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Après l’attaque de trop, un éleveur du Pompidou vend son troupeau

Neuf heures du matin, le soleil éclaire à peine ce petit lieu-dit du Crouzet (le Pompidou) et la ferme qui s’y cache, construite à l’abri d’un replat. Les visages des agriculteurs sont fermés et attristés alors qu’ils attendent le maquignon qui viendra ramasser la centaine de brebis viande restante sur l’exploitation.

Damien et Didier Pratlong regardent leur troupeau partir
Damien et Didier Pratlong regardent leur troupeau partir
© Marion Ghibaudo

Ce départ signe la fin d’une ferme établie là depuis quatre générations, et « de longue en brebis viande », détaille Didier Pratlong, le père.
Les brebis, qui étaient au nombre de 150 avant l’attaque du 10 juin qui en a laissé une vingtaine sur le carreau, ont été rassemblées dans le bâtiment qui sert aussi de stockage pour la nourriture. Une triste fin pour cette petite exploitation que Damien Pratlong, le fils, espérait pouvoir continuer à faire tourner quelques années encore, avec l’aide de son père, Didier, agriculteur à la retraite.
« Cela fait plusieurs années que nous subissons des attaques, ce n’est plus possible », s’agace le fils dans le silence irréel d’une ferme vidée de ses animaux.

Deux attaques et une fin d’exploitation

Damien Pratlong détaille les attaques récentes subies en moins d’une semaine. « La première a eu lieu dans la nuit de vendredi à samedi, causant une brebis blessée et deux disparues ». L’éleveur décide donc de passer la nuit suivante sur place avec son troupeau, espérant tenir le loup à distance. Las, vers 11 h 30, « après que les brebis se sont couchées, le loup est arrivé et a dispersé le troupeau. Une partie du troupeau est retournée directement à la bergerie, mais une vingtaine de brebis a disparu ». Damien Pratlong s’est dit « impuissant, alors que ça volait dans tous les sens. Je n’ai même pas vu le loup », enrage-t-il.
Les éleveurs, qui avaient déjà subi une grosse attaque en novembre 2024, avec une dizaine de brebis mortes ou disparues, ont donc préféré arrêter le jeu de massacre. « C’est trop d’affilée », fulmine Damien Pratlong. La solution choisie par la famille est donc radicale : vendre toutes leurs brebis et s’arrêter là. Mais, se désole l’éleveur, comment s’installer ici, faire des investissements sur le long terme avec cette menace permanente au-dessus de la tête ?

Un évident manque de soutien face à des éleveurs démunis

Mais pour Damien Pratlong, les vrais responsables de la situation sont à chercher du côté du parc national des Cévennes ou de la DDT. Si Didier Pratlong salue la bienveillance du directeur du PNC, venu « l’aider à chercher les brebis disparues », il trouve leur approche plus que paradoxale sur la coexistence supposée du loup et de l’agropastoralisme. « C’est paradoxal, ils veulent du pastoralisme, c’est bien beau, mais ça ne va pas avec le loup », confirme Damien Pratlong. « Ils m’ont dit qu’il me faut un berger, mais il m’en faut trois des bergers, parce que la journée d’un agriculteur là, en ce moment, en faisant les foins et tout, et la route entre les exploitations, c’est ingérable ». Une dépense qui mettrait les éleveurs dans le rouge, pour un résultat dont ils ne sont pas certains. « On nous parle tout le temps de moyens de protection, le moyen de protection, nous, on l’a trouvé aujourd’hui : c’est le camion qui s’en va. Là, on est bien protégé, on ne risque plus rien ! ».
Pour Damien Pratlong, le futur pourrait résider, à terme, dans le hors-sol. « On ne peut pas pratiquer notre élevage extensif de manière sereine avec cette prédation constante. La détresse est là. Il va se passer quelque chose. Ça fait un peu peur, parce qu’il risque d’y avoir un drame, quand même. Parce que les agriculteurs qui se font attaquer, ils sont vraiment dans un mauvais état psychologique, et on entend toujours une petite phrase qui fait dire que c’est notre faute ».
Désormais, pour Damien et son papa Didier Pratlong, les brebis parties, il faut songer à la suite : faucher les près, une dernière fois. Puis décider de ce qui sera fait des machines agricoles, du stock de paille, qui s’élève sur plusieurs colonnes jusqu’au plafond après deux bonnes années de récolte. Sans véritable solution, cependant, face à un loup qui « gagne du terrain ». Et un désespoir mêlé de rage qu’ils traîneront encore longtemps dans un bâtiment désormais vidé de toute vie.

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