« Un très mauvais signal pour la filière ovine »
Michèle Boudoin, Présidente de la Fédération nationale ovine
Le 14 décembre dernier, deux semaines avant l’ouverture des déclarations de l’aide ovine 2018, le ministère de l’Agriculture a convié l’ensemble des syndicats agricoles représentant la production ainsi que l’interprofession ovine à une réunion pour les informer de modifications majeures concernant l’aide ovine. Retour avec Michèle Boudoin.
Que vous a annoncé le ministère de l’Agriculture lors de cette rencontre ?
Le ministère nous a dévoilé les premières conclusions de l’audit diligenté par la commission européenne sur l’ensemble des aides couplées 2015 et 2016. Elles mettent en évidence de graves dysfonctionnements entre l’aide ovine appliquée en France et les règles européennes sur l’octroi des aides couplées. L’ensemble des aides complémentaires constituant l’aide ovine depuis 2015 seraient considérées par la commission européenne comme illégales ! Si ces premières conclusions sont confirmées, cela signifie que la Commission Européenne ne remboursera pas à la France le montant équivalent d’aides déjà versées aux agriculteurs en 2015, 2016 et 2017.
Le Ministère nous a affirmé que cette correction financière sera assumée à 100 % par l’État et non par les agriculteurs, bien que la commission ait la possibilité de l’exiger.
Quelles est la conséquence de cette décision ?
La conséquence majeure est la modification de l’aide ovine 2018. Les majorations commercialisation (majoration de 9€) et nouveaux producteurs (majoration de 6€) sont supprimées !
L’aide ovine 2018 sera uniquement composée d’une aide de base dont l’accès sera conditionné, comme c’est le cas aujourd’hui, par un nombre minimum de brebis (50 brebis) et un taux de productivité de 0.5 agneau vendu (la rétropolation est conservée).
Les premières estimations du ministère mettent en avant une aide de base unique pour 2018 d’environ 21€. A cela devrait s’ajouter les 2€ pour les 500 premières brebis. J’insiste sur le fait que ces montants sont purement indicatifs et simulés à partir des informations dont dispose le ministère en 2017.
Enfin, puisque les mauvaises nouvelles n’arrivent pas seules, le ministère de l’Agriculture et de l’Alimentation nous a informés que le budget global dédié à l’aide ovine 2018 sera considérablement impacté par la convergence et le transfert du 1er au 2nd pilier. Notre enveloppe sera ainsi de 113,9 millions d’euros contre 119 millions en 2017 !
Comment avez-vous reçu ces annonces ?
À la FNO nous regrettons amèrement ces décisions ! Ces modifications sont un très mauvais signal pour notre filière. Alors que depuis plusieurs années, nous travaillons, avec l’aide des pouvoirs publics, à l’orientation de la production vers la performance globale des exploitations ovines pour rendre notre production toujours plus compétitive et performante, ces modifications viennent ruiner les efforts de professionnalisation de notre filière que nous mettons en œuvre depuis plusieurs années. Récemment, à Rungis, le président de la République demandait aux professionnels des filières agricoles de se tourner vers l’avenir. Dans ces conditions, quel avenir imagine l’État français pour la production ovine ?