dans les mémoires. La Corrèze, la FNSEA, les Chambres d’agriculture et le monde rural tout entier perdent l’une de leurs plus grandes servantes.
Michèle Chezalviel laisse derrière elle une œuvre immense, tissée de convictions, de luttes, de solidarité et de réussites. I