Le « Cœur de gamme » au centre des attentions
Le « Cœur de gamme », les SNA et la place de la France dans l’Europe, tels étaient les sujets principalement abordés au congrès annuel de la FNSEA 03, vendredi 21 avril dernier à Saint-Pourçain-sur-Sioule.
Le sujet du dernier congrès de la FNSEA 03 devait être l’Europe. Finalement, les discussions autour de la chose communautaire ont tourné court au profit d’échanges plus terre à terre et beaucoup plus centrés sur le Bourbonnais.
SNA : « Le job était fait »
La colère s’est cristallisée autour des SNA (Surfaces non agricoles) et de la gestion qualifiée de
« calamiteuse » par Gilles Cabart qui utilise la métaphore antique pour traduire sa pensée : « Nous sommes maintenant condamnés tel Sisyphe (*) avec son rocher à identifier éternellement les SNA qui sont annulées systématiquement par l’administration sur notre registre parcellaire. Le but dans tout cela n’est-il pas tout simplement de favoriser des contrôles avec pénalités ? Comment voulez-vous être dans les clous lors d’un contrôle 2017 en partant d’une situation de 2015 ? ». Et, avec une pointe d’ironie, le président de la FNSEA 03 prodigue le conseil suivant à la Direction départementale des territoires (DDT) : « Ne perdez plus de temps avec les SNA. Qui connaît mieux ses parcelles que l’agriculteur lui-même et, de toutes façons, en cas de contrôle, nous en assumerons, comme toujours, les conséquences ». En ébullition sur le sujet, Patrice Bonnin, président de la Chambre d’agriculture, ne s’est pas fait prier pour livrer son sentiment, qualifiant d’« enfumage » la situation dans laquelle se trouve les agriculteurs aujourd’hui face à leur déclaration Pac ; devoir revenir sur les déclarations 2016 pourtant corrigées avec minutie n’est pas acceptable. « L’année dernière, on nous a demandé de mettre à jour toutes les SNA de nos exploitations, nous l’avons fait. Pour notre part, le job est fait. L’administration nous demande de recommencer, ce n’est pas admissible ! »
Promouvoir les magasins qui jouent le jeu du « Cœur de gamme »
L’autre sujet, un peu moins houleux du congrès était le « Cœur de gamme » et sa mise en place. Frédéric Blanchonnet, président de la section bovine de la FNSEA 03 remonte le fil du sujet : « C’est en juin dernier que le mécanisme du « Cœur de gamme » s’est mis en marche avec la signature de l’enseigne Super U à la charte d’engagement, avec une rémunération à l’éleveur sur la base de ses coûts de production soit une revalorisation de nos vaches allant de 250 à 450 euros par animal concerné (…) Au final, la quasi-totalité des enseignes ont adhéré. Mais tout cela, très souvent, dans la douleur. Sans une forte pression syndicale dans les GMS partout sur le territoire, rien de tout cela n’aurait abouti ». À la tribune, Frédéric Blanchonnet se fait l’avocat d’un « Cœur de gamme » qui, aux dires de certains éleveurs, ne va pas assez vite. La volonté du syndicat de « promouvoir les magasins qui jouent le jeu du « Cœur de gamme » afin d’inciter les autres à le faire ». Gilles Cabart, prenant acte des remarques des plus impatients, joue l’apaisement : « Aujourd’hui, on passe deux bêtes de son troupeau en « Cœur de gamme », ce sera bientôt quatre et ainsi de suite ».
Une Europe qui protège
Enfin, il a tout de même été question d’Europe sous l’impulsion de Michel Joux, président de la FRSEA Auvergne-Rhône-Alpes et administrateur FNSEA qui remplaçait, au pied levé, Jérôme Volle. L’agriculteur de l’Ain plaide en faveur d’une « Europe forte et politique » rejetant « la transposition de normes » mais croyant à « l’importance d’imposer un
cadre ». Gilles Cabart dresse aussi son constat en parlant du « résultat de plus de dix ans d’une politique d’abandon de notre agriculture. Du premier rang, nous sommes passés au troisième rang des exportateurs agricoles européens. Qui nous parle du solde de la balance commerciale agricole excédentaire d’année en année ? Comme si l’agriculture n’était plus un secteur stratégique ! ». Et, c’est en usant de l’anaphore que le président du Syndicat départemental énumère ses propositions : « Il faut que les aides directes restent le socle de la Pac. Il faut un système assurantiel plus attractif et plus efficace avec un seuil de déclenchement à 20 %. Il faut qu’une assurance « chiffre d’affaires » soit étudiée afin de la proposer à chaque agriculteur. Il faut des aides découplées maintenues pour les productions les plus fragiles ». Le mot de la fin pour Michel Joux : « Il ne faut pas casser l’Europe, il faut changer l’Europe. Pour qu’elle nous protège et pas pour qu’elle nous emmerde ! »
(*) Pour s’être rebellé contre la volonté des dieux en confiant leurs secrets aux humains, Sisyphe fut condamné par Hadès à pousser un énorme rocher jusqu’au sommet d’une montagne dans le royaume des morts. À peine ce but atteint, le rocher roulait jusqu’au pied du versant d’où Sisyphe devait le remonter.