Décryptage des sorghos fourragers
Réputé pour son faible besoin en eau, le sorgho est une culture estivale que beaucoup d'éleveurs ont envie d'essayer pour reconstituer leurs stocks fourragers. Cependant cette culture est encore peu pratiquée dans le département
Voici quelques éléments proposés par l’équipe fourrages de la Chambre d’agriculture du Puy-de-Dôme pour vous aider à décrypter cette culture.
De quoi parle-t-on ?
Le choix du type de sorgho est lié à l’utilisation (mode de récolte, place dans la ration, aménagement des parcelles…) que l’on veut en faire.(voir tableau)
Les sorghos fourragers monocoupes sont des plantes de grande taille qui se répartissent en 2 catégories :
-Sorgho grain ensilage : récolte plante entière possible 110 à 150 jours après la levée selon précocité, équilibré en sucres et en amidon (environ 12%) à condition d’attendre que les grains présents dans les panicules atteignent le stade laiteux-pâteux.
- Sorghos sucriers (soit mâle stérile, soit pps(1)) : dépourvus de grains, ils sont pauvres en amidon, mais leur tige est riche en sucres (25%), récoltables 130 jours après la levée. Rendement élevé.
Les sorghos fourragers multicoupes (sudan grass ou hybride sorgho x sudan grass) sont caractérisés par un fort tallage et une capacité de repousse. Ce sont des plantes plus fines que les sorghos grains. Ils peuvent donc être pâturés s’ils font plus de 60 cm, dès 50 jours après le semis, ou fauchés (enrubannage possible). Ils ne contiennent pas d’amidon.
Le gène BMR(2) qu’on peut trouver chez des sorghos sucriers ou certains sorghos multicoupes hybrides induit une moindre teneur en lignine. Les variétés concernées sont plus digestibles mais aussi plus sensibles à la verse.
Itinéraire cultural
Le sorgho est une graminée estivale, comme le maïs, mais la ressemblance s’arrête là.
Son itinéraire cultural est très différent.
Choix de la parcelle :
Préférer des sols qui se réchauffent rapidement au printemps, avec une bonne exposition, car le sorgho est très sensible au froid, et la moindre gelée après la levée peut détruire la plante.
Eviter les sols battants et les parcelles à forts risques de graminées adventices (notamment panic faux millet) car la plante est peu vigoureuse et peu concurrentielle au départ.
Dans le Puy de Dôme, on évitera cette culture au-delà de 700 m, ou dans les zones connues pour leurs gelées nocturnes de fin d’été.
Préparation du sol : Le peuplement étant la composition essentielle de la constitution du rendement, la préparation du sol est un point clef de la réussite de la culture. Il faut obtenir une terre fine, non motteuse. La préparation du sol s’apparente à celle que l’on ferait pour une prairie.
Selon le précédent cultural et la structure du sol, un travail profond préalable pourra être nécessaire (labour ou outil à dent)
Semis : le sol doit être bien réchauffé, au moins à 12°C. En général, les semis de sorgho se font 15 jours minimum après ceux du maïs. La graine doit être positionnée à 2 cm. En cas de sécheresse au moment du semis, positionner la graine à la fraicheur sans dépasser 4 cm.
Privilégier les semoirs monograines, avec un écartement de 60 cm. Les disques distributeurs doivent être spécifiques au sorgho, et le semoir réglé en conséquence.
Pour les sorghos multicoupes, il est possible d’utiliser un semoir à céréales en semant un rang sur deux.
Densité de semis :
Monocoupes : 220 000 graines /ha en situation favorable (sol profond, bonnes conditions de semis), jusqu’à 250 000 graines/ha en situation moins propice (sol peu profond, conditions météo défavo- rables au semis-levée).
Multicoupes : 25 à 30 kg/ha pour les sudan x sudan, 20 à 25 kg/ha pour les hybrides sudan x bicolor.
Fertilisation : un seul apport de 60 N/ha, au semis en sol profond, avant 6 feuilles en sol filtrant. La forme d’azote minéral sera choisie de façon à éviter les pertes par volatilisation (privilégier la forme ammoniacale si le temps est froid par ex). Si la parcelle choisie n’a pas eu de fertilisation organique depuis 3 ans ou plus, on pourra faire un apport 60 P et 150 K.
Maîtrise des adventices : il faut avoir une parcelle propre à l’implantation pour limiter la concurrence précoce : possibilité de faire un faux semis.
Après l’implantation, en cas de désherbage chimique vérifier que les produits sont bien homologués pour le sorgho, et faire attention au DAR (délai avant récolte) qui peut parfois atteindre 60 jours. L’application aura lieu à partir du stade 3 feuilles pour les antigraminées et entre 4 et 8 feuilles pour les antidicots et vivaces.
La lutte mécanique est également possible : herse étrille jusqu’au stade 3 feuilles, binage à partir de 4-5 feuilles. Elle sera d’autant plus aisée et efficace que la préparation du sol aura été soignée (nivellement, finesse etc…).
Récolte
Sorgho grain ensilage : le murissement des grains se fait du haut vers le bas des panicules. Pour viser un stade optimum de récolte, il faut que les grains du haut de l’épi soient pâteux alors que ceux du bas sont laiteux.
Sorghos sucriers : les plantes n’ayant pas d’épis, c’est la teneur en matière sèche de la plante qui va guider la récolte. Il faut viser 30 % de MS, sinon le silo coulera, et on perdra les sucres qui sont l’intérêt principal de cette culture. Au champ, prendre une tige et la tordre comme si on essorait un torchon (se mettre à deux personnes). On peut ensiler quand aucun jus ne s’écoule à la torsion (faire l’essai sur plusieurs tiges).
Sorgho multicoupes : comme la plupart des graminées fourragères, la valeur alimentaire est meilleure au stade début épiaison. La qualité chute ensuite très rapidement.
(1) Photo period sensitive : sous nos latitudes, ces sorghos ne font pas ou peu de grains.
(2) Brown mid rid : nervure centrale brune qui permet de les reconnaitre visuellement