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FDSEA et JA au cœur des dossiers

Avec la préfète de la Creuse, les responsables agricoles ont pointé du doigt les problèmes qu’ils rencontrent depuis plusieurs semaines.
Avec la préfète de la Creuse, les responsables agricoles ont pointé du doigt les problèmes qu’ils rencontrent depuis plusieurs semaines.
© HC

Le mercredi 9 mars, les représentants de la FDSEA, Jeunes Agriculteurs de Creuse et de la Chambre d’agriculture ont été reçus en urgence par Madame la préfète et ses services (DDT, DDFIP…) afin de lui faire part de leurs inquiétudes. En effet, les remontées du terrain faisaient état d’une grande tension sur le GNR. Outre le prix exorbitant du produit, c’est surtout sa disponibilité qui pose problème au moment même où les agriculteurs commencent à retravailler dans les champs. « Nous recevons de nombreux appels des exploitants agricoles, a expliqué Pascal Lerousseau, président de la Chambre d’Agriculture. J’en ai eu huit rien qu’aujourd’hui, directement sur mon portable. » Pour illustrer son propos, il a pu faire écouter un message laissé sur son répondeur : « Sais-tu où je peux trouver du GNR ? mon livreur est à sec et les autres ne livrent plus que leurs clients habituels » disait en substance un éleveur inquiet. Les responsables ont rappelé la nécessité de disposer de carburant : « si nous ne pouvons pas mettre de gazole dans le tracteur, ce sont des travaux qui ne seront pas fait, de la nourriture qui ne sera pas produite ».

Des propositions
Venir exposer le problème est une chose, proposer des solutions c’est encore mieux. Les représentants de la FDSEA, de Jeunes Agriculteurs et de la chambre ont donc proposé 3 mesures. En premier, l’urgence est d’avoir du carburant pour continuer de travailler. Ils ont donc demandé à ce que les professions qui en dépendent (métiers de l’agriculture, mais aussi des soins, des transports ou de l’artisanat) soient livrées en priorité. « Il en va de la vie économique du pays, on ne peut pas tout arrêter, on a déjà vu un échantillon des conséquences en 2020 » a rappelé Christian Arvis.
En second lieu, il faudra être capable de payer ce GNR. Christian Arvis a utilisé son propre exemple : « j’utilise 27 000 litres de carburant par an dans mon matériel, il a pris 1 euro d’augmentation en peu de temps, le calcul est vite fait, c’est mon revenu et celui de mon associé qui s’envolent ». Par la voix de Thomas Saby, les responsables agricoles ont donc demandé une détaxation maximale du GNR, rappelant qu’il est taxé à hauteur de 67 % par l’État et que seulement 15 centimes sont remboursés sur la TICPE.
Enfin, Pascal Lerousseau a repris la parole pour demander l’autorisation immédiate de mise en cultures des jachères. Les paysans ukrainiens ne pouvant pas travailler, on manquera en effet de céréales sur les récoltes 2022, il s’agit donc de semer dès maintenant un maximum de surfaces afin de palier au moins une partie de ce manque. On pense notamment au blé dur, dont les stocks sont au plus bas suite à la mauvaise récolte 2021.

Des réponses en attente
Interrogés, les services de la préfecture n’ont pu que prendre note de ces propositions. Ils ont également en tête quelques suggestions, mais pour lesquelles ils ne sont pas décisionnaires, que ce soit pour une détaxation des carburants ou pour l’utilisation de la clause de force majeure de la PAC. « Cette clause n’a encore jamais été utilisée, mais on en n’est passé pas loin avec la crise covid », nous a confié M. Schwartz, directeur départemental des territoires.
La préfète a admis être un peu démunie en réponses pour le moment : « Une cellule de crise interministérielle vient juste d’être créée (elle a été installé officiellement le lendemain de cette rencontre, ndlr). C’est un outil que l’on connaît, très utile et efficace qui permet d’avoir un seul canal de communication, aussi bien montant que descendant. » À l’heure de la réunion guérétoise, il était encore trop tôt pour que les consignes parisiennes soient redescendues dans les préfectures. « Je n’imagine pas qu’il n’y pas déjà quelque chose dans les tuyaux, ils sont informés en temps réel de ce qu’il se passe sur le terrain et commencent déjà à avoir une vision d’ensemble, ça va vraiment très vite. » Elle a assuré qu’elle transmettrait les éléments des agriculteurs creusois le jour-même à cette cellule. Elle a également indiqué qu’elle prendrait elle-même contact avec les fournisseurs de GNR pour mieux saisir les raisons de la pénurie et trouver des solutions avec eux.
En conclusion de la réunion, préfecture et responsables agricoles ont convenu de travailler en bonne intelligence afin de faire circuler au mieux les informations dans un sens comme dans l’autre et ainsi gagner en efficacité.

Un retour du député
48 heures après cette rencontre avec la préfète, c’est avec le député Jean-Baptiste Moreau et son suppléant Vincent Turpinat que les responsables agricoles ont fait le point. Selon le député, « tous les scénarios » étaient effectivement sur la table. Sur le GNR, il était selon lui flagrant qu’il y avait de la spéculation dans l’air, un retour de l’approvisionnement et une baisse des prix étaient attendus pour le début de cette semaine (du 14 mars). Sur la détaxation, il a rappelé ce qu’il s’était passé à la mise en place de la TIPP flottante. Le Gouvernement se souvient de cette expérience, et surtout de son inefficacité, cette voie était donc peut probable.
Sur les jachères, le député s’est montré beaucoup plus optimiste, le sommet européen informel de Versailles qui venait juste de s’achever semblait avoir abouti à un quasi consensus sur leur mise en culture. « Le président Macron est décidé à tout mettre en œuvre pour favoriser la production ». L’absence de l’Ukraine et de la Russie sur le marché des céréales n’est pas un problème direct en France, mais la faim pourrait provoquer des révoltes chez leurs clients habituels du pourtour méditerranéen et du proche orient, avec des conséquences chez nous.

Des mesures dans la semaine
Le samedi, moins de 24 heures après la fin de la réunion de Versailles et de la rencontre avec le député, une première annonce gouvernementale a eu lieu, concernant les carburants. À partir du premier avril et pour 4 mois, l’État prendra en charge 15 centimes sur chaque litre de carburant vendu, quelle que soit son utilisation (véhicules personnels ou professionnels). Cette remise ne se verra pas au prix à la pompe mais directement sur la facture. « Cette mesure est un premier pas pour l’ensemble de la population, mais très insuffisante pour les agriculteurs. Nous alertions déjà les autorités cet automne, lorsque le GNR a passé la barre de l’euro par litre, il a maintenant dépassé 1,70 € » commente Christian Arvis.
À l’heure où nous mettons en ligne, le plan de résilience vient d'être annoncé. Il contient notamment une enveloppe de 400 millions d'euros vers l'alimentation animale et une avance sur le remboursement de TICPE. Des réunions au ministère de l'agriculture sont prévue pour en préciser les détails, nous y reviendrons dans notre prochaine édition.

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