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Analyse de marché
Colza et tournesol, un potentiel de hausse d’actualité

La marge de trituration française de colza est à un niveau exceptionnel, et la production de tournesol est en baisse en Europe, explique l’analyste Hémeline Macret de Stratégie Grains.

© Congerdesign-Pixabay

Une forte hausse des prix des graines oléagineuses hexagonales a été observée depuis l’été 2020. Et selon l’analyste Stratégie Grains, un potentiel de hausse est encore envisageable. « Les cours du colza et du tournesol s’affichent à un niveau élevé, ainsi le potentiel de hausse n’est pas forcément très important. Mais il existe », s’exprime Hémeline Macret, experte du marché des oléagineux du cabinet d’analyse.

Dans le détail, le potentiel de hausse serait plus fort pour la graine de colza que pour celle de tournesol, selon Stratégie Grains. « Le niveau des prix de l’huile de tournesol a atteint un très haut niveau (1 165 $/t sur l'échéance janvier-mars 2021, FOB ports du nord UE au 1er décembre, 725 $/t le 26 juin) et ils ne peuvent plus vraiment monter actuellement. La demande s’est retirée ces derniers jours », témoigne Hémeline Macret. L’huile de colza s’avère, pour le moment, moins onéreuse, à 1 017 $/t sur l'échéance février-avril en FOB Rotterdam (851 $/t le 11 juin).

Marge des triturateurs français de colza estimée à 126 €/t

« Vu la cherté de l’huile de tournesol, les acheteurs se tournent davantage vers l’huile de colza, actuellement », précise l’experte de Stratégie Grains. Autre élément haussier : la marge record des triturateurs français en colza, stimulant leur demande. « Nous l'estimons à 126 €/t actuellement ! Pour les triturateurs de la zone Arag (Amsterdam, Rotterdam, Anvers, Gand), nous l’estimons à 60-65 €/t, ce qui est élevé également », indique Hémeline Macret. La consommation des triturateurs de l'UE est certes en baisse par rapport à l'an dernier, mais cela s'explique essentiellement par la petite récolte européenne (cf. graphique ci-dessous).

 

Malgré la dégringolade de l’énergie fossile, les taux d’incorporations d’huiles végétales dans les carburants ont augmenté en Europe, stimulant la demande en graines et en huiles ces derniers mois, alors que des baisses de productions de colza et de tournesol sont observées en Europe, de l’Espagne jusqu’à la mer Noire (Russie/Ukraine), rappelle la spécialiste de Stratégie Grains. Les cours du biodiesel ont donc fortement progressé depuis avril 2020 (cf. graphique ci-dessous).

 

L’Argentine a stoppé sa production de biodiesel durant le printemps

La concurrence d’autres pays, comme l’Argentine et son huile de soja, s’est avérée très faible. « L’Europe n’importe plus grand-chose [en référence à l’huile de palme pour le biodiesel] en provenance d’Indonésie, et l’Argentine avait stoppé sa production de biodiesel à base d’huile de soja durant le confinement du printemps 2020. Sur avril-juin, l’UE n’a acheté que 25 000 t de produits argentins, contre 400 000 t l’an dernier sur la même période ! », souligne l’experte. Elle ajoute que sur avril-septembre 2020, l’Argentine n’a produit que 640 000 t de biodiesel, contre 1,3 Mt l’an dernier sur la même période ! Ensuite, plusieurs analystes (Terres Univia, Stratégie Grains, courtiers…) rapportent que la demande en pétrole, après le premier confinement en été, s’est avérée supérieure aux attentes du marché, et le fret routier, utilisant du gasoil, a continué de fonctionner durant le confinement, soutenant la demande de biodiesel.

Autre facteur haussier : les fortes demandes chinoises et indiennes, entraînant à la hausse l’huile de soja, de palme et, donc, du colza et de tournesol. Ces pays sont dotés d’importants taux de croissance économique, stimulant la demande énergétique et alimentaire. La pandémie de Covid-19 a certes pesé sur leur croissance, et donc sur leur consommation d'huile (cf. graphique ci-dessous), mais ils s'en sont mieux sortis que d'autres, comme l’a confirmé l’OCDE le 1er décembre, lors de la présentation de ses perspectives économiques. Ainsi, le décrochage de la consommation d'huile de tournesol par ces deux nations n'a pas été aussi important que prévu, surtout concernant la Chine. « Cela fait quatre à cinq ans que la Chine et l’Inde ont augmenté leurs consommations d’huile de tournesol, de palme, de soja… à des fins alimentaires et énergétiques », indique Hémeline Macret.

 

Concernant la prime oléique, Hémeline Macret est en accord avec les hypothèses recueillies par divers courtiers et Terres Univia : « La pandémie de Covid-19 a pu effectivement freiner la demande en huile oléique, du fait de la baisse des achats de la restauration hors domicile, et stimulée celle de la qualité standard (ou linoléique), davantage consommée à domicile. L’huile de colza est également davantage consommée à domicile ».

À suivre : l’état des cultures en Argentine et au Brésil

À l’avenir, le principal « driver » du marché sera l’état des cultures de soja en Amérique latine. « Si les cultures s’en sortent bien, une petite baisse des prix pourrait intervenir. Dans le cas contraire, une nouvelle hausse des cours du complexe oléagineux n’est pas à exclure », soutient Hémeline Macret. Cette dernière ajoute que le marché argentin est actuellement faussement tendu : « Les Argentins ont beaucoup de stocks, ayant peu vendu, car ils attendent une nouvelle baisse du peso face au dollar états-unien pour vendre. Ils préfèrent donc détenir de la graine de soja comme épargne, plutôt que de la monnaie argentine ». Les autorités argentines ont annoncé des mesures pour soutenir le peso le 2 décembre : les entreprises argentines exportatrices de grains et de matières premières agricoles ont désormais seulement quinze jours pour convertir les dollars obtenus en exportant en pesos argentins, afin de les inciter à épargner en monnaie local, et de lutter contre l’inflation. Passer ce délai, les entreprises exportatrices n’auront temporairement plus la possibilité d’exporter. A voir les conséquences d’une telle décision sur le commerce argentin.

Hausse annuelle des taux d’huile de colza en France, selon les résultats préliminaires de Terres Inovia

Selon Terres Inovia, « la teneur en huile moyenne des graines de colza en France est de 44.3 % aux normes en 2020, ce qui est nettement supérieur aux performances de l’an passé (43 %), et en augmentation de 2,5 % par rapport à la moyenne quinquennale », d’après des résultats préliminaires communiqués le 2 décembre. L’Est a présenté les meilleurs résultats. La teneur en protéines, exprimée en pourcentage de la matière sèche, « atteint une moyenne de 19,7 % et s’inscrit dans la moyenne quinquennale. Il est intéressant de noter que la teneur en protéines est élevée cette année, malgré une importante teneur en huile également », précise le communiqué.
 

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