Les légumineuses, enjeux économiques et écologiques
Les légumineuses ont de l’avenir, ont assuré les orateurs venus plaider la cause de la luzerne et des légumes secs à l’Académie d’agriculture de France, le 22 février. Démonstration à l’appui.
Des obstacles ont gêné la croissance des légumineuses en France, a noté Alban Thomas, économiste à l’Inra, évoquant le verrouillage des choix effectués il y a vingt ans. « Toute solution retenue emporte des soutiens croissants, qui la rendent performante », a expliqué le chercheur devant l’Académie d’agriculture de France. Délaissées par la Pac, les légumineuses constituent moins de 2 % des assolements en grandes cultures, et sont peu consommées en alimentation animale. L’avantage donné au soja importé et aux céréales a perduré.
« Des leviers sont à actionner en régulation des marchés, identification des débouchés, fédération des acteurs pour valider le choix de production des légumineuses », estime-t-il. Le verdissement de la Pac remet en selle ces espèces mineures, et le paiement vert du deuxième pilier offre des marges de manœuvre. Hervé Durand, directeur de la performance économique au ministère de l’Agriculture, a pointé des orientations peu axées sur les systèmes de production, tout en notant qu’elles ont relancé le colza. « On a fait feu de tout bois pour réduire notre dépendance », a-t-il admis. Avec le retour de l’aide couplée soja et plantes fourragères, la baisse des surfaces en légumineuses est endiguée, selon lui.
Un exemple d’autonomie alimentaire
La démonstration d’une agricultrice de Mayenne, Marie-Françoise Brizard-Pasquet, a emporté les suffrages. Depuis dix-sept ans en agriculture raisonnée, elle produit 100 t de protéine brute par an, 40 t de blé et 826 t de matière sèche, sans engrais azoté sur 102 ha, et nourrit 110 bestiaux, dont 50 vaches laitières Prim’Holstein (340 000 litres/an). Comme la luzerne restitue plus d’unités azotées que le soja (1 000 contre 800) ou le maïs grain sur la rotation, elle en sème désormais 21 ha. Se décrivant comme un profil « conscient », elle donne « priorité aux légumineuses au service de son troupeau », pour alimenter une demande qualitative. « Le secteur de la transformation doit aussi valoriser la biomasse fourragère pour extraire des protéines bioénergétiques », a souhaité Christian Huygue, membre de l’Académie.