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Biocarburants
Signature d’un accord au sommet entre le Brésil et les États-Unis

Les deux premiers producteurs mondiaux de biocarburants ont avalisé un mémorandum de coopération qui vise à renforcer leur stratégie

ACCORD. Le 9 mars, le Brésil et les États-Unis ont scellé, à l’occasion d’une visite du président George W. Bush à Sao Paulo, un partenariat pour développer la production et l’utilisation des biocarburants. Le mémorandum de coopération signé par les deux pays vise notamment à faire de l’éthanol un produit commercialisable sur le marché mondial par l’établissement de normes techniques communes. Hasard du calendrier, les chefs d’Etat et de gouvernement de l’Union européenne acceptaient le même jour de se fixer des objectifs contraignants pour le développement des énergies renouvelables et plus particulièrement dans le secteur des biocarburants : d’ici 2020, les carburants d’origine végétale devront représenter 10 % de la consommation totale d’essence et de gazole de l’UE. Des deux côtés de l’Atlantique, les filières agricoles se préparent à monter en puissance.

Partenariat stratégique

« C’est un partenariat véritablement stratégique ». C’est par ces mots que le président brésilien Luiz Inacio Lula da Silva a qualifié l’accord sur les biocarburants signé entre son pays et les États-Unis. Après avoir visité une unité de stockage d’éthanol de la compagnie Petrobras, dans la banlieue de Sao Paulo, son homologue américain a mis pour sa part l’accent sur l’enjeu de la diversification énergétique. « Si vous êtes dépendant du pétrole venu de l’étranger, vous avez un problème de sécurité nationale. En d’autres termes, la dépendance à une énergie venue d’ailleurs signifie que vous dépendez de décisions prises ailleurs », a déclaré George W. Bush. Ce partenariat vise « l’inclusion définitive de l’éthanol dans le modèle énergétique des deux pays », avait répondu le président brésilien.

Le mémorandum signé par les États-Unis et le Brésil, qui concentrent près de 75% de la production mondiale d’éthanol, entend faire de l’éthanol une « commodity », c’est-à-dire une matière première échangeable sur le marché international, de manière standardisée. En outre, un partenariat entre les organismes de normalisation des deux pays est annoncé. Le texte prévoit une coopération technologique entre Washington et Brasilia sur les biocarburants dits de deuxième génération à base de déchets végétaux (et non de denrées alimentaires comme le maïs ou la canne à sucre), ainsi qu’un transfert de technologie à d’autres pays intéressés par la production d’alcool carburant. En revanche, les deux présidents n’ont pas soufflé mot de la revendication des industriels du Brésil qui demandent aux États-Unis d’abaisser leurs tarifs douaniers sur l’alcool brésilien. Ils ont insisté en revanche sur l’importance sociale et environnementale du développement des biocarburants, afin de dissiper les risques de monoculture soulignés par certaines organisations paysannes.

« Nous voulons voir la biomasse favoriser le développement durable », a dit le président brésilien. « Une bonne politique de l’éthanol signifie davantage d’emplois et non pas moins », a insisté de son côté M. Bush. Rogelio Golfarb, président de l’Association des constructeurs automobiles (Anfavea), a estimé quant à lui que l’échange d’informations et d’expériences technologiques a une « importance stratégique pour nous », soulignant que l’avenir était à la production d’éthanol à partir de cellulose.

Reste que le mémorandum n’engage pas les deux signataires sur des mesures précises : ni sur des tonnages, ni sur des montants d’investissements. Le document vise à “ fournir un cadre de travail ” au développement des biocarburants dans les deux pays.

L’administration américaine n’avait pas caché, ces dernières semaines, son désir de trouver un terrain d’entente. Dans une allocution prononcée le 6 février devant une fondation universitaire de Sao Paulo, le secrétaire d’État adjoint américain pour les Affaires politiques, Nicholas Burns, avait déclaré que son pays voulait conclure un accord avec le Brésil « afin d’élargir le marché de l’éthanol ». L’éthanol peut devenir le « catalyseur » d’un partenariat renforcé entre les deux pays, avait-il ajouté. Le président américain avait pour sa part multiplié ces derniers temps les déplacements sur le dossier “biocarburant”. Le 22 février, il visitait une usine d’éthanol cellulosique, gérée par la firme danoise Novozymes, en Caroline du Nord. Le lendemain, il participait à une démonstration de carburants renouvelables, déclarant son intérêt de « développer une industrie de l’éthanol avec d’autres produits que le maïs ».

Diversifier l’approvisionnement

L’accord avec le Brésil illustre essentiellement la prise de conscience par les États-Unis des limites quantitatives à la production d’éthanol à partir de maïs. Le maïs-éthanol « n’est pas l’avenir de l’éthanol » aux États-Unis, a ainsi lancé Randy Schnepf, économiste au Congrès américain, lors d’une conférence qui s’est tenue le 12 mars à l’ambassade américaine à Paris. Utiliser la totalité de la production de maïs des Etats-Unis pour produire de l’éthanol ne remplacerait qu’à peine 15% de la consommation d’essence, a-t-il rappelé. A l’heure actuelle, 20% du maïs américain est consacré à la fabrication d’éthanol. Cette ponction s’opère au prix d’une forte augmentation des cours intérieurs : +74% depuis août 2006 ! « La hausse du prix du maïs, tirée par l’éthanol, est préoccupante », fait remarquer Randy Schnepf. En outre, le rendement énergétique du maïs-éthanol n’est que de 1,35 (pour une calorie investie pour la production, 1,35 est obtenue sous forme de carburant), alors que le rendement de la canne à sucre brésilienne est de 1 pour 8. Malgré tous ces efforts américains, les biocarburants ne représentent que 0,6% de la consommation énergétique totale américaine. Les États-Unis ont donc besoin d’éthanol importé, l’Amérique du Sud pouvant constituer un fournisseur idéal. « L’industrie de l’éthanol est naissante », a poursuivi M. Schnepf lors de sa conférence à Paris. Washington ne va pas s’arrêter là. Son Department of Energy consacre une aide de 385 millions de dollars à 6 projets d’usines d’éthanol cellulosique, tandis que le projet de Farm Bill 2007 contient une proposition d’aide de 1,6 milliard sur dix ans à l’éthanol cellulosique, dont plus de la moitié en recherche.

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