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Guerre en Ukraine - Les négociations se poursuivent pour reconduire l’accord sur le corridor "mer Noire"

Les Russes accusent l’Occident de ne pas respecter un autre accord signé sur les engrais. L’accord initial sur les grains se termine le 18 mars 2023.

Un point sur lequel tout le monde est d'accord : les exportations ukrainiennes sont capitales pour la sécurité de l'équilibre alimentaire mondial.
© Igor2008/Pixabay

Les négociations se poursuivaient ce vendredi après-midi à 15h30, à Genève notamment, sur la reconduction de l’accord concernant l’exportation des céréales ukrainiennes, en raison de la situation issue du conflit entre la Russie et l’Ukraine. L’accord en vigueur, mis en place en novembre 2022, doit se terminer le 18 mars 2023 et comporte une clause indiquant que sa reconduction doit porter sur une période de 120 jours. Un premier accord avait déjà été signé sous l’égide de la Turquie et des Nations-Unies le 22 juillet 2022.

"Les discussions sont en cours", a déclaré la porte-parole des Nations unies à Genève, Alessandra Vellucci, lors d'un point de presse régulier ce vendredi 17 mars, tout en indiquant que « c'était aux pays de se mettre d'accord ». Elle a aussi tenu à préciser que Antonio Guterres, le patron de l’ONU, était lui-même engagé dans ces discussions.

« Cet accord est très important pour l’équilibre alimentaire mondial et on peut considérer que tant l’Ukraine que la Russie ont tout intérêt à le reconduire » a indiqué Marc Zribi, chef de l’unité grains et sucre chez FranceAgriMer, mercredi.

Les Russes ont confirmé être d’accord sur le principe de la reconduction mais en divisant sa durée par deux, ce qui le ramènerait à 60 jours donc. Lundi 13, des discussions avaient déjà eu lieu ente Martin Griffiths, Rebecca Grynspan, la cheffe de la Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement (Cnuced) et le vice-ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Verchinine.

Le fait de raccourcir la durée de l’accord « contredit donc le document signé » il y a quatre mois ont fait savoir les responsables ukrainiens, faisant planer sérieusement une ombre sur la reconduction de l’accord. Ils attendent désormais la « position officielle » des « garants » de l’accord initial (ONU et Turquie).

La Turquie justement a indiqué mercredi 15 mars, par la voix de son ministre de la Défense, vouloir travailler sur l’accord initial, et donc en faveur d’une durée de 120 jours. De son côté, la Chine a également émis un avis sur ce sujet : interrogée jeudi sur la proposition de la Russie d'une prolongation de 60 jours, elle a appelé à ce que l'accord soit mis en œuvre de manière équilibrée et globale, sans autres précisions.

Selon Alexandra Prokopenko, de la fondation Carnegie Endowment for International Peace, la Russie ne semblerait pas en capacité de vraiment peser sur cette reconduction dans la mesure où elle dépend fortement de la position de la Turquie et de la Chine sur ce sujet. Moscou ne serait donc pas prêt à aller au clash.

Accord céréales contre accord engrais ?

Le hic, c’est que les Russes se disent non satisfaits d’un autre accord, sur les céréales aussi mais surtout sur les engrais, signés à l’été 2023. Les engrais ne sont pas directement frappés par les décisions de sanctions prises par les alliés de l’Ukraine mais lesdites sanctions gênent considérablement l’acheminement des engrais russes vers leurs pays destinataires. Selon Moscou, les mesures financières ont eu pour effet indirect de dissuader des opérations d'intermédiaires craignant de tomber sous le coup de mesures de rétorsion aux Etats-Unis et en Europe. Pour Sergueï Verchinine, « les paiements bancaires, la logistique du transport, les assurances, le dégel des activités financières et l'approvisionnement en ammoniac via l'oléoduc Togliatti-Odessa » sont des points de discorde évidents entre la Russie et l’Occident. Dimitri Peskov, porte-parole du Kremlin, « il est évident qu'en gros (...) le deuxième volet de l'accord qui nous concerne n'a pas été appliqué jusqu'à présent ».

L’Egypte est le plus gros importateur de blé dans le monde, dont 80 % en provenance de Russie et d’Ukraine. Il est donc vital pour elle que l’accord soit prolongé.

Par ailleurs, autre argument mis sur la table par les Russes, ce mercredi, la décision de vouloir suspendre les conventions de double-imposition avec les pays dits "inamicaux", en réponse notamment à l'inscription de la Russie par l'UE sur sa liste noire des paradis fiscaux. Ceci vise en clair les pays qui ont introduit « des mesures économiques unilatérales contre la Russie ». Dans le communiqué publié par le ministères des Affaires étrangères et des Finances du pays, " il est proposé de suspendre ces accords jusqu'au rétablissement des droits violés de la Russie". A titre d’exemple, une convention de ce genre existe entre la France et la Russie, signée en 1996 et entrée en vigueur en 1999.

Enfin, autre considération qui peut peser dans les décisions, l’Agence internationale de l’énergie (AIE) a publié mercredi 15 mars son rapport mensuel sur le pétrole. Il en ressort que « les revenus pétroliers de la Russie ont baissé de 42 % sur un an en février sous l'effet des sanctions du G7 et de l'Union européenne, même si le pays commercialise plus ou moins toujours le même volume » avant de préciser : " nous estimons qu'en février la Russie a engrangé 11,6 milliards de dollars, comparé à 14,3 milliards en janvier et à près de 20 milliards un an avant ".

Pour mémoire, l’accord de sortie sur les céréales ukrainiennes a permis, jusqu’à ce jour, d’exporter 24,3 Mt de grains à partir des ports ukrainiens. Mais seulement « une toute petite partie » des 260 000 t d’engrais russes qui devaient être exportés, et qui sont stockés dans différents ports européens depuis le début du conflit, ont pu réellement être livrées. On peut citer ainsi quelques bateaux à destination du Kenya (34 000 t) ou encore du Malawi (20 000 t), sous l’égide du Programme alimentaire mondial.

 

 

 

 

 

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