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Logistique/Nutrition animale
Livraison d'aliments pour animaux : innover par l'organisation

Se poser de nouvelles questions

Le matériel de livraison des aliments pour animaux en vrac a évolué continuellement depuis trente ans, dans le sens de l'augmentation des volumes et des charges utiles. La sécurité a également motivé l'innovation, avec l'arrivée des commandes électriques au début des années 90, suivie de la radiocommande pour lutter contre les risques électriques (lignes haute tension). Sans oublier la qualité puisque transporteurs à chaîne, vis racleuses et dégagement des compartiments se sont progressivement installés et réduisent quasiment à néant les risques de contaminations croisées entre lots successifs. Les premières solutions de traçabilité datent, quant à elles, des années 90. Si les carrossiers font évoluer leurs citernes, la réglementation est un des moteurs ma-” jeurs de l'évolution. Les textes régissant le 44 t ne concernent ainsi pas uniquement l'augmentation de la charge utile. Les moteurs doivent évoluer : l'euro 3 ne sera plus autorisé après le 30 septembre 2014 et l'euro 4 doit disparaître le 30 septembre 2017. Ne seront ensuite autorisés que les euro 5 et euro 6. Dans le même temps, le poids total roulant autorisé (PTRA) du moteur, tracteur ou porteur, doit être obligatoirement de 44 t et, depuis le 1er janvier dernier, les suspensions sont exclusivement pneumatiques sur l'essieu moteur.

La réglementation est un moteur majeur de l'évolution du matériel roulant.

Se poser de nouvelles questions

« Les nouvelles contraintes imposent de prendre en compte la question des surcharges sur le tracteur », affirme Christian Blais du carrossier Vrac+. Intervenant lors de la session “Livraison en élevage” organisée par l'Aftaa, il conseille ainsi d'éviter d'acheter des tracteurs avec de grands réservoirs (la capacité peut aller jusqu'à 1.200 l) ou de ne pas faire le plein complet et, dans tous les cas, de modifier la logique de chargement/déchargement. Le report de charge peut en effet, en fonction de la répartition des charges par rapport au centre de gravité de la citerne, conduire à dépasser les 11 t sur l'essieu avant. « Sur une semi-remorque classique à 8 ou 9 compartiments de 53 m2 environ, mieux vaut commencer par décharger les compartiments de devant pour éviter le risque, en commençant par livrer les compartiments arrière, de reporter trop de poids sur le tracteur. »

Au total, le passage de 40 à 44 t assure néanmoins un vrai gain logistique, même s'il n'est pas toujours aisé de le répartir entre chargeur et transporteur dans les cas d'externalisation des flottes.

Externaliser uniquement les camions ?

Le management des livraisons fait en effet largement appel à l'externalisation en France, jusqu'aux trois quarts dans la région Sud-Ouest, par exemple. Outil de flexibilité, elle peut prendre d'autres formes que la classique externalisation camion/chauffeur. C'est à l'issue d'une réflexion stratégique que Soréal a ainsi choisi de n'externaliser que les véhicules, conservant ses chauffeurs salariés, qui plus est sous la convention collective non pas des transports mais de la meunerie.

« L'Écotaxe nous a tous forcés à réfléchir nos coûts de transport et notre organisation logistique. La gestion des flux se raisonne de façon économique aujourd'hui et devra aussi demain intégrer l'enjeu écologique. Le transport, jusqu'à récemment considéré comme un mal nécessaire, est devenu un enjeu stratégique pour les entreprises dans un contexte d'effet ciseau : les volumes baissent et les coûts augmentent avec les contraintes réglementaires et les taxes, pointe Sylvain Baudry, directeur logistique et industriel du groupe Soréal. Il faut s'extraire des normes professionnelles pour redéfinir la juste valeur du transport comme de tout service. À qualité équivalente attendue par le client, son choix est désormais exclusivement basé sur le prix. » Il a donc remis à plat toute sa logistique en s'appuyant sur le concept de BBZ (budget base zéro). « Si le client trouve que la valeur de mon service est trop élevée, c'est lui qui a raison à condition que mes concurrents parviennent à le fournir à ce prix. Sinon, il a tort », résume le dirigeant. La base de la méthode consiste à découper toute la logistique en postes et à déployer le concept d'“intra-prise” : chaque poste de charge est fournisseur du suivant et client du précédent. L'idée est de mettre en perspective la valeur ajoutée de chaque poste en se posant à chaque fois la question : le “client” (interne ou externe) va-t-il payer mon service plus cher si je réalise cette activité ? Si la réponse est non, pourquoi ne pas la supprimer ? Sylvain Baudry recherche donc l'efficacité attendue par le client au coût minimum, pour chacun des postes.

