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« Si le Ttip passe, l'Union européenne devra renforcer la Pac »

L'actuel président délégué de l'ANMF, Bernard Valluis, vient d'être élu à la présidence de l'Association des meuniers européens (EFM). Le Français succède ainsi à l'Anglais Gary Sharkey pour un mandat de deux ans.

La Dépêche-Le Petit Meunier : Vous avez été élu le 30 mai dernier président d'European Flour Millers. Quelles seront les priorités de votre mandat ?

Bernard Valluis : Les enjeux sont de deux ordres : technique et économique. Concernant le premier, notre interlocuteur principal est la Direction générale de la santé à la Commission européenne avec qui nous travaillons sur la sécurité alimentaire et les règles sur les contaminants, notamment. Un travail important a déjà été réalisé sur les Don, et nous travaillons maintenant sur de nouvelles formes de mycotoxines que l'on ne détectait pas auparavant. Autre dossier, la présence d'ergot dans les céréales. Ce dossier concerne davantage les pays plus à l'est, notamment l'Allemagne sur le seigle. Sur le dossier des résidus de pesticides, nous avons de vraies préoccupations concernant les produits utilisés pour le stockage, pour lequel nous disposons de peu de substituts pour le moment. Sur le volet économique, nous sommes attentifs à l'évolution des négociations du Ttip (traité transatlantique). Actuellement, les droits de douane s'élèvent à 172 €/t sur la farine (accords de Marrakech). L'Union européenne propose une ligne tarifaire spéciale pour les produits dits sensibles pour lesquels les droits de douanes ne seraient supprimés qu'au bout de sept ans. Nous souhaitons que l'échéance soit plus longue et que les droits ne tombent pas à zéro, quitte à créer une sous-catégorie de produits. La question du calendrier de la négociation est également importante car les produits sensibles et très sensibles sont souvent discutés en fin de parcours. Pour nous, ce dossier ne peut être dissocié de celui de la Politique agricole commune dans la mesure où les producteurs US bénéficient d'un système d'assurance revenu tenant compte des prix antérieurs (contra-cycliques). Ainsi les agriculteurs US sont protégés sur le marché intérieur. La Politique agricole commune doit permettre un approvisionnement industriel de qualité, compétitif et en quantité suffisante. Nous souhaitons continuer de travailler en filière. Nos intérêts convergent avec ceux des agriculteurs. Si le Ttip passe, l'UE devra en tenir compte. Autre gros dossier, la régulation financière avec le suivi de la réglementation européenne, et notamment la mise en place de la directive Mifid 2 qui devait entrer en vigueur en janvier 2017. Mais son application pourrait être reportée d'une année suite à la demande de l'Esma (Autorité des marchés financiers européenne).

Nous souhaitons continuer de travailler en filière, nos intérêts convergeant avec ceux des agriculteurs

LD-LPM : Quel est votre sentiment suite au Brexit ?

B. V. : Globalement, le choix de sortir de l'Union européenne ne change pas grand chose à court terme. À plus long terme, la question est de savoir ce qui adviendra du statut du Royaume-Uni vis-à-vis de l'UE. Les échanges de céréales devraient se maintenir, dans un cadre de libre-échange tel qu'on le connaît aujourd'hui. En revanche, une interrogation demeure quant à l'avenir de la production agricole anglaise. Avant 1973, l'agriculture du Royaume-Uni était déficitaire obligeant le pays à importer de manière conséquente. La question est donc de savoir comment le financement de l'agriculture sera assuré lorsque le Royaume-Uni sera définitivement sorti de l'UE. Côté meunerie, les industriels du Royaume-Uni sont liés à l'EFM, d'ailleurs le président sortant était britannique. La réglementation qui s'applique actuellement outre-Manche est celle de l'UE, et on ne voit pas comment tout serait remis en cause. Nous sommes donc toujours très proches et resteront amis quoi qu'il arrive.

LD-LPM : LE CME a présenté un nouveau contrat à terme blé pour le marché européen ? Quel regard portez-vous sur ce dernier ?

B. V. : Le contrat à terme présente de nouvelles possibilités par rap-port à l'existant, comme la possibilité de livrer en portuaire ou en départ région. Les spécifications sont différentes du contrat Euronext, puisqu'elles se situent au niveau des critères de refus de ce dernier. Cet élément permettra de construire des primes et de fixer des parités. Notons aussi que le contrat CME est plus compétitif en terme de coût et propose des mesures d'accompagnement comme la titrisation des contrats de stockage. Pour l'export, une compensation entre le sous-jacent français et le sous-jacent US sera possible. Enfin, et cela peut être une limite pour les opérateurs, le contrat sera sous l'autorité juridique US contrairement au contrat Euronext qui répond au droit européen. Mais cet élément confère au contrat du CME une plus grande transparence.

LD-LPM : La meunerie européenne a-t-elle poussé à la création de ce contrat ?

B. V. : Il y a un intérêt de la meunerie européenne notamment dans les pays de l'Est européen. De leur côté, les meuniers français utilisent surtout le marché à terme pour connaître le prix du blé. Ils n'y sont pas aussi présents qu'ils le de-

La meunerie européenne en chiffres

L'EFM est une association représentant les industriels de la meunerie européenne. Elle regroupe 26 pays de l'UE et des membres associés, que sont la Suisse, la Russie et la Turquie. Selon l'EFM, le chiffre d'affaires du secteur meunier de l'UE s'élève à 15 Md€. Chaque année, il écrase 45 Mt de blé, de riz et d'avoine. Il emploie près de 45.000 personnes, voire 350.000 indirectement. Au total, l'industrie meunière compte 3.800 moulins en Europe, avec des capacités de production utilisées à hauteur de 65 %. Elle fabrique 35 Mt de farine par an, sous 600 références différentes. Les boulangeries artisanales (30 %) et industrielles (30 %) représentent les premiers utilisateurs de farine des membres de l'EFM. L'Allemagne (6.677.960 t/an), la France (5.474.278 t/an) et l'Italie (4.026.000 t/an) sont les premiers producteurs de l'UE. L. Legaignoux

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