"Petit on en rêve ; adulte on en crève"
Jeudi 25 janvier, une manifestation d'envergure a largement perturbé la circulation aux abords du Puy en Velay.
Près de 500 agriculteurs ont exprimé leur colère.
Jeudi 25 janvier, une manifestation d'envergure a largement perturbé la circulation aux abords du Puy en Velay.
Près de 500 agriculteurs ont exprimé leur colère.
150 tracteurs, près de 500 agricultrices et agriculteurs, la Haute-Loire agricole s'est fortement mobilisée ce jeudi 25 janvier, emboitant le pas aux autres départements, dans une manifestation nationale d'envergure à l'appel de la FNSEA et des JA.
Dès 9 heures du matin, les tracteurs quittaient la cour de leur ferme de Saugues, Pradelles, St Front, Tence, Monistrol/Loire, pour rejoindre les ronds-points de Polignac sur la 102, et des Baraques au sud et de Lachamp au nord-est sur la RN88. Et depuis leur point de ralliement, les 3 convois s'ébranlaient vers 10h30 pour gagner le chef-lieu du département -encadrés par les forces de police pour des questions de sécurité- bloquant dans leur sillage des dizaines de voitures. La manifestation étant annoncée, nombre d'automobilistes avaient choisi des itinéraires bis, encombrant alors les axes secondaires pour entrer dans le Puy.
Avant de converger vers la grande place du Breuil, un convoi s'est rendu devant l'OFB (Office français de la Biodiversité), rebaptisé par les manifestants pour la journée "Office Français de la Bêtise", puis devant la DDT (Direction départementale des territoires) et la DGFIP (Direction générale des Finances publiques), trois instances, qui selon les agriculteurs, sont responsables avec le Gouvernement d'une "suradministration devenue insupportable".
Entre 12h et 14h, les 150 tracteurs accompagnés par de nombreux manifestants en voitures, se sont installés sur la place du Breuil devant la Préfecture, dans un impressionnant et tonitruant ballet rouge, vert, bleu, jaune… À leur arrivée pour certains ou avant de partir pour les autres, les imposantes remorques ont été délestées, sur l'avenue du général De Gaulle devant la Préfecture, de leurs chargements de pneus, suite à une collecte réalisée sur les exploitations en amont de la manif. Le message était clair : "pendant des années, nous avons utilisés les pneus pour mettre sur nos silos, aujourd'hui, pour des raisons environnementales, on nous demande de les enlever, mais nous devons payer. Nous les rendons à l'État, à lui de se dém…" expliquera Yannick Fialip président de la Chambre d'agriculture.
"On veut être libre d'entreprendre"
Face aux agricultrices et agriculteurs rassemblés sur cette place, devant leurs tracteurs équipés de nombreuses pancartes aux messages explicites, les 3 présidents Claude Font pour la FDSEA, Laurine Rousset pour les JA et Yannick Fialip, installés en hauteur dans un godet ont pris la parole pour rappeler leurs revendications, avec calme pour Claude et davantage de punch pour Laurine ou Yannick selon leur caractère. Mais avant de commencer, Claude Font a demandé à ses troupes de respecter une minute de silence en soutien à la famille d'agriculteurs endeuillée (une agricultrice et sa fille décédée, et le père blessé) lors d'une manifestation en Ariège.
Comme ses collègues, le président de la FDSEA a remercié les militants pour s'être "mobilisés si nombreux, avec du matériel, et dans le respect des consignes", pour cette journée qui s'inscrit dans "un soutien aux négociations actuellement en cours au niveau national", et a fermement souhaité un retour du Premier Ministre dès le lendemain. "Petit, on en rêve, adulte, on en crève" : rebondissant sur ces mots brandis par les manifestants, Claude Font a résumé : "ça veut tout dire… Nous vivons une crise morale, sociale et économique et ce en raison des non choix du Gouvernement". Rappelant les points sur lesquels le monde agricole manifeste aujourd'hui, l'application de la loi Egalim, l'arrêt des contraintes administratives et environnementales qui "s'empilent et étouffent les agriculteurs", le respect des promesses politiques. Pour exemple, il a dénoncé le nombre de dossiers PAC non encore soldés : 272 en Haute-Loire. "Il n'est pas normal de jouer avec les trésoreries et les revenus des agriculteurs", et de lancer "nous demandons au Gouvernement de se mettre au travail".
Laurine Rousset s'est ensuite félicitée de cette mobilisation : "ça fait chaud au cœur de voir tout ce monde réunis y compris des non syndiqués, mais en même temps cela montre qu'il y a un énorme problème". Et de dénoncer à son tour "l'inflation normative, la concurrence déloyale de produits importés avec des exigences moindres, les taxations…", avant de lancer "on veut être libre d'entreprendre". Yannick Fialip n'a pas hésité à traiter Bruno Le Maire de "pompier pyromane" qui "ne tient pas parole". Il a aussi fustigé l'OFB, qui entretient la "terreur" dans les exploitations avec ses contrôles à tout va, et "traite les agriculteurs comme des voyous". Et comme si la colère et le désarroi des agriculteurs ne touchent pas l'OFB, ce jour, alors que les tracteurs rejoignaient Le Puy, des agents étaient sur des exploitations en train de les contrôler. L'OFB a été fortement huée par les manifestants.
Le mouvement continue
N'ayant pas demandé d'audience au Préfet - les responsables professionnels l'avaient rencontré la semaine précédente- lentement, à partir de 15h, les tracteurs ont quitté la ville, escortés par les services de police, pour rejoindre la RN88 et la bloquer dans les deux sens au niveau de la tranchée couverte en aval du village de Mons sur la déviation du Puy, engendrant ainsi une forte perturbation du trafic routier et ce jusqu'en fin de soirée.
Les tracteurs sont ensuite repartis en direction de chez eux, s'arrêtant toutefois aux carrefours de Lachamp, Polignac et les Fangeas pour poursuivre leur action.Dès le lendemain matin, FDSEA et JA ont décidé de continuer à mettre la pression sur le Gouvernement. Le mouvement de grogne continue.
Dès 10h, des agricultrices et agriculteurs avec leurs tracteurs se regroupaient au Fangeas, au carrefour des Routes nationales 102 et 88 pour un blocage à durée indéterminé.
La mobilisation continue !
A l'heure où nous bouclons notre journal, les agriculteurs de la FDSEA et des JA de Haute-Loire poursuivent leurs actions sur les axes stratégiques du département à Pradelles, Brioude et St Ferréol d'Auroure, au moyen de barrages filtrants pour ralentir la circulation des voitures et surtout interdire l'entrée des poids lourds chargés de marchandises sur la Haute-Loire. Au passage, les manifestants procèdent à une vérification de la cargaison des camions (en particulier l'origine géographique des marchandises), sans déchargement. Les premières annonces du Premier Ministre faites le 26 janvier sur une exploitation n'ont pas suffi à calmer la colère des agriculteurs. " Les annonces de Gabriel Attal sont un début de réponses à nos revendications ; mais ce n'est pas suffisant" explique le président de la FDSEA, Claude Font. "Le premier Ministre a annoncé quelques mesures d'urgence comme le GNR..., mais nous attendons à présent des réponses structurelles qui permettent de pérenniser l'avenir des jeunes sur les exploitations" a souligné Laurine Rousset, présidente des JA de Haute-Loire.
La mobilisation, très suivie sur le terrain, continuera donc aussi longtemps que nécessaire.