Audit énergétique : un dossier à venir

Résultant d'une directive européenne (2012/27), l'obligation d'un audit énergétique des activités industrielles et des transports s'impose aux entreprises de plus de 250 personnes et/ou de 50 M€ de chiffre d'affaires. Elles doivent en effet s'assurer, selon l'article 8 de cette nouvelle directive, de l'efficacité énergétique de leurs installations. Le premier audit, qui devra être ensuite renouvelé tous les quatre ans, doit avoir lieu avant fin 2015. La discussion est en cours avec le ministère de l'Environnement pour introduire des guides sectoriels afin d'aider les entreprises à mettre en place ces audits. La norme NF EN 16247-4 “Audit énergétique/transport” pourrait servir de socle. Sa publication est attendue, par la profession, en août prochain.

Les camions n'ont pas besoin de vacances

Chaque charge afférente à la logistique (ressource humaine, ressource matérielle, environnement et exploitation de l'ensemble) doit être maîtrisée, tout en appréhendant les contraintes (légales, techniques ou stratégiques) et les allocations disponibles. Conducteur, carburant et véhicule pèsent en effet environ 80 % des coûts. C'est par ces postes qu'il faut commencer.

Pas la peine de dépasser le niveau d'efficacité que le client est prêt à payer ni de s'imposer de fausses contraintes. « Par exemple, en travaillant sur la qualité, nous sommes passés d'une anomalie de livraison toutes les 900 t à une anomalie toutes les 12.000 t. Chez nous, c'est un palier. Aller plus loin dans la “sur-qualité” ne présente aucun intérêt pour les clients qui ne veulent pas payer pour les investissements qu'il faudrait réaliser pour passer ce cap. » Autre exemple, le matériel de livraison. Est-il nécessaire de choisir un super camion avec un moteur de puissance maximale ou de trop gros réservoirs ? Ils vont alourdir le prix d'achat comme le poids du camion. Idem pour les options et équipements.

La plus grosse économie est probablement liée aux conditions d'utilisation. Classiquement, un camion va tourner 10,5 mois sur 12, 5 jours sur 7, 9 heures par jour (soit 227 “postes chauffeurs” par an). Dans ces conditions, il pourra difficilement faire plus de 360 km/jour, soit environ 81.000 km/an (ce qui est justement la moyenne française). En prenant un “standard” de 7,2 km/t, une usine de 100.000 t aura besoin de 8,8 camions. Or, le matériel de livraison peut tourner 12 mois sur 12 et 6 jours sur 7, car les camions n'ont pas besoin de vacances. Ils peuvent aussi livrer le samedi, voire en 3 x 8 dès que l'on fait sauter les “fausses” contraintes telles qu'un chauffeur par camion ou pas de livraison de nuit. Dans l'absolu, un camion pourrait donc tourner sur 918 postes chauffeurs, soit 960 km/jour ou bien encore 213.000 km/an…

En optimisant absolument toute sa gestion, la même usine de 100.000 t n'aurait alors plus besoin que de… 2,5 camions ! Soit 72 % d'économie ne serait-ce que sur les charges fixes… Les conditions réalistes sont médianes, il est en effet difficile de faire tourner tous les camions 6 jours sur 7 et en trois postes tous les jours. Si les 72 % d'économie semblent donc difficilement réalisables, se fixer un objectif à la moitié est parfaitement réaliste.

Conducteur, carburant et véhicule pèsent environ 80 % des coûts de logistique.

” Autre exemple, le conducteur qui représente 30 à 45 % du budget. La convention collective du transport semble la plus flexible en autorisant un quota important d'heures supplémentaires. Mais ces dernières coûtent cher sans oublier les repos compensateurs : pour 195 h réellement produites, l'entreprise en paye finalement 218 h. Cela représente 12 % d'heures rémunérées non produites (une heure à 10,5 € est finalement payée 11,76 €). « Je préfère conserver la convention de la meunerie : pour un camion qui travaille en 3 x 8, 6 jours sur 7 (soit 144 heures par semaine), on peut employer 4 conducteurs sans heures supplémentaires, donc chaque heure payée est bien une heure produite à 10,5 €. » Là aussi, la décision a été médiane et Soréal conserve, pour sa flexibilité et son attrait social, un petit volant d'heures supplémentaires permis par la convention de la meunerie.

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