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De la hausse au pot : réussir la cristallisation de son miel

Il n’existe malheureusement pas de recette miracle pour réussir la cristallisation de son miel et les années de pratique valent mieux que des mots. Cependant, Bruno Camus, apiculteur, formateur et ingénieur agricole de formation nous livre les points de vigilances à connaître pour maîtriser cette étape avant la mise en pot.

Le miel est composé à 97 % de molécules de sucres et d’eau (80 % de sucres et entre 17 et 18 % d’eau). Les molécules d’eau et de sucres sont légèrement polarisées, ce qui explique que les unes s’orientent par rapport aux autres et s’organisent. Ces liaisons sont réversibles et peuvent être détruites par la chaleur ou le brassage, qui provoquent une vibration moléculaire.

Un miel cristallise plus ou moins rapidement en fonction de sa teneur en fructose et glucose car ces deux sucres n’ont pas la même solubilité. Le glucose étant moins soluble que le fructose, un miel riche en glucose cristallisera donc plus vite qu’un miel riche en fructose. Cependant, le miel étant un milieu sursaturé en sucre, il finira toujours par cristalliser : l’état liquide du miel est un état instable. D’autres éléments comme la température ou la teneur en eau influent également la vitesse de cristallisation du miel.

Du rucher à la miellerie, l’humidité est l’ennemie n°1

Pour garantir une bonne humidité de son miel même operculé, il est indispensable de contrôler son taux d’humidité avant extraction et d’avoir des pratiques apicoles qui limitent la prise d’humidité du miel. Un taux d’humidité trop élevé peut être dû à une reprise d’humidité en miellerie, du fait du caractère hygroscopique du miel. Bruno Camus préconise deux outils pour gérer l’humidité : un réfractomètre et une chambre chaude, ou plutôt une chambre de déshumidification.

Si la déshumidification est souvent associée à la chambre chaude, il faut bien savoir que ce n’est pas la chaleur qui déshumidifie le miel, mais bien le déshumidificateur. Bruno conseille donc d’entreposer les hausses pleines en chambre de déshumidification avant extraction : une pièce équipée d’un déshumidificateur, d’un ventilateur, d’une sonde hygrométrique et qui soit chauffée et hermétique.

Les hausses sont alors empilées les unes sur les autres. Pour faciliter la déshumidification, on peut éventuellement les intercaler, mais l’essentiel est de les surélever en les posant sur des palettes. Cela crée un effet cheminé, favorisant le passage de l’air du bas vers le haut et donc la déshumidification du miel. Les hausses sont laissées en chambre de déshumidification trois ou quatre jours, pas plus d’une semaine : les mesures d’humidité déterminent la fin du séjour.

Le maturateur : décanter pour améliorer la cristallisation

Le phénomène de cristallisation débute avec ce qu’on appelle un starter, majoritairement des cristaux de glucose, mais également des résidus exogènes au miel comme des résidus de cire, des poussières, des défauts sur le pot… Les cristaux de sucres s’agglomèrent ensuite les uns aux autres.

Si l’on veut maîtriser la cristallisation de son miel ou vendre un miel liquide, il faut donc chercher à limiter la présence de ces starters exogènes, mais sans éliminer les cristaux de glucose ni les pollens. Pour cela, on peut utiliser une maille de 200 micromètres. Autre solution, moins chronophage et plus efficace : réaliser une décantation de son miel en utilisant un maturateur !

Un maturateur est un outil de stockage de courte durée. Sa particularité est d’être deux à trois fois plus haut que large. Cette hauteur de colonne, du fait de la poussée d’Archimède, fait remonter les impuretés en surface plus facilement. En pratique, même si le maturateur est l’outil approprié, le fût est souvent privilégié par les apiculteurs pour réaliser la décantation du miel, avec des résultats satisfaisants.

Une décantation est efficace au terme d’une semaine à 25 °C. Pour éviter de chauffer toute la pièce de travail, on peut utiliser une couverture chauffante autour du maturateur. Cette température limite la viscosité du miel et favorise donc la remontée des impuretés, entraînées par les bulles d’air qui remontent en surface. Un miel qui sort d’un maturateur doit être limpide.

L’ensemencement, pour maîtriser la cristallisation

Une fois décanté, le miel sera vendu soit liquide, soit cristallisé. Dans le second cas, pour maîtriser la cristallisation du miel, il est conseillé de l’ensemencer, c’est-à-dire y intégrer du miel à cristallisation parfaite, que l’on appelle semence, pour obtenir un miel équivalent à la qualité de la semence intégrée.

Les apiculteurs ont plutôt tendance à stocker en fût le miel non ensemencé. Il sera alors ensuite défigé, ensemencé et mis en pot. Bruno recommande plutôt : extraction, décantation, ensemencement, mise en pot. Mais le temps vient souvent à manquer pour mettre en pot, une autre option est donc possible : extraction, décantation, ensemencement, mis en fût, stockage, défigeage en étuve, mise en pot. Le miel étant déjà ensemencé, l’étuve le ramollit et cela peut suffire pour une bonne pompe doseuse.

Le miel qui n’en faisait qu’à sa tête ?

Miel trop dur, cristallisation grossière, texture sableuse en bouche : autant de critères que l’on ne souhaite pas retrouver dans son miel après l’avoir ensemencé. Le miel est un produit complexe qui est influencé par bon nombre de paramètres. Si l’on ne peut pas tous les lister, voici quelques principes de base à respecter pour faire un pas de plus vers une cristallisation dirigée réussie.

Remerciements : Bruno Camus
Cet article a été rédigé suite à la formation « Comprendre et maîtriser la cristallisation de son miel », réalisé par Bruno Camus à Goutelas, en novembre 2023.

Le réfractomètre, un outil indispensable pour connaître l’humidité de son miel

Le réfractomètre est essentiel pour les miels de printemps et de châtaignier qui rencontrent ces dernières années de plus en plus de problèmes d’humidité. Il permet de s’assurer qu’une fois mis en fût, notre miel ne dépassera pas 18 % d’humidité, au risque qu’il fermente.

Les hausses du haut vont se déshumidifier plus vite que les hausses du bas, il est donc nécessaire de tester l’humidité du miel à différents niveaux de la pile : en haut, au milieu et en bas. Bruno suggère d’obtenir une humidité moyenne de 17,5 %, pour prévenir le risque de réhumidification du miel au moment de l’extraction.

Quelques conseils pour une bonne lecture de son réfractomètre : étalonner régulièrement avec une solution étalon, nettoyer au linge humide plutôt qu’à grande eau et pour une précision assurée, deux réfractomètres valent mieux qu’un.

À savoir

Bien gérer la température : 20 – 25°C pour l’ensemencement, 14°C pour la cristallisation finale en pot.
10 % de semence du volume total de miel.
Brasser doucement chaque jour quelques jours.
Observer la texture et la couleur, pour mettre en pot au bon moment.
Rédaction Réussir

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