Semences
Le triage à façon se développe et se modernise selon une enquête du Staff
Le triage à façon (Taf) hors exploitation agricole progresse selon une étude réalisée par l’agence DFIPresse et Columnae à paraître au mois de mai. Selon cette enquête commandée par le Staff, (Syndicat des trieurs à façon de France), « la part de semence de ferme traitée directement par les agriculteurs ou groupements d’agriculteurs tend à se réduire » au profit d’entreprises spécialisées dans le tri et la préparation de semences fermières. Une tendance qui confirme l’engouement des producteurs de céréales pour les semences fermières (SF) face aux semences certifiées (SC), dont la part en blé tendre d’hiver a encore reculé cette année à 51 %, selon les derniers chiffres du Gnis. Plus généralement, sur les 950.000 t de semences agricoles semées en 2011, 57,88 % étaient certifiées et 42,12 % automultipliées, pour un volume de 400.000 t. Parmi celles-ci, environ 200.000 t sont issues des travaux d’entreprises spécialisées, à 60 % par des entrepreneurs spécialistes adhérents du Staff (120.000 t), et 40 % par d’autres spéciaslistes (coopérative et négoce esssentiellement, pour 80.000 t) selon l’enquête à paraître.
Une filière très dynamique
« Nous entrons dans une phase nouvelle, c’est une tendance lourde », assure Sylvain Ducroquet, président du Syndicat des trieurs à façon de France. Progressivement, les agriculteurs font davantage confiance aux entreprises spécialisés en Taf. « L’activité de triage à façon des coops et des négoces progresse également, mais moins vite que celle des entreprises spécialisées, tandis que la part réalisée par les agriculteurs eux-mêmes recule, compte tenu des contraintes au niveau des phytosanitaires et des poussières », estime Sylvain Ducroquet. Selon l’enquête, « 53 % des professionnels des entreprises spécialisées de tri-préparation de semence adhérentes au Staff, déclarent une activité en croissance en 2011, 47 % déclarent une activité stable ». Le nombre de leurs clients augmenterait pour 50 % d’entre elles et serait stable pour 47 %, quand 3 % observent un recul. Le dynamisme serait plus franc pour les entreprises les plus importantes.
En 2011, toujours selon l’enquête, 38 % des entreprises du Staff ont embauché, et 66 % prévoient de le faire en 2012. L’investissement n’est pas en reste avec « 5 % de machines supplémentaires en 2011 ». Pour l’année 2012, « 48 % des entreprises prévoient d’investir dans du matériel nouveau ».
Une tendance que confirme Alain Dorez, patron des ateliers Dorez, spécialisés en matériel de triage à façon : « Nous vendons environ 30 machines par an, ce chiffre est plutôt stable, mais les débits, eux, progressent ».
Progression des débits et sécurisation
Cet attrait pour le triage à façon et la distribution des semences fermières peut s’expliquer par une nette amélioration du service offert par les entreprises du Staff. « Les machines permettent des débits très supérieurs à ce qui se faisait il y a quelques années. Elles peuvent atteindre 15 t/h, pour une moyenne autour de 5/6 t/h » explique Alain Dorez.
Les outils ont également gagné en précision, « proche de ce que l’on voit en semences certifiées » assure-t-il. La sécurité s’est également améliorée avec « une large utilisation du système d’injection directe de la bouillie à appliquer sur les grains », qui séduit beaucoup d’agriculteurs.
Un développement qui soulève la question du financement de la recherche
Seul bémol à cette croissance, la baisse du financement de la recherche variétale qui en découle, notamment en blé tendre d’hiver, dont les SC reculent chaque année au profit des SF. Or, ce sont les ventes de SC qui permettent de financer la recherche. La CVO prélevée sur les SF étant moins élevée que les droits sur les ventes de SC, il y a un manque à gagner pour la recherche en blé tendre. « Certains agriculteurs veulent ressemer une partie de leur récolte et sont attachés à cette liberté. Je les comprends. Mais le mode de financement de la recherche, et sa répartition entre SF et SC créent une distortion de concurrence injuste entre les trieurs à façon et les stations de semences certifiées », estime Jean-Paul Moreau, chef Marché Semences chez Soufflet Agriculture. Et d’ajouter que le marché a aussi besoin de blé issu de SC puisque de nombreux cahiers des charges de l’industrie l’exige, notamment pour des questions de traçabilité et de qualité. D’autre part, « la semence certifiée est un moyen pour renouveler la génétique en terme de rendement ou de résistance aux maladies », explique J-P. Moreau. Il s’agit aussi d’assurer « la compétitivité de la ferme France avec la création de nouvelles variétés », d’où l’intérêt de participer à l’effort de recherche. « Les obtenteurs doivent trouver un système qui permette une équité au niveau de la participation de chaque utilisateur », estime t-il. De son côté, Sylvain Ducroquet se dit « pour le financement de la recherche et prêt à discuter des modalités de son financement ». « Il y a des espèces sur lesquelles nous accepterions une CVO comme le pois. » Et de conclure : « Pour mieux organiser tout ça, le Staff devrait bénéficier d’une représentation au sein d’une interprofession. »