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Muselières et harpes électriques : prévenir la pression de prédation du frelon à pattes jaunes à l’automne

Les frelons à pattes jaunes ou « Vespa velutina » peuvent impacter la préparation à l’hivernage et la survie des colonies les plus faibles. La muselière et la harpe électrique sont des outils qui vous aident à protéger et préserver la santé des colonies d’abeilles avec efficacité et écoresponsabilité.

Il y a presque 20 ans, le frelon à pattes jaunes était introduit en Europe par le biais du commerce international de poteries chinoises. La rapide expansion de ce prédateur d’abeilles domestiques menace l’apiculture européenne déjà soumise à de nombreux facteurs de déclin. Diverses méthodes de lutte ont été testées dans les ruchers afin de réduire son impact sur les abeilles en automne. La muselière et la harpe électrique présentent à la fois une réelle efficacité et un faible impact environnemental.

Réduction du stress des colonies d’abeilles en automne

La muselière est une protection individuelle qui peut réduire de 41 % la paralysie de la ruche stressée par la présence du frelon. Il existe plusieurs types de muselières (grillagées à mailles 8-10 mm, à tubes, etc.) qui fonctionnent toutes selon le même principe : éloigner les frelons de la planche d’envol afin de maintenir une activité normale d’entrée et de sortie des abeilles. La muselière a un effet local, à l’échelle de la ruche, car les frelons sont maintenus à distance sans être ni capturés ni tués.

Les harpes électriques sont quant à elles placées perpendiculairement entre les ruches ; idéalement disposées en ligne compacte (20-30 cm de séparation entre les ruches). Elles se composent de cadres munis de fils électrifiés parallèles verticaux qui produisent un choc électrique lorsqu’ils sont touchés par les frelons circulants entre les ruches. L’effet des harpes électriques est plus global car les frelons sont tués. À raison d’une harpe entre chaque ruche, la pression de prédation observée sur un rucher protégé peut être réduite de 89 % à l’échelle du rucher.
Ces dispositifs doivent être installés dès que les frelons se concentrent sur les ruchers, typiquement vers mi-août en France.

Faible impact sur la biodiversité

L’utilisation des muselières et des harpes électriques a un impact nul à faible sur les insectes non cibles. La muselière est un dispositif passif, non létal qui ne vise pas à capturer et/ou tuer. Par conséquent, elle n’a aucun effet non intentionnel sur les insectes non cibles. Concernant les harpes électriques, même si l’on ne peut pas éviter totalement la mort par électrocution d’insectes non cibles (exemple : abeilles, mouches), les effets non intentionnels sont considérés comme faibles car le frelon peut représenter plus de 90 % des insectes tués.

Coût économique modéré pour des ruchers de taille moyenne

L’installation de muselières ou de harpes électriques nécessite un investissement initial pour les apiculteurs qui va dépendre du nombre de ruches et du prix commercial du dispositif. Les muselières sont peu onéreuses (entre 20 euros et 30 euros l’unité) mais il faut équiper chaque ruche. De plus, leur encombrement nécessite de les retirer avant de charger les ruches pour une transhumance. Leur emploi peut être réservé aux ruches une fois installées sur leur emplacement d’hivernage. Le coût des harpes électriques est plus élevé, autour de 300 euros l’unité en comptant le système d’alimentation électrique. Pour réduire le coût global tout en préservant l’efficacité, il est proposé de placer une harpe toutes les deux ou trois ruches. Toutefois, cela reste certainement inabordable pour la protection des grands ruchers. Même si leur coût unitaire peut être réduit par une fabrication maison (de nombreux plans de fabrication et tutoriels sont disponibles sur internet), ces deux dispositifs de protection des ruches demeurent recommandables comme efficaces et respectueux de la biodiversité dans la protection des ruchers de taille moyenne. D’autres méthodes de lutte doivent encore être développées pour les grands ruchers et pour protéger efficacement les cheptels importants !

COTE BIBLIO

« Guide des bonnes pratiques apicoles : Le frelon asiatique. » Itsap : itsap.asso.fr
Requier, F., Rome, Q., Villemant, C., et al., 2020. Journal of Pest Science, 93, 1-9.
Rojas-Nossa, S.V., Dasilva-Martins, D., Mato, S., et al., 2022. Pest Management Science, 78 (12), 5142-5149.

COTE WEB

Retour sur le colloque en ligne de l’Itsap « lutter contre le frelon asiatique »

Témoignage de Julie Victoria, apicultrice, miellerie de Sulauze à Miramas dans les Bouches-du-Rhône (13).

« Quand la pression du frelon s’accroît, je déplace mes ruches »

Les niveaux de pression de prédation du frelon à pattes jaunes ont évolué depuis quelques années. Comment le vivez-vous dans les Bouches-du-Rhône ?

Julie Victoria - Depuis que j’ai commencé l’apiculture il y a environ quatre ans, j’ai le sentiment que la pression du frelon s’est accrue de manière exponentielle dans la région. Au début on observait simplement quelques individus, occasionnellement et ce n’était pas vraiment dérangeant… puis sur certains ruchers j’ai commencé à en voir de plus en plus fréquemment devant les ruches, à un ou plusieurs individus, et l’an dernier ils étaient là systématiquement. À l’automne dernier, ils étaient par centaines devant la miellerie, près des hausses à lécher !

À quelles solutions avez-vous eu recours face à cette augmentation ?

J. V. - J’ai d’abord posé des pièges, et même si cela est très utile, cela s’est rapidement avéré insuffisant. Les colonies sont stressées, les abeilles ne sortent plus de la ruche pour s’alimenter, et certaines essaiment sous la pression. En dernier recours, j’ai dû déplacer des ruchers vers des endroits moins impactés par le frelon…

C’est le niveau de pression de prédation qui vous amène à déplacer les ruches. Comment reconnaître le bon moment ?

J. V. - Je n’attends plus que les abeilles restent massées devant les entrées de ruches sans oser sortir. Dès que j’observe un à deux frelons devant chaque ruche, je bouge. D’expérience je sais que cela signifie qu’ils sont nombreux dans le secteur et que d’autres vont arriver… Mais il y a peut-être d’autres avis sur la question !

Quels sont les avantages du déplacement de ruches ?

J. V. - Cette démarche permet de réduire le stress des colonies, qui peuvent alors vaquer à leur travail de butinage.

Pour l’apiculteur c’est du travail de transhumance en plus…

J. V. - Oui et cela signifie aussi qu’à certaines périodes de l’année certains ruchers deviennent inexploitables, c’est le cas notamment de mon rucher le plus proche de la miellerie, ce qui est contraignant… Heureusement la pression du frelon n’est pas similaire sur tous les ruchers, pour l’instant, donc on arrive à jongler. De plus en plus d’apiculteurs dans le coin laissent leurs ruches sur les lavandes jusqu’à l’automne pour cette raison.

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