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Politique
Congrès de la FNSEA : opération séduction du monde agricole par Nicolas Sarkozy

Après le ratage du Sia, le président a cherché à reconquérir l’agriculture

Difficile d’en faire plus. Ce 2 avril, le président Sarkozy, lors de son intervention au congrès de la FNSEA, a joué sur la corde sensible, vantant les valeurs d’un monde agricole à qui il dit « merci ». Merci de créer 64 milliards d’euros de valeur ajoutée en 2007 au niveau du commerce extérieur. Merci de défendre des « valeurs modernes »… Même si le président s’est défendu d’être venu « pour dire que les agriculteurs étaient beaux », il n’a pas dit autre chose, esquivant les sujets qui fâchent, comme les OGM. Sur le fond, Nicolas Sarkozy a donné l’impression de temporiser, conscient que « la rupture stratégique » dès 2008, qu’il avait défendue le 11 septembre à Rennes au sujet de la Pac, n’a pas provoqué « un enthousiasme délirant » de la part de ses partenaires européens. Mais le 2 avril, de « rupture » si chère au président Nicolas Sarkozy, il n’était plus question lors de son intervention au congrès de la FNSEA à Nantes. Le président, dans son allocution devant quelque 600 congressistes réunis à Nantes, a juste plaidé pour une « simplification durable de la Pac » qui permette à la France d’être prête pour les échéances de 2010 et 2013. Conscient que la « rupture stratégique » dès 2008, qu’il avait proposée en septembre dans son discours de Rennes, n’a pas provoqué « tout de suite un enthousiasme délirant » de la part des partenaires de l’Europe, il a donné le sentiment de temporiser, rendant d’ailleurs un hommage appuyé au ministre de l’Agriculture Michel Barnier, qui a compris « que pour réussir, il faut avoir des alliés » au sein de l’Europe. Ironie de l’histoire, Michel Barnier est aussi le ministre qui défend une nouvelle diplomatie européenne et refuse « l’arrogance française ». Nicolas Sarkozy était visiblement sur cette ligne. « José Manuel Baroso est un partenaire loyal », a-t-il ajouté, abandonnant toutes ses attaques habituelles sur le « conservatisme » et « l’immobilisme ». Bref, la tempérance a succédé à l’impatience.

Pas de références historiques

Au nom de la « cohérence » et de la « légitimité » de la Pac, il estime que le principe des références historiques déterminant les DPU perçus par les agriculteurs « ne veut plus rien dire ». « En quoi aider un agriculteur sur la base de son travail réalisé entre 2000 et 2002 sera légitime en 2013 ? », s’interroge le président. Même perplexité quant aux soutiens à l’élevage, dont le « dispositif est figé depuis 1992 ». « Le système ne fonctionne pas bien », résume-t-il. Et il prévient : l’objectif de cette réforme n’est pas « d’adapter, pour chacune des filières françaises, les outils du passé aux conditions économiques de 2008 ». Le chef de l’État donne quatre objectifs à « sa nouvelle ambition pour l’agriculture en Europe ». Il s’agit « d’assurer la sécurité alimentaire » ; « de participer aux équilibres alimentaires mondiaux » ; « de contribuer à la lutte contre le changement climatique » et de « préserver les équilibres de nos territoires ». Ces quatre objectifs, qui passent notamment par « une préférence communautaire renouvelée reposant sur la promotion des normes sanitaires et environnementales aussi bien au sein de l’UE qu’à l’OMC », sont ceux déjà évoqués mot pour mot lors de son intervention au Salon de l’agriculture en février dernier. Tout comme la position française à l’OMC qui exige la « réciprocité » et « l’équilibre » dans les négociations. Rien de neuf. « On ne gagnera pas à Genève, prévient le président français, mais on peut perdre ». Face aux États-Unis qui défendent « avec tant de passion et d’efficacité » leur agriculture, il appelle l’Europe « à ne pas faire preuve de naïveté ».

Un système absurde

Par contre, le chef de l’État est allé plus loin dans son propos concernant la réforme sur la négociabilité des conditions de vente. Nicolas Sarkozy assure que « la loi de modernisation de l’économie permettra de sortir du système absurde des marges arrières et de nous calquer sur un système qui existe dans la plupart des pays développés ». Mieux, « ce ne sera pas la loi du plus fort, puisque l’interdiction de la revente à perte sera maintenue ». Une promesse destinée à faire disparaître l’inquiétude de la FNSEA. « Nous mettrons en place cette réforme avec tous les garde-fous nécessaires pour le secteur de l’agroalimentaire », a promis le président. Il a toutefois mis les agriculteurs devant leur propre responsabilité car il ne s’agit pas « de se cacher la vérité face à une négociation commerciale qui sera toujours un rapport de force ». « L’enfer ce n’est pas que les autres », a-t-il lancé, appelant les agriculteurs à se structurer. « Cela doit vous permettre de consolider vos positions, notamment par la contractualisation », a-t-il ajouté. Surtout il a exhorté les agriculteurs « à ne pas s’enfermer dans un ghetto, en se réfugiant derrière la ligne Maginot ». Nicolas Sarkozy a remercié la FNSEA « d’avoir joué le jeu de l’environnement » dans le cadre du Grenelle. Il a évoqué l’ « estime » qu’il portait à Jean-Michel Lemétayer et à la FNSEA. « La France a besoin d’organisations syndicales fortes qui construisent l’avenir », a expliqué le chef de l’État. Dans cette logique, il s’est employé à éviter les sujets qui fâchent, alors que l’examen du projet de loi débutait à l’Assemblée nationale. Cette opération séduction a visiblement réussi.

Une première

Il s’est aussi expliqué sur cette première que constitue la venue d’un chef de l’État à un congrès de la FNSEA. « Je m’étonne d’être le premier président de la République à m’exprimer devant vous », a-t-il lancé à la salle. « L’agriculture fait partie de l’identité française (…) C’est un secteur de pointe », a rappelé le président. En plus, la France assumera la présidence de l’Europe en juillet 2008. « Si cela n’est pas du niveau d’un chef de l’État, alors je ne sais pas ce qui le serait », a-t-il lancé à l’assistance, visiblement ravie d’être ainsi considérée par le plus haut personnage de l’État. Ce dernier, enfonçant le clou, a, en plus, « remercié » les agriculteurs pour leur action positive sur l’économie. « On ne devient pas par hasard le premier exportateur mondial pour les produits agricoles transformés », a-t-il souligné. On sait, pourtant, que son intervention n’était pas vraiment souhaitée par les instances dirigeantes de la FNSEA. François Fillon, le Premier ministre, plus “ terroir ”, lui était préféré. Jean-Michel Lemétayer ne s’est d’ailleurs pas gêné pour dire dans son propos introductif au discours de Nicolas Sarkozy qu’ « il était encore chez lui », tant le discours du président Sarkozy en plein milieu des travaux du congrès ce mercredi ne semblait pas aller de soi.

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