Douze communes encore classées en zones vulnérables
Les arrêtés fixant les zones vulnérables pour les bassins Adour-Garonne et Loire-Bretagne sont parus lundi, incluant en totalité ou partiellement douze communes du Cantal.
L'arrêté est signé du 13 mars 2015 mais n'a été publié au Journal officiel que le 30 mars, moins de 24 heures après le second tour des élections départementales... Un hasard de calendrier pas tout à fait fortuit au vu des réactions épidermiques qui ont agité le monde agricole cantalien depuis la parution du projet de révision du zonage au titre de la directive Nitrates. Après neuf mois de contestation, mobilisation, argumentation, lobbying syndical auprès de l'administration, des Dreal, agences de l'eau, parlementaires, conseillers généraux, préfets, ministres de l'Écologie et de l'Agriculture,..., les arrêtés paraphés par les préfets coordinateurs des bassins Adour-Garonne et Loire-Bretagne incluent douze nouvelles communes cantaliennes en zone vulnérable contre les 17 initialement envisagées (en sus de Vieillespesse déjà classée en 2012) : Calvinet, Cassaniouze, Junhac, Labesserette, Lacapelle-del-Fraïsse, Montsalvy, Omps, Pers, Saint-Mamet-la Salvetat, Sansac Veinazès, Sénezergues et... l'emblématique Allanche, en pleine zone d'estives où l'ammonitrate est aussi rare que l'oxygène au sommet de l'Éverest.
Classement partiel pour certains
Un vrai motif de satisfaction pourtant pour le préfet Vignon qui a tenu mardi un point presse au pied levé se félicitant que les aberrations relevées dans le projet initial par la profession agricole - comme les cas de Mauriac et Chalvignac - aient été corrigées dans la version définitive. Le représentant de l'État a aussi mis en avant l'avancée obtenue via l'application aux nappes d'eau souterraines du principe de compartimentation déjà en vigueur pour les eaux superficielles. Ce principe permet au final de ne retenir que les parcelles d'un bassin versant donné et non
l'ensemble de la commune. Appliquée aux masses d'eau du bassin Adour-Garonne, cette délimitation infradépartementale à la section cadastrale se traduit par une réduction de 67 % de la superficie cantalienne impactée (contre 37 % à l'échelle globale du bassin) et un classement partiel de huit communes de Châtaigneraie(1). Si du côté du préfet, on se félicite de cette réduction, la réaction de la profession a elle été cinglante mardi dans un communiqué commun des syndicats FDSEA-JA et de la Chambre d'agriculture. "Malgré l'absence de preuve d'une quelconque pollution agricole, malgré les résultats de la consultation publique défavorable au projet de classement, malgré l'opposition du Conseil général, du Conseil régional, le ministère de l'Écologie a persisté en publiant en catimini ces arrêtés. C'est une injustice !", fustigent les trois organisations. "Certes nous prenons acte de la réduction significative du zonage sur le bassin Adour-Garonne mais ça reste une grande déception, réagit Joël Piganiol, secrétaire général de la FDSEA. Depuis le début, nous disons que le Cantal n'a rien à faire dans cette zone vulnérable. D'ailleurs, rien dans les arrêtés publiés n'apporte la moindre justification sur le fond, il n'y a aucun argument scien- tifique tangible pour étayer une pollution d'origine agricole et on reste
sur des problématiques qui sont celles de captages isolés." "Quand je pense qu'ils ont laissé Allanche..." , enrage Patrick Bénézit.
FDSEA et JA attaquent au TA
Si le travail d'identification des agriculteurs impactés est déjà lancé sur la base des sections cadastrales retenues, la profession estime que des centaines d'exploitations vont être contraintes d'investir des dizaines de milliers d'euros dans d'inutiles installations de stockage en béton. Aussi, même si des aménagements au plan d'actions de la directive Nitrates sont encore en négociation auprès de Bruxelles, FDSEA et JA ont déjà annoncé leur intention d'attaquer ces arrêtés auprès des tribunaux administratifs (TA) de Toulouse et Orléans. Quant au préfet Vignon, il se voulait mardi encore pédagogue en direction du monde agricole : "L'intérêt quand même de ces arrêtés est de protéger l'eau potable pour les générations à venir. Ce n'est pas parce qu'une réserve d'eau n'a pas encore atteint son seuil (NDLR : en nitrates) qu'elle n'est pas en train de se polluer...", tentait-il de justifier.
Des élus scandalisés
Une position qui hérisse les poils des éleveurs : "Le préfet présente la mise en oeuvre de ce zonage comme relevant d'une problématique de qualité d'eau potable liée aux pratiques agricoles, tranche Joël Piganiol. C'est inacceptable ! Les centaines d'analyses réalisées par les communes concernées - en Châtaigneraie notamment - montrent qu'il n'y a pas de problème de nitrates dans l'eau potable !" Ce que confirme Michel Castanier, maire de Cassaniouze, qui ne décolère pas : "C'est stupéfiant, je suis scandalisé par ce classement alors qu'il n'y a aucun problème de nitrates. On a affaire tant au niveau français qu'européen à des technocrates, qui ne sont pas sur le terrain, dénonce l'élu castanhaïre. C'est un nouveau coup dur pour l'agriculture et l'économie rurale, et c'est la disparition annoncée du commerce local qui gravite autour. Que faut-il faire pour se faire entendre ? Passer à des actions plus dures ? Peut-être souhaite-t-on que nos zones deviennent des friches, des réserves d'animaux sauvages ?"
(1) Calvinet, Cassaniouze, Junhac, Lacapelle- del-Fraïsse, Montsalvy, Omps, Pers, Saint- Mamet.
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