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« Produire plus et affronter des contraintes nouvelles »

La Dépêche-Le Petit Meunier : Les producteurs semblent se diriger de plus en plus vers le prix de marché pour commercialiser tout ou partie de leur récolte, au détriment du prix moyen ou construit proposé par leurs coopératives, afin de bénéficier d’opportunités de marché. Est-ce une bonne chose selon vous ?
Philippe Pinta : Le phénomène n’est pas aussi tendanciel qu’il pourrait y paraître à première vue. Les pics de cotations que nous avons connus depuis quelques campagnes provoquent une attirance vers le prix de marché, mais il faut relativiser. Dans leur grande majorité, les agriculteurs recherchent la sécurité et font confiance aux coopératives pour valoriser au mieux leurs récoltes. Ceux qui testent la vente au prix de marché – le plus souvent accompagnés par leurs coopératives, qui jouent le jeu tout en les mettant face à leurs responsabilités – en mesurent vite aussi les aléas. Ils ne sont pas insensibles non plus aux comparaisons que publient les coopératives entre leurs prix moyens et la moyenne des prix obtenus par les adhérents qui vendent au prix de marché. Les prix moyens supportent parfaitement ces comparaisons. De telles évolutions sont plutôt positives, finalement. C’est toujours bien qu’il y ait de la pédagogie sur le fonctionnement du marché et sur la formation du prix. Que cette pédagogie passe par des expériences nouvelles de vente des récoltes n’est pas dérangeant, dès lors que cela reste raisonnable.

La Dépêche-Le Petit Meunier : S’agissant de l’évolution de la loi sur le certificat d’obtention végétale et du cas spécifique des semences de ferme, comment souhaitez-vous prendre part aux discussions pour organiser les modalités du versement d’indemnités aux semenciers ?
P. P. : Produire plus pour pouvoir répondre à l’accroissement des besoins en ayant à affronter des contraintes nouvelles –climatiques, environnementales, concurrentielles– nécessite que nous disposions de semences productives. Il faut de nouveaux programmes de sélection végétale et nous voulons participer à la définition de leurs orientations. Il s’agit là de poursuivre et conforter ce que nous faisons déjà depuis dix ans dans le cadre du Fonds de soutien à l’obtention végétale (FSOV) géré à l’intérieur du Gnis et alimenté par une partie de la CVO Recherche perçue sur les livraisons de blé tendre. Rappelons que la mise en place de cette CVO en 2001 a permis aux agriculteurs de continuer à utiliser des semences de ferme en blé tendre alors que cette pratique était déclarée illégale et sévèrement condamnée par les tribunaux. La loi de fin 2011 sur le certificat d’obtention végétale ne fait que consolider cette évolution. Enfin, avec ce système de CVO, c’est une formule simple et juste pour les agriculteurs, protectrice des données relatives à leurs assolements et peu coûteuse à gérer administrativement, qui a été privilégiée, comme nous l’exigions dans nos négociations avec les semenciers.

La Dépêche-Le Petit Meunier : A quelques mois de l’élection présidentielle, qu’attendez-vous des candidats ?
P. P. : Nous voulons que nos politiques reconnaissent la valeur stratégique du potentiel de production de notre secteur face aux défis que doit relever le monde. Nous leur demandons de se montrer confiants dans notre capacité à exploiter ce potentiel en respectant les préoccupations environnementales. Leurs discours sur ces sujets doivent être dénués de toute ambiguïté et assortis d’engagements précis.
Que les politiques veuillent encourager les circuits courts et le bio, pourquoi pas, ceux-ci ont leur place. Mais qu’ils tiennent par ailleurs un langage de vérité sur les mérites et qualités de l’agriculture que nous pratiquons. Sinon, ils se condamneront à donner des gages aux adeptes de la dé-production et à s’enfoncer dans une réglementation-spectacle toujours plus destructrice de l’atout que représente pour la France sa production de grains.
Concrètement, nous attendons des candidats qu’ils s’engagent à agir en faveur d’une recherche hautement performante dans le domaine de la génétique végétale, qu’ils ne ferment la porte à aucune technologie a priori. Nous leur demandons aussi de se prononcer en faveur d’une politique d’irrigation à la mesure des ressources mobilisables en France, notamment dans le cadre d’un vrai programme de création de retenues d’eaux hivernales. En matière de fertilisation, de produits phytosanitaires et de pratiques culturales, nous leur demandons de faire prévaloir la science, ainsi que l’intelligence qu’apporte la concertation, plutôt que des slogans et des concepts simplistes.
Enfin, nous attendons des candidats qu’ils plaident en faveur d’une nouvelle Pac ambitieuse pour nos productions, pour leurs débouchés. Une nouvelle Pac qui soit donc dotée d’un budget maintenu et assise sur des instruments de régulation des marchés et de soutien efficaces.

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