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Développement durable : le carbone n’est pas le seul enjeu

Afin de toujours plus améliorer leur référentiel et l’empreinte de leurs produits, les entreprises de Demain la Terre ont lancé des études d’écoconception. Résultats ? Un levier ne sera pas forcément bénéfique sur tous les indicateurs du développement durable.

Fibres de coco ou tourbe et écorces de pin ? En termes de substrat, Demain la Terre n’a pu statuer sur solution meilleure que l’autre, car il faut prendre en compte tous les aspects du développement durable -environnement, économie, social- et pas que la question carbone.
© Fruits Rouges & Co

Comme le rappelle Vincent Colomb, responsable de service à l’Ademe, une analyse de cycle de vie (ACV), c’est 16 indicateurs, et pas seulement celui du changement climatique, représenté par les émissions de gaz à effet de serre dont le carbone en fer de lance. « Pour une ACV, il faut tout regarder, aussi les impacts sur l’eau, les sols, l’air, la biodiversité, les ressources, la santé ! »

 

Pour aller plus loin : les autres articles du dossier Carbone

ACV, quésaco ? L’ACV est une méthode d’évaluation visant à quantifier les impacts environnementaux d’un produit ou d’un service, dans un objectif d’éco-conception ou pour choisir parmi plusieurs produits ou services le plus performant. Tous les impacts potentiels sur l'environnement et les consommations de ressources sont étudiés, depuis l’extraction des matières premières jusqu’au traitement des déchets. Il s’agit d’une approche globale, multi-étapes et multicritères, normée (ISO 14040 et 14 044), qui donne des résultats selon 16 indicateurs : changement climatique, eutrophisation de l’eau douce ou celle de l’eau marine, usage des terres, ressource énergétique, toxicité humaine,….

 

Demain la Terre s’est intéressé à 5 critères environnementaux

C’est ce qu’a fait l’association Demain la Terre. Afin de nourrir ses réflexions, le label de développement durable s’est lui aussi lancé dans des projets d’écoconceptions. Un premier volet avec l’Ademe (2017-2022) vient de s’achever et consistait en des ACV initiales, la mise en œuvre de leviers d’amélioration puis de nouvelles ACV comparatives.

Trois cas particuliers ont été étudiés : la betterave rouge transformée conditionnée sous-vide, le coulis de fraise Hauts-de-France, et le concombre sous serre. Pour mesurer l’empreinte environnementale de ces trois produits, les ACV ont pris en compte 5 critères : le changement climatique (émissions de gaz à effet de serre dont le carbone) ; l’acidification (pH de l’eau et du sol) ; l’eutrophisation de l’eau douce ; l’utilisation des énergies non renouvelables ; la consommation en eau.

Les adhérents étant satisfaits du projet, Demain la Terre repart pour trois ans (2023-2025) avec quatre nouveaux produits : la fraise sous abri froid hors-sol, la pomme, l’oignon, et la tomate cerise hors sol sous serre chauffée.

 

Des conseils intégrés au référentiel

Les résultats, très instructifs (voir schéma ci-dessous), ont validé la plupart des actions mises en place. Elles ont d’ailleurs été intégrées au référentiel Demain la Terre dès 2021. Parmi celles-ci : utiliser des serres en paroi double plutôt que simple, avoir recours aux énergies renouvelables comme l’électricité verte pour compenser le fait que les serres ne peuvent pas stocker de carbone contrairement aux vergers, etc.

Dans la même optique, la SARL Cormorèche a installé des panneaux voltaïques sur sa station de transformation de betteraves afin d’être autonome en électricité et Picvert et Kultive ont annoncé la même décision.

Côté transformation, il s’agit d’augmenter la qualité de l’emballage secondaire ou de réduire son poids : carton plus fin et plus grand, rempli avec plus de poches (pour le coulis, en mettre 6 au lieu de 4).

Conception de produits labellisés Demain la Terre : principaux résultats des leviers activés (tableaux) et impact du projet pour les adhérents (graphe).
© Demain la Terre

 

Un effet de vases communicants

Mais ces résultats montrent surtout un effet de vases communicants entre indicateurs, c’est-à-dire que mettre en place une action qui aura un effet positif sur un indicateur va impacter négativement un autre. Anaïs Yates, responsable technique de l’association, souligne : « Nous, Demain la Terre, sommes un référentiel de développement durable qui prend en compte les trois piliers : l’environnement oui, mais aussi le social et l’économie. Il n’y a pas de solution unique, c’est une histoire d’équilibre. La question c’est d’arbitrer entre les différents sujets ». Par exemple, sur la betterave, le fait d’utiliser des engrais organiques plutôt que chimiques va faire diminuer les émissions de gaz à effet de serre (indicateur « changement climatique ») mais va acidifier de manière importante les sols par lessivage d’organo-éléments.

Même constat sur le coulis de fraise. Les deux producteurs de fraises du projet présentent un itinéraire technique très différent, l’un est sur un modèle plutôt intensif avec une trentaine de salariés et un substrat de tourbe hollandaise et écorces de pin des Landes, l’autre sur un modèle extensif avec un substrat de fibres de coco produites aux Philippines. Anaïs Yates explique : « La tourbe met des millions d’années à se former, sans parler des méthodes d’extraction. Mais la fibre de coco vient de loin, elle est basée sur la déforestation et quid des conditions de travail notamment des enfants. Ce sujet touche mes adhérents. Mais il y a aussi le sujet socio-économique : le producteur en extensif travaille seul ; le substrat en fibres de coco est directement utilisable alors que celui en tourbe et écorces demande une préparation. Faire passer ce producteur sur la tourbe lui demanderait beaucoup trop de temps, d’énergie et d’argent. Nous n’avons donc pas pris de décision sur le sujet substrat ».

 

Pas de Green Marketing mais une réelle sensibilité des producteurs

Demain la Terre communiquera-t-il sur ces résultats ? « Dans le cas des scores environnementaux à venir, peut-être. Mais les ACV concernent les producteurs individuellement donc c’est difficile de communiquer à titre collectif. Et nous n’avons pas fait cette démarche d’écoconception dans ce sens mais parce que nos producteurs sont sensibilisés et impliqués pour toujours faire mieux sur les trois piliers du développement durable », conclut Damien Sanchez, responsable communication et marketing.

L’utilisation d’engrais organiques plutôt que chimiques limite les émissions de gaz à effet de serre mais acidifie de manière importante les sols

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