Marchés
« L’agriculture doit évoluer pour reconstituer les stocks » de matières premières
« Il y a actuellement une tentation de sortir des matières premières chez de nombreux investisseurs », a rapporté Stéphane Wrober de la société Diapason (basée en Suisse), lors d’une conférence organisée par Nyse-Euronext, le 15 janvier. « Nous pensons qu’il faut y revenir au contraire. » Pour le dirigeant de la société de gestion d’actifs, l’Asie et les pays émergents (notamment en Amérique du Sud), devenus les principaux acteurs dans la formation des prix, vont poursuivre leur croissance et tirer le marché des matières premières (MP), productions agricoles comprises. En 2013, les analystes de Diapason misent sur une reprise de la croissance chinoise, dont le gouvernement avait limité l’ampleur l’an dernier, « essentiellement en raison de la bulle immobilière, de l’inflation des prix dans le pays et d’une certaine crainte après le printemps arabe ».
L’agriculture en retard pour assurer un équilibre du marché
Le prix d’une MP est un signal fort pour les producteurs et les consommateurs, qui ajustent leurs capacités en fonction de ce critère. Si certains milieux réagissent assez vite aux déséquilibres de marché, « le secteur agricole est encore en retard », pour Stéphane Wrober. La hausse des MP n’a rien de nouveau. Depuis 1900, quatre périodes d’extrême fermeté se sont succedées, la dernière ayant démarré au début des années 2000 sur tous les produits (métaux, énergies, MP agricoles…), et se poursuit encore. L’émergence de nouveaux pôles de forte consommation comme la Chine, l’Inde et l’Amérique du Sud a tiré l’ensemble des prix des commodities à l’échelle mondiale. Or, les grandes zones de production agricole en Europe et aux États-Unis, qui jusqu’ici se focalisaient essentiellement sur leurs propres besoins, n’ont pas encore suffisamment évolué pour répondre à la demande mondiale. Certes, de nouvelles puissances agricoles (Brésil et Argentine) sont nées, mais cela reste insuffisant au regard de la demande planétaire. « L’équilibre passera par une reconstruction des stocks. Il y a un besoin de produire différemment, mais le processus est lent. En Amérique du Sud, le secteur est très jeune concernant l’accès au capital. Et, plus généralement, le métier de fermier n’est pas assez rentable à l’échelle mondiale. L’agriculture doit attirer de nouvelles populations pour redynamiser le secteur. »
Enfin la question climatique, propre à l’agriculture, reste déterminante. « Le cycle des sécheresses durant entre deux et sept ans, les États-Unis, la Russie ou l’Australie ne sont pas à l’abri de nouvelles conditions sèches », complète Stéphane Wrober.