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Alimentation animale
Quel positionnement dans la filière ?

Lors de ses “Journées Claude Thieulin”, l’Aftaa s’est questionnée sur la place du fabricant d’aliments composés dans la chaîne agroalimentaire

“QUEL AVENIR pour les productions animales françaises ? Quelle place pour le fabricant d’aliments composés ?”, tel est le thème de la table ronde qui a clôturé les deux “Journées Claude Thieulin”, consacrées aux marchés des matières premières agricoles (cf. notre article en Une de notre édition du 30 novembre) et organisées par l’Association française des techniciens de l’alimentation et des productions animales (Aftaa). Les professionnels de la nutrition animale sont aujourd’hui malmenés à la fois par leur amont et leur aval, et en recherche d’un nouveau positionnement dans leur filière. Pourront-ils devenir force de proposition en terme de produits et de services pour relever les défis de demain ? C’est la question à laquelle ont tenté de répondre des représentants des différents maillons de la chaîne agroalimentaire.

La notion de filière au cœur des débats

Pour Olivier Lapierre, directeur du Cereopa, le Centre d’étude et de recherche sur l’économie et l’organisation des productions animales, « le fabricant d’aliments composés n’appartient pas uniquement au secteur spécifique de l’alimentation du bétail ». Le professionnel de la nutrition animale « doit davantage se positionner comme un acteur de la chaîne de valeurs », que représente la filère agroalimentaire. Un avis partagé par Christian Bluard, directeur de Techna France, la firme service spécialisée en nutrition et techniques animales : « Le fabricant d’aliments composés doit tout faire pour apporter de la valeur. Il doit être inventif de progrès technique, économique et dans le domaine de la sécurité sanitaire et alimentaire. » Ainsi, pour ce dernier, « le rôle de l’innovation n’est pas une fin en soi, mais le moyen de gagner en compétitivité ». Elle apparaît comme un des facteurs de différenciation obligatoire du fabricant d’aliments composés. Dans cette démarche de progrès, trois domaines peuvent être explorés, explique Christian Bluard : l’utilisation de solutions à base de substances d’origine « naturelle » d’efficacité prouvée ; l’approffondissement de la connaissance fine de la valeur nutritionnelle des matières premières ; la mise au point d’outils informatiques de simulation du fonctionnement technico-économique d’une filière et d’aide à la décision pour le choix des paramètres.

Développer les partenariats tout au long de la chaîne de valeurs

Cette production de valeur ajoutée ne peut se faire sans le développement de partenariats tous azimuts. L’aval de la filière agro-alimentaire, c’est-à-dire « le consommateur et ces démons de la grande distribution », ne doit plus être considéré par les fabricants d’aliments composés comme ceux « qui nous imposent des choses et nous font du mal », affirme avec un brin d’humour Pascal Lebert, directeur marketing de Gastronome, troisième intervenant du marché français de la volaille. Et Christian Bluard de renchérir : «Il y a un certain nombre d’attentes de la part des consommateurs auxquelles nous n’avons pas su répondre car notre approche du marché est principalement zootechnique. Aussi ces besoins sont-ils devenus des obligations, imposées par l’aval », et se sont traduites par la multiplication des cahiers des charges. À l’origine de ce déferlement de contraintes, le problème de la compréhension de la demande originelle du consommateur. « On a été assez passif vis-à-vis des attentes des consommateurs : on les a ignorées voire combattues. Aujourd’hui, il nous faut les décrypter, les comprendre et être force de proposition », affirme le directeur de Techna France. Le représentant de la société Gastronome acquiesce : « On attend de vous un aliment qui permette d’élaborer des produits plus performants dans le but de répondre aux demandes du client final afin de le fidéliser. Il faut aller dans le sens du consommateur : c’est peut-être de l’opportunisme mais c’est la réalité. »

Pour ce faire, il faut abandonner cette tentation du « chacun se débrouille dans son coin », qui prévaut aujourd’hui, comme le souligne Pascal Lebert. Un travail de partenariat est nécessaire entre les différents acteurs de la filière agroalimentaire. Il faut raisonner « chaîne de valeurs de la filière » dans sa globalité, « tout en respectant les chaînes de valeurs de chaque maillon », prévient-il.

Nécessiter d’organiser la filière pour une meilleure représentativité

Reste qu’un véritable « travail de lobbying est nécessaire pour expliquer [au consommateur] que la filière peut être mue par autre chose qu’une logique purement économique et technique », affirme avec conviction le représentant de Gastronome. « Il va falloir mettre en place un mode organisationnel de la filière, autrement dit, concevoir des logiques de filière organisée, telles que des “Comités interprofessionnels” », insiste-t-il.

Mais il ne s’agirait pas d’oublier « le monde parallèle au secteur industriel, qui est celui de la politique », met en garde Yvan Lacroix, président-directeur-général d’Aquinac, l’As-sociation québécoise des industries de nutrition animale et céréalières. « Il faut être “pro-actif” [auprès des institutions gouvernementales], afin de devenir incontournable vis-à-vis de ceux qui veulent imposer la loi », déclare avec conviction le représentant interprofessionnel d’outre-Atlantique, fort de l’expérience acquise par les fabricants d’aliments composés de son pays.

La voix semble donc toute tracée pour les professionnels de la nutrition animale français. Mais les fabricants d’aliments composés hexagonaux sont-ils prêts à s’unir avec les autres acteurs de la filière ? Rien n’est moins sûr, eux qui ont déjà tant de mal à s’entendre au sein de leur propre profession. En témoigne, l’échec de la tentative de rapprochement opéré par leurs représentants syndicaux, le Syncopac (secteur coopératif) et le Snia (secteur privé).

